RETOUR À LA MAISON GAINSBOURG

Gainsbarre

Le Gainsbarre

Trois décennies que les portes de son hôtel particulier se sont refermées. Ce triste 2 mars 1991 Serge Gainsbourg nous a quittés. Et son 5 bis rue de Verneuil s’est éteint à jamais sur ses trésors, sa façade se recouvrant d’hommages et de graffitis de manière proportionnelle au vide croissant laissé par sa disparition précoce. Pourtant après bien des années d’un titanesque combat administratif, Charlotte a enfin obtenu l’autorisation de transformer ce lieu emblématique en un musée Gainsbourg ouvert au public, un hommage que Serge doit sacrément apprécier vu du ciel. Mais pour tous ceux comme moi qui l’ont connu de son vivant durant nos interviews, c’est un sentiment mêlé de tristesse et de bonheur, comme si l’on partageait désormais un paradis perdu fait de souvenirs… soudain retrouvés. Welcome back MAISON GAINSBOURG !

Serge GainsbourgJe me souviens de ce 2 mars de la disparition de Serge comme si c’était hier. À cette époque pas de chaines d’info en continue pour faire le buzz. Mais les mauvaises nouvelles se propagent vite, hélas. C’était un samedi et ce jour-là Phonogram, le label de Serge était fermé, et c’est en décrochant le téléphone de la maison que j’ai compris qu’il avait tiré sa révérence. À l’autre bout du fil j’ai reconnu la voix de mon confrère qui assurait les sujets musique du JT de TF1, Bernard Gély. Et bien entendu, ça n’était pas à moi qu’il voulait parler mais à ma femme, qui était alors l’attachée de presse télé de Gainsbourg. Je lui ai tendu le téléphone. J’étais tétanisé, comme si une douche glacée s’était versée sur moi. Gely voulait des images pour sa nécro, mais les bureaux n‘ouvraient pas avant lundi matin et elle n’avait bien entendu pas les clefs. Je présume qu’il s’est débrouillé autrement, peu importe. Le choc était tel. Quelques  72 heures auparavant ,j’avais reçu le maxi 45 tours de « Requiem pour un con » remixé version 1991 et Serge cassait sa pipe…, cela ressemblait à une mauvaise blague, mais hélas cela n’en était pas une. Plus jamais je n’entendrai résonner le rire de Gainsbourg, plus jamais il ne me traiterait affectueusement de « petit gars ». Et plus jamais je ne poserai mon stylo, mon Nagra ou ma caméra dans ce salon-musée sis au 5 bis rue de Verneuil pour échanger avec lui ( Voir sur Gonzomusic SERGE GAINSBOURG : Les 30 ans de « Love On The Beat » !  et aussi  QUAND GAINSBOURG DIRIGEAIT (L’) INDOCHINE ) Pourtant, après toutes ces années mes souvenirs sont intacts. Il suffit que je ferme les yeux pour me retrouver devant cette porte sombre où Fulbert son maitre d’hôtel venait nous accueillir et nous conduire dans ce salon emblématique dans son écrin noir.

Maison GainsbourgOn se posait généralement pour les interviews dans ce canapé à l’assise portée par des volatiles noirs, face à un immense poster de Bardot dénudée. Mille objets minutieusement disposés attiraient le regard. Les plus précieux comme le fameux manuscrit de « La Marseillaise » ou l’iconique statue de l’Homme à la tête de chou, les plus sentimentaux comme le British Telegram d’adieu envoyé par Jane, en passant par moult surprenants animaux en argent ou en ébène, posters, pochettes d’albums et disques d’or… du vivant de Serge cette pièce était déjà un musée. Je raconte souvent cette anecdote, mais pour poser mon magnéto Nagra de reportage sur sa table basse, je devais bien déplacer une statuette ou deux et Serge m’engueulait à chaque fois. Chaque chose était à sa place et il avait une place pour chaque chose, alors c’est vrai que la perspective de voir du public déambuler dans un tel lieu puisse causer quelques sueurs froides. Mais rassurez-vous, il n’en sera rien. Et l’on peut faire confiance à 100% à Charlotte, la fidèle gardienne du temple, qui y a de surcroit grandi, pour que cette MAISON GAINSBOURG soit respectueuse et vertueuse de l’esprit de l’Artiste. Car pour mieux le comprendre justement cette collection apportera un si précieux éclairage à tous ses aficionados. Quel merveilleux moyen que d’explorer ses chansons en s’imprégnant de ces lieux où il a vécu ? De surcroit, je sais que Serge aurait adoré cette idée d’un « musée Gainsbourg » lui qui avait tant besoin de rester dans la lumière. Je me souviens qu’au cours d’une de nos interviews, je lui avais raconté que Tower records sur Sunset boulevard, alors le plus grand magasin de disques du monde, vendait son « Intégrale » et je revois encore son visage se fendre d’un large sourire à cette nouvelle.

Maison Gainsbourg by Tony Frank

Maison Gainsbourg by Tony Frank

Il adorerait savoir que tous les billets pour visiter l’hôtel particuliers se sont arrachés en quelques heures, MAISON GAINSBOURG jouera à guichets fermés jusqu’en 2023. Le 20 septembre prochain les premiers visiteurs franchiront à nouveau les portes de cette MAISON GAINSBOURG par petits groupes de 18 personnes. Mais l’expérience Gainsbourg se poursuivra de l’autre côté de la rue, au 14 rue Verneuil  où Charlotte a imaginé une salle d’exposition musée, scindée entre expo permanente et  expo temporaire, avec de très nombreuses œuvres d’art, manuscrits et documents, dont certaines de mes interviews, un classieux  Gainsbarre piano-bar cosy, clin d’œil aux débuts de son père, pour y découvrir de nouveaux artistes et enfin une librairie-boutique qui proposera, entre autre, la discographie de Gainsbourg. « Pensée comme un concept store, la librairie-boutique de la MAISON GAINSBOURG développe différentes collections d’objets conçus et sélectionnés avec soin pour évoquer le riche univers de l’artiste : disques, photographies, objets iconiques, vêtements ou encore accessoires de mode côtoient un espace librairie. » souligne le site internet officiel de la MAISON GAINSBOURG et sachant avec quel amour Charlotte Gainsbourg a porté tout ce projet, on peut le croire. Je n’ai pas encore fait ce pèlerinage mais vous vous en doutez, je compte bien aller y faire un tour… même si c’est forcément avec sacré pincement au cœur.

Pour visiter …

https://www.maisongainsbourg.fr/

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