SANANDA MAITREYA L’EX-TTDA OU LE RETOUR D’UN HEROS DU ROCK: Épisode 1
33 ans c’est l’âge du Christ, c’est aussi le (long) laps de temps qui s’est écoulé depuis ma toute première rencontre avec un garçon aussi bluffant que déboussolant, celui que nous connaissions tous sous son patronyme de Terence Trent d’Arby, alias TTDA et désormais auto-baptisé Sananda Maitreya qui a publié l’ambitieux double CD intitulé « The Pegasus Project : Pegasus & the Swan », qui nous enthousiasmait tant début juin. Retour d’un héros du rock : Épisode 1 !
On vous en parlait voici déjà trois semaines, impossible de passer à coté du double CD de Sananda Maitreya, ce brillant « The Pegasus Project : Pegasus & the Swan » à la fois Opéra rock classique, comédie musicale et ORNI ( Objet Résonnant Non Identifié) longuement analysé par votre Gonzomusic ( Voir sur Gonzomusic SANANDA MAITREYA’S PEGASUS PROJECT : « Pegasus & the Swan » ). Bien entendu, il parait impossible d’évoquer ce chanteur musicien interprète compositeur arrangeur producteur sans préciser que nous l’avions rencontré jadis sous sa première identité de Terence Trent d’Arby, star aussi surdouée que riche en couleurs ( Voir sur Gonzomusic LA LEGENDE DU ZARBI D’ARBY , TERENCE TRENT D’ARBY STAR MÉTÉORE et aussi QUAND TERENCE TRENT D’ARBY ECRIVAIT DANS BEST ) dont l’analogie avec à la fois Prince et Michael Jackson m’apparaissait absolument évidente… ce qu’il avait pourtant nié dès ma toute première question posée en octobre 1987 pour BEST lors de la toute première venue de l’artiste à Paris dans la foulée de son brillant « Introducing the Hardline According To Terence Trent d’Arby » :
« En écoutant ta musique, on ne peut s’empêcher de penser à Michael Jackson et à Prince. Les écoutes-tu ?
J’aimerais que l’imagination des journalistes aille au-delà d’une simple image ou d’un visage. Les gens entendent ce qu’ils veulent entendre. Ma musique n’a absolument rien à voir avec la leur. Pour moi, c’est de la paresse critique. À part la couleur de ma peau, je n’ai rien à voir avec eux. »
Et toc … GBD tu peux aller repasser ton diplôme de rock-critic … sauf que six mois plus tard, le même TTDA confie à Bruno Blum du même BEST :
« Prince, par exemple, sera la seule personne que la plupart des critiques de rock autoriseront à être noire, à avoir la peau claire et à faire de la musique expérimentale dans ma décennie ? Et donc tous les autres sont juste un niveau en dessous de lui ? ». Et tout le monde le regarde. Et ils l’attendent tous (rires) ? Et je suis très honnête en vous disant que cela me dérange. Parce que, tout d’abord, je l’admire depuis… bien avant que la plupart des gens ici ne sachent qu’il existait. »
33 ans après notre première rencontre… GBD découvre qu’il avait finalement raison… et TTDA/Sananda en convient enfin… la preuve par cette singulière rencontre. San… puisqu’il m’autorise à m’adresser à lui sous ce diminutif… s’exprime d’une voix douce et claire, presque juvénile, une voix que manifestement le temps a su épargner.
« Hello San … je ne t’entends pas très fort…
Je ne suis pas quelqu’un qui parle très fort.
Je sais, nous nous sommes déjà rencontrés jadis.
Il me semble qu’effectivement ton visage m’est familier, je crois avoir une bonne mémoire des visages que je rencontre, bien plus que des noms. Mais j’oublie rarement un visage.
Je ne portais pas de lunettes à l’époque en 1987 ! Je t’ai rencontré la première fois que tu es venu à Paris dans un hôtel près de l’Opéra et j’étais le tout premier journaliste de la liste à te tendre mon micro pour t‘interviewer pour BEST magazine.
Ah mais je me souviens de BEST magazine.
Tu as fait plusieurs trucs chez BEST. D’abord, mon ITW en 1987, puis quelques mois plus tard une seconde ITW avec Bruno Blum et enfin encore un peu plus tard encore BEST a publié un éditorial de ta part où tu partageais ton amour pour Michael Jackson.
Ah j’avais complètement zappé cette histoire.
Mais, tout d’abord, juste un mot concernant ton nouveau double CD qui m’a énormément surpris car c’est à la fois un Opéra, une comédie musicale rock, c’est très rafraichissant et particulièrement original que cela m’a donné envie de te parler à nouveau.
Ah, mais merci beaucoup.
Bon ,j’avoue j’étais un peu dubitatif au début quand j’ai vu 41 titres ! Je m’attendais à un truc barré et expérimental et en fait c’est aussi un album pop très riche et éclectique. Et il va falloir vraiment en parler. De combien de temps disposons-nous ?
Ne t’inquiètes pas, tu auras tout le temps dont tu as besoin… raisonnablement !
Donc, remontons le temps jusqu’en 1987 …
Si tu insistes…
Lorsque je t’ai rencontré San, si tu me permets de t’appeler ainsi, la toute première question que je t’ai posée concernait deux artistes qui étaient Prince et Michael Jackson. Et ta réponse à l’époque était éloquente. Je te disais : en écoutant ta musique, on ne peut s’empêcher de penser à Michael Jackson et à Prince. Les écoutes-tu ?
J’aimerais que l’imagination des journalistes aille au-delà d’une simple image ou d’un visage. Les gens entendent ce qu’ils veulent entendre. Ma musique n’a absolument rien à voir avec la leur. Pour moi, c’est de la paresse critique. À part la couleur de ma peau, je n’ai rien à voir avec eux.
Or six mois plus tard lorsque tu échanges avec mon collègue de BEST Bruno Blum et là tu lui avoues « être fan de Prince et de Michael Jackson » je me demandais comment en l’espace de six mois à moi tu dis : non je n’écoute jamais ces mecs et à l’autre gars tu dis : oui, oui j’en suis fan.
Non, je ne t’ai pas dit que je ne les écoutais pas, car les deux comptent parmi mes héros, mais la raison de tout cela, c’est que lorsque tu débarques, lorsque tu cherches à établir qui tu es, tu cherches à tout prix à échapper à ces comparaisons, qui te donnent l’impression qu’elles vont limiter la créativité que tu as envie d’apporter au public. Mais il est évident que ces deux artistes ont compté parmi mes influences majeures et j’aurais été malhonnête de prétendre jamais ne les avoir écoutés. Et je n’aurai pas le cran même d’espérer que quiconque puisse le croire. Mais, j’avais aussi envie de ne pas me laisser trop facilement étiqueter de la sorte. Aussi, il faut que tu souviennes qu’à mes débuts j’ai été recalé par tous les labels aux USA, et c’était bien pour cette raison que j’étais passé par la case Grande Bretagne pour pouvoir émerger ! En fait, CBS qui m’a signé m’avait déjà basé à deux reprises, avant de finalement capituler et me signer mon contrat. Alors, tu ne peux pas savoir combien de fois j’ai entendu : « on n’a pas besoin d’un second Michael Jackson et on n’a pas non plus besoin d’un autre Prince ! », donc au moment où je répondais à tes questions durant ce tout premier voyage promo en Europe, je voulais à tout prix me distancer de ce genre de comparaisons car j’en avais déjà souffert par tous ces aspects négatifs. Je pense que durant ces six mois qui séparent ton interview de celle de l’autre journaliste de BEST, je me sentais bien plus sur de moi, je sentais que mon propre navire avait toute la force de librement naviguer. De surcroit, je crois énormément au karma. J’avais ce pote dont la musique ressemblait si étrangement à celle des Beatles, que je lui ai fait remarquer. Et sa réponse était : ah, mais je n’ai jamais vraiment écouté les Beatles. Je lui ai répliqué que c’était juste impossible.
Ta réponse me fait plaisir, car franchement lorsque j’ai lu la seconde interview de BEST six mois après la nôtre, je n’en croyais pas mes oreilles lorsque tu racontais qu’effectivement à la fois Prince et Michael Jackson étaient tous deux des influences majeures pour toi.
Finalement, Prince et moi sommes devenus amis et il est même devenu un mentor à mes yeux. Nous avions une vraie relation aussi solide que satisfaisante. Il a fini par m’accepter comme si j’étais un petit frère pour lui. Quant à Michael, il n’avait que quatre ans de plus que moi, mais objectivement musicalement il venait d’au moins deux génération avant la mienne. En fait les deux artistes aussi bien Prince que Michael ont fini par reconnaitre en moi une sorte de frère d’armes ; C’était peut-être plus difficile avec Michael car lui et moi étions sur le même label. C’est sans doute la plus grande ironie de ma vie : la musique qui m’a donné la vie c’était celle des Beatles, c’était le tout premier souvenir musical planté dans ma mémoire dans cette expérience physique-là de moi-même. Et, ironiquement, après que Michael ait racheté le catalogue musical des Beatles, cela lui a permis de faire pression sur la maison de disques qui cherchait à forger un partenariat avec lui à ce moment. Et grâce à ce moyen de pression, il a pu obtenir à peu près tout ce qu’il voulait du label. Jusqu’à me mettre des bâtons dans les roues. Je me souviens de cette fête où nous étions ensemble lui et moi, nous étions presque dos à dos pour parler à des gens. Nous avions exactement la même taille, portions exactement les mêmes pompes, et pourtant, il me parlait à peine. Bien entendu, il ne me devait rien mais il faut savoir que lorsque tu grandis dans un business aussi impitoyable, tu finis par devenir toi-même quelqu’un d’impitoyable. Gerard, crois-moi si tu veux, mais mon ambition n’a jamais été de l’ordre du succès commercial ; mon ambition a toujours été essentiellement artistique. Portée par l’idée que tu pouvais toujours être fidèle à ta propre vision. Ce qui n’empêche pas de vendre des disques, bien au contraire. Mais, bien entendu, tu dois disposer d’une structure à tes cotés qui te soutient. Tout ça pour te dire que cette question m’a bloqué dans mon terrier et que Michael a tout fait pour stopper ma progression, tandis que Prince aura toujours su se montrer aussi cool que généreux à mon égard.
Merci pour ta franchise. Je me souviens de deux de tes concerts sous ton autre identité, l’un au Palace, le second au Zénith, qui était juste à couper le souffle. J’ai publié un rock-report dithyrambique dans BEST, écrivant que je n’avais jamais assisté à un tel spectacle. Et pour revenir à aujourd’hui, est-ce que tu vas amener ton nouveau double CD en tournée ?
Hélas, pour le moment, nous ne ferons qu’un seul concert en France cet été dans un Festival cependant pour la rentrée nous sommes effectivement en discussion avec un promoteur pour booke d’autres dates à la rentrée. Alors je sais que ces festivals d’été offrent souvent de belles opportunités, mais j’aime plutôt privilégier les concerts en salle et sur mon seul nom, au lieu de partager l’affiche avec d’autres artistes. Mais je suis très excité à l’idée de cette tournée qui passera par la France. Tu sais, Gerard considérant l‘environnement dans lequel j’ai grandi, il y avait deux cultures en Europe que j’ai voulu embrasser c’est la culture anglaise et la culture française. Car si les deux offrent d’incroyables similarités, ce sont deux salopes bien snobs… (rire) qui n’apprécient jamais rien ; alors recevoir une marque de satisfaction de la part d’un Français ou d’un Anglais, c’est carrément un privilège. Tu ne le sais peut-être pas, mais je me targue d’être un historien de la musique amateur et aussi de la littérature, de la culture, au sens large, et cela a toujours constitué le pilier de ma religion. Et vous, les Français, vous avez su accueillir chez vous tant d’artistes qui étaient des proscrits en Amérique, qui n’étaient ni acceptés ni revendiqués par leur propre culture, que cela soit Miles Davis ou James Baldwyn ou encore Gertrude Stein. Je suis donc particulièrement sensible aux nombreux échanges qui ont pu se nouer entre les deux cultures, au fil des ans. C’est sans doute une des raisons pour lesquelles les Français ont su m’embrasser, comme vous l’avez fait depuis mes débuts.
On va dire que l‘intérêt était mutuel. Je t’ai dit précédemment combien tu avais su nous impressionner avec ce tout premier LP « Introducing… » lorsque tu débarquais pour la première fois dans notre capitale. Une question stupide, tu as commencé en tant que boxeur… pratiques tu toujours ce noble art ?
Non, j’ai cessé la boxe depuis longtemps, mais je fréquente assidument ma salle de sport et je tape encore souvent sur un sac à sable. Tu sais, quand j’évoque mon passé, j’ai souvent cette image du guerrier. Je me considère en tant que te,l car je combats au nom de l’art. Et c’est une bataille acharnée qui ne cesse jamais. Car tu es toujours obligé de repousser ceux qui cherchent t’imposer ce qu’ils considèrent comme être la norme. Voilà pourquoi il faut sans cesse ouvrir les consciences, ouvrir l’âme humaine. Que cela soit les patriciens de l’Antiquité ou les multinationales d’aujourd’hui ; que cela soit l’Église jadis ou les 0,01% d’aujourd’hui, ils ont toujours tenté de capter à leur profit le pouvoir de l’Art. Et si tu les laisses t’utiliser, alors tu acceptes de te mettre à leur service, et ton art perd tout son sens. Par conséquent, tu dois être capable de te défendre, d’où l’analogie avec le guerrier. L’Industrie (musicale) ne viendra jamais te dire : vas-y petit gars, fais-en à ta tête ! Donc tu dois forcément te soumettre à ce qui constitue leur « zone de confort ». C’est en découvrant qui j’étais vraiment et en rebondissant que j’ai acquis, je crois, le respect de la part de mes pairs. Et franchement, j’étais assez bon boxeur pour un type aussi marginal. J’ai cessé les combats lorsque j’ai décroché un Golden Glove en 1980 pour la Floride. J’ai arrêté après ce jour où j’étais en train de gagner mon combat lorsque je pouvais entendre la mère de mon adversaire, qui continuais à le soutenir, de lui crier qu’il allait gagner. Et moi je cognais ce gamin en plein visage et, à un moment-donné, j’ai réalisé que j’étais vraiment bouleversé par l’amour inconditionnel de cette mère. C’est là que j’ai compris que j’avais assimilé tout ce que la boxe pouvait m’apporter de plus beau. J’ai surtout réalisé que je n’étais pas venu au monde pour cogner un enfant né d’une mère aussi aimante.
Et c’est pour cela que tu es ensuite devenu manager de catcheuses dans la boue ( women’s mud wresling entre le catch et les gogo girls)…
(rires)
À SUIVRE…
Voir sur Gonzomusic SANANDA MAITREYA L’EX-TTDA RETOUR D’UN HEROS DU ROCK : Épisode 2
SANANDA MAITREYA L’EX-TTDA RETOUR D’UN HEROS DU ROCK : Épisode 2