SQUEEZE « Singles 45’s and Under »
Voici 42 ans dans BEST GBD persévérait dans sa documentation intensive voire frénétique de l’œuvre de Glenn Tillbrook et de Chris Difford co-leaders de Squeeze dont la pop délicate avait su l’étourdir depuis leur vibrant « Cool For Cats » de 79. Et comment en serait-il autrement ? Depuis le split de la collab’ Lennon/McCartney et après le pétard mouillé Klaatu, les harmonies signées Difford/Tillbrook étaient incontestablement ce qui se rapprochait le plus de celles des Beatles. Hélas, à l’instar des Fab Four, Squeeze connaissait à son tour les affres de la désintégration et ce « Singles 45’s and Under », porté par son sigle inédit « Annie Get Your Gun » apparaissait alors comme un flamboyant chant du cygne… ignorant alors que deux ans plus tard le duo se retrouverait pour un « solo » à deux… avant de reformer Squeeze un an plus tard. Flashback…
Au fil de ces pages web je n’ai eu de cesse de vous marteler mon amour de Squeeze, ce groupe anglais épatant né à l’aube des 80’s, dont la pop music a si bien su m’émerveiller depuis le tout début de ma carrière de journaliste en 1979. De ma première ITW de Squeeze ( Voir sur Gonzomusic MY FIRST SQUEEZE INTERVIEW ) à ma dernière rencontre avec Chris Difford et Glenn Tilbrook ( Voir sur Gonzomusic POUR TOUTE LA POP MAGIQUE DE SQUEEZE ), en passant par les chroniques de « East Side Story » ( Voir sur Gonzomusic SQUEEZE « East Side Story » ), « Sweets From a Stranger » ( Voir sur Gonzomusic SQUEEZE « Sweets From A Stranger » ) ou encore « Babylone And On » ( Voir sur Gonzomusic SQUEEZE « Babylon And On » ) je n’ai jamais cessé de vanter toutes les qualités de leur parfaite pop music made in England. Et ce « Singles 45’s and Under », magnifique collection en forme de « Best Of » puissamment boosté par le diamant brut « Annie Get Your Gun » en guise d’inédit incarne toute la quintessence de Squeeze.
Publié dans le numéro 174 de BEST sous le titre
GOODBYE GIRLS
« Bonsoir Madame… un paquet de Kleenex, s’il vous plait » Encore une ! La vendeuse du drug-store allait finir par avaler ses bigoudis : depuis ce matin, c’était la quinzième petite fille aux yeux larmoyants qui venait chercher des mouchoirs en papier. Mais qu’est-ce qui pouvait bien leur passer par la tête ? Un peu partout, en Angleterre et sur tout le continent nord-américain, les petites filles aux yeux rouges se multipliaient d’heure en heure. Les minettes étaient incapables de stopper ces sanglots des heures, des jours entiers, le flot des larmes coulait ininterrompu. Alertés par les coups de fils de parents affolés, les pouvoirs publics avaient lancé leurs meilleurs enquêteurs sur l’affaire. Après 747 interrogatoires et 666 tonnes d’ouate de cellulose pour éponger le chagrin des youngsters, un rapport top-secret fut déposé sur le bureau des principaux responsables de la politique occidentale. Encore un coup des enragés russes ? Une opération de subversion menée par des commandos de la mort ? Une bombe bactériologique inodore et sélective ? Rien de tout cela, et pourtant, les conclusions du dossier étaient particulièrement limpides : il fallait agir sans tarder. « Squeeze ne confectionnerait plus jamais sa pop romantique » Telle était bien la sèche nouvelle qu’un journaliste de New Melody Sound Express, embusqué sous la table, avait ramassée pour la diffuser largement dans les médias. Quelques heures plus tard, les premières adolescentes craquaient sur les kleenex : certaines ne survivraient pas à l’annihilation de leur groupe favori. Il fallait agir vite. Difford fut rapatrié des U.S.A. par jet spécial, tandis que Tilbrook était conduit à Londres dans la limousine personnelle de Maggie. La rencontre devait avoir lieu au 10 Downing St. Dans le même temps, les teenyboppers tombaient comme des mouches. Comme on pouvait s’y attendre, la tentative de réconciliation baptisée « Mission Thatcher » courait à l’échec. Après douze heures d’un débat serré, le porte-parole annonça la signature d’un protocole d’accord, stipulant la publication d’une compilation des meilleurs titres de Squeeze avec un inédit en guise de cadeau d’adieu. « Singles 45’s and Under » est donc un album qui revient de loin, ce qui en fait déjà un disque rare.
Si, entre 78 et 82, Squeeze a publié cinq LP, cela ne signifie pas pour autant qu’il en ait vendu chez nous. Pourtant, l’ex-groupe de Tilbrook et Difford était parvenu à créer un des plus pétillants cocktails pop depuis les Fab Four. Cette collection de singles reflète assez les facettes tendres et pastel de ces Anglais alpagueurs de Lolitas. Mais Squeeze n’est pas réservé qu’aux petites filles, et aux ados en général, il n’existe aucune limite d’âge à un certain esprit collégien. La compilation recouvre les cinq 33 tours du groupe de « Squeeze » (1978) à « Sweets From a Stranger » (1982) en passant par « Cool for Cats » (1979), « Argybargy » ( 1980) et « East Side Story » (1981) ( Voir sur Gonzomusic ). Tous ces titres ont pulvérisé les hits anglo-saxons, comme « Cool for Cats», à l’époque la meilleure vente d’A&M/Angleterre, ou « Up the Jonction » qui s’est maintenu en seconde position plusieurs mois dans les charts de 79. Mais Squeeze n’est pas une enfilade de chiffres de vente, c’est aussi une question de feeling comme « Up the Jonction », une des plus jolies histoires de rupture du rock anglais. De même, « Tempted » sur des vocaux de Paul Carrack est un bijou R and B/Pop sur le même thème, signé Elvis Costello pour la réalisation. D’ailleurs, la collaboration Squeeze-Costello était à double sens, puisque Chris Difford a contribué pour 50 % aux compositions de I’« Imperial Bedroom », le dernier Elvis. « Black Coffee in Bed » vous prend la tête comme un alcool jeune, une marque dans la mémoire qui « ressemble à cette trace (de café) sur mon bloc-notes/Qui résonne Comme ton adieu ». Last but not least, « Annie Get Your Gun », le titre inédit enregistré cet automne, est aussi le plus abouti t un rock mélodique et vif qui me rappelle furieusement les « Yeah Yeah Yeah » de « She Loves You » ou Buddy Holly et sa bande de Crickets. Aussi, ce LP compilation posthume s’impose-t-il à vous quelle que soit votre catégorie
A : Vous ne possédez aucun disque de Squeeze
B : Vous les possédez tous.
C : Vous les possédez tous y compris les deux compilations à tirage limité : « G Squeeze Songs Crammed Into One Ten-inch Record » et « Squeeze Promotion Only ».
« Annie Get Your Gun » vaut bien un album… Voilà Squeeze décomposé, mais Squeeze va se multiplier sous d’autres patronymes. Difford et Tilbrook prendront la relève. Bientôt de nouvelles étreintes sucrées ; en attendant, « Singles 45’s and Under » est un suave « The end », même s’il n’est pas forcèment « happy ».
Publié dans le numéro 174 de BEST daté de janvier 1983