J’AIME PARLER À COUTIN
Voici 40 ans dans BEST, GBD interviewait Patrick Coutin pour la mythique rubrique « Le rock d’ici » dans la foulée de son premier album généreusement boosté par le hit solide « J’aime regarder les filles ». Tournée hexagonale, nouveau titre clippé « La ballade de Jesus Cat », en 2022 Coutin is still rockin’ … et il le prouve ! Retour sur une première rencontre avant bien d’autres avec ce solide rocker hexagonal, sans doute notre Keith Richards made in Paname. Flashback….
C’est loin, très loin d’être la première fois où je vous parle de Patrick Coutin dans Gonzomusic ( Voir sur Gonzomusic https://gonzomusic.fr/coutinrockuptible.html , https://gonzomusic.fr/coutin-ou-la-saga-de-lhomme-qui-aimait-regarder-les-filles-episode-1.html , https://gonzomusic.fr/coutin-ou-la-saga-de-lhomme-qui-aimait-regarder-les-filles-episode-2.html , https://gonzomusic.fr/coutin-ou-la-saga-de-lhomme-qui-aimait-regarder-les-filles-episode-3.html , https://gonzomusic.fr/coutin-ou-la-saga-de-lhomme-qui-aimait-regarder-les-filles-episode-4.html , https://gonzomusic.fr/coutin-the-album.html , https://gonzomusic.fr/coutin-is-morrison.html et aussi https://gonzomusic.fr/le-coutin-show-is-back.html ), cependant j’étais particulièrement fier de cette toute première TW dans la rubrique « Le rock d’ici » de Philippe Lacoche dans BEST. En effet, jeune pigiste de Rock & Fol, dès notre rencontre au Gibus où il assurait la sono, Patrick Coutin était une sorte de grand-frère rock-critic à mes yeux, répondant avec patience et gentillesse à mes nombreuses interrogations sur cette profession que je venais d’embrasser. Quatre décennies plus tard cette première discussion résonne toujours à mes oreilles et je suis heureux de vous la faire partager ….
Publié dans le numéro 158 de BEST sous le titre:
J’AIME ÉCOUTER COUTIN
Patrick Coutin, vous avez dit Coutin ? Là, je vois pas… mais si, juste un petit effort. Un mec brun, les cheveux fous, tenue distraitement négligée et un LP, « Coutin », à son actif. Si vous avez quelque mémoire, poussez donc le bouton « rewind » et visualisez un rien : Coutin, ex-reporter rock et nouveau balladeur’n’roll a essayé avec moi le steack de saumon surgelé, si vous en voulez un morceau, faites comme Patrick, nouez votre Sopalin autour du cou et passez donc à table…
Coutin Patrick a eu pas mal de chance dans son adolescence et, surtout, celle de pouvoir rêvasser, glander un peu. Une vie d’étudiant qui se prolonge parce qu’il a appris à se faire à son rêve. Jamais levé avant 11 h du mat’, Patrick avoue que c’est le seul mode de vie qui puisse le conserver en vie. Ensuite, notre Coutin s’est transformé en Coutin-voyageur. Valse des étiquettes sur ses valises: Rome, le Maroc, l’Angleterre, le Mexique et, surtout, les States. Au moins 400 millions de kilomètres au compteur sans exagérer, ou à peine. Après un an de vie commune, il a largué LA pour revenir en Europe.
« La faim m’a poussé à écrire » m’a-t-il avoué, « dès que je suis rentré à Paris, première chose : j’ai tenté de faire un groupe pour concrétiser un peu toute la musique que j’avais accumulée dans ma tête; deuxième chose, j’ai ensuite réalisé que ça faisait six mois que je n’avais pas gagné un rond ; troisième chose : je me suis décidé à pousser la porte d’un canard de Rock (and Folk) ».
Et voilà pourquoi son groupe est baptisé « Reporter »… Main tenant, c’est lui qui accorde des interviews et c’est drôle parce que Patrick a beaucoup plus l’expérience de l’interview que la plupart des ex-confrères qui l’interrogent. Cela donne parfois des résultats assez surprenants dans le style arroseur arrosé ! Dans ce cas, il vaut mieux le laisser s’exprimer :
« Le rôle de l’artiste est aujourd’hui sous-valorisé. On lui refuse jusqu’à présent sa fonction de novateur, de critique, de grande gueule, de fou, pour en faire une image qu’on éloigne le plus possible des gens par le succès ou par tout autre moyen, la dope, les filles, ou je ne sais quoi, le comprends que la morale bourgeoise ait longtemps été contre le sexe, par exemple, parce que, pour des raisons de productivité, il valait mieux que les mecs ne passent pas tout leur temps au pieu. Si on a évolué sur les mœurs depuis 30 ans, par contre, du côté des idées artistiques et musicales, c’est encore le temps des crinolines. Tant qu’on ne reconnaitra pas notre utilité, rien ne pourra avancer…».
J’en profite pour glisser une perfide question sur le côté sexiste de son LP (à mon avis), mais la bête se défend :
« Ma liberté d’être un homme ne pourrait pas exister sans celle des femmes. Elles m’intéressent dans leur corps et dans leur tête: les femmes m’intéressent totalement « J’aime regarder les filles », je l’ai écrite en studio, l’été dernier, à Paris, alors que je n’avais pas pris de vacances depuis deux ans. Ces filles, je ne les regarde pas d’un œil lubrique. C’est dans ma tête un symbole de soleil, de fête, de liberté, je n’ai jamais encore vu une fille se retourner sur moi pour me dire « Hé, arrête de me regarder ». C’est un regard simplement disponible, on n’est pas obligé de gêner ou d’agresser les gens avec son regard. Ainsi, si nous étions capables de faire les choses sans les culpabiliser, on vivrait dans des maisons transparentes. Pendant longtemps, dans la musique, on s’est contenté du « / love you ». La seconde étape, c’était « Salut, on se quitte ». Troisième étape, c’est celle que nous vivons, le sexe travesti. On te dit « Regarde cette fille » comme on dit « Regarde cette bagnole ». C’est nul ».
Patrick vit encore chez sa maman… ou c’est elle qui vit chez lui, puisque toute la famille est regroupée en une sorte de coopérative. De son passé anar, il lui reste encore ce qu’il appelle sa « maladie de l’auto-assumance » :
« Je rêve d’une société idéale. C’est à
dire où l’on protège un peu moins l’individu et où on lui donne aussi un peu plus de chances de vivre vraiment. Il faut à tout prix tenter de réaliser ses folies ».
J’ai rencontré P.C, la première fois, dans les caves humides et rock-parisiennes du Gibus. Nous avons passé, par la suite, un certain nombre de soirées à discuter autour du flipper. Coutin tentant de me convaincre que, si j’avais choisi d’écrire sur la musique, c’était pour mieux continuer à glander. Et il en parlait en connaissance de cause. Après ses années passées à écrire sur les autres, aujourd’hui, ce sont les autres qui grattent sur lui. P.C est heureux parce qu’il semble avoir gagné son pari ; tous ceux (et ils sont nombreux) qui ont tenté de prévoir sa chute proche, se sont plantés en beauté. Si le disque de Patrick, c’est vrai, n’est pas un disque de rock au sens étymologique du terme, je n’en ai strictement rien à cirer. C’est avant tout un disque que j’écoute, au moins régulièrement. Le problème aujourd’hui pour P.C, c’est de monter un groupe qui tienne vraiment le coup et de prendre la route. S’il parvient à tenir ses promesses, je crois bien que le jeune Coutin n’a pas fini de nous surprendre. Sur un bout de papier, Patrick a noté ses rendez-vous juste avant son départ en vacances. Il fouille un peu partout dans ses poches sans parvenir à mettre la main dessus. Bordèlisme et distraction sont les deux mamelles de Coutin : elles contribuent aussi à son charme. Souhaitons seulement que les gros poissons polyvinylés ne nous le dévorent pas…
Publié dans le numéro 158 de BEST daté de septembre 1981
PATRICK COUTIN EN TOURNÉE 2022
4 Juin Romilly Sur Seine, Concert en plein air
12 Juin Piennes, Festival PLM
16 Juillet Le Quesmoy; Brasserie de l’Avesnoy
6 Aout Carpentras, Festival
9 Septembre La Rochelle, Crossroad
10 Septembre Duran, Le son de la nuit
27 Septembre paris, la Dame de canton