OINGO BOINGO « Nothing to Fear »
Voici 42 ans dans BEST GBD continuait inlassablement de creuser le sillon d’un de ses groupes US fétiches, l’hallucinant Oingo Boingo, mené par l’hyperactif Danny Elfman qui publiait alors le successeur de son déboussolant « Only A Lad » sorti un an auparavant. Et pour son second LP on peut dire que l’inclassable formation de Los Angeles avait su mettre les petits plats sonic dans les grands, sans oublier cet indispensable grain de folie cinématographique qui animait déjà le futur champion des BO. Flashback….
C’est loin, très loin d’être la première fois où nous évoquons dans ces colonnes le génie de Danny Elfman, fulgurant nageur à contre-courant au radieux pays du rock and roll. Déjà un an avant de chroniquer ce deuxiéme 33 tours, j’avais rencontré Danny Elfman ( Voir sur Gonzomusic GO GO GO GO AVEC LES GO GO’S ET (OIN)GO (BOIN)GO ) sur le tournage de sa vidéo d’ « Only A Lad », la chanson-titre de son premier album que j’avais également chroniqué pour le fameux mag de la rue d’Antin ( Voir sur Gonzomusic OINGO BOINGO « Only a Lad » ). Certes, la carrière du musicien de LA atteindra des sommets stratosphèriques propulsé par le succès colossal de ses très nombreuses Bandes Originales – dont la quai totalité des films de Tim Burton-, mais le rocker allumé nous manque parfois au-delà du compositeur ultra talentueux, la preuve par cet article enamouré publié par l’ami Ramon Pipin dans sa collec’ UNBURYING THE GEMS ( Voir sur Gonzomusic UNBURYING THE GEMS : DANNY ELFMAN ) , c’est dire si ce deuxiéme LP de Oingo Boingo résonne de toute cette nostalgie du luxuriant rock de LA à l’aube des années 80…
Publié dans le numéro 171 de BEST
Danny Elfman, c’était la « Folie Rouge » à l’époque où il faisait partie du Grand Magic Circus de Savary. Sous ses cheveux rouge-carotte bouillonnent un sens créatif hyper-trophié et un goût profond pour le spectaculaire. « Only A Lad », le premier Oingo Boingo sorti l’ an passé, se présentait comme un manifeste conservato-libéral particulièrement éclaté. The Mystic Knights of the Oingo Boingo avaient Danny E. comme grand maitre et théoricien ; l’album, enregistré et mixé en quatre jours, était un instantané des incroyables possibilités de ce groupe bien à part. O.B. n’appartient ni à la vieille famille de la country rock, ni à celle du new punk californien symbolisé par X ou Black Flag. O.B., c’est carrément une autre dimension et c’est sans doute ce qui fait sa force. Avec sa section de cuivres, Danny E. trace quelques portraits funkysants qui vous entraînent aux portes du continent noir. « Grey Malter » ou « Insects » ont une couleur tribale assez marquée, ce qui n’est pas un son très commun dans la cité des Anges. Danny E. a toujours la truffe en l’air à la recherche d’une inspiration originale. « Insects », par exemple, règle une bonne fois pour toutes leurs comptes à nos fantasmes des films d’horreur aux bestioles de tous poils comme les araignées ou les vers géants.
Oingo Boingo s’écarte volontairement des sentiers habituels du rock : love songs ou street songs. La conscience politique, ou plutôt une certaine conscience politique qui rejette Reagan mais pas son système, est omniprésente sur les deux faces de ce vinyle. Le travail ou la vie privée sont passés au crible de la critique. Danny ne crache pas pour autant sur le « hamburger way of hie », il l’observe simplement avec humour. « Wild Sex (In the Working Class) » ou le sexe moteur de l’économie, c’est une composition qui rappelle un peu l’esprit de Devo à ses débuts. Oingo Boingo a dû passer l’année à travailler son style : sur « Whole Day Off » – encore un thème sur le travail- le groupe me rappelle le Steely Dan de « Can’t Buy A Thrill ». Elfman a choisi d’exprimer sa musique sans renier pour autant sa mécanique d’intellectuel. « Nothing To Fear » qui donne son titre à l’album est une longue énumération de toutes les causes possibles de déclenchement d’une nouvelle guerre planétaire. Je suis prêt à parier une pile de t-shirts Oingo Boingo que Danny a déjà investi une partie de ses royalties dans le matériel de survie pour l’après cataclysme, juste au cas où…
Publié dans le numéro 171 de BEST daté d’octobre 1982