SO LONG LADY MARIANNE
Encore une bien sale news avec l’annonce de la disparition à 78 ans de Marianne Faithfull, l’une des égéries les plus précieuses du swinging London. J’avais eu le privilège de la filmer en 1995 pour son merveilleux retour en grâce avec son album « A Secret Life », réalisé en collaboration avec Angelo Badalamanti, le magicien des BO de David Lynch. De son « As Tears Go By » mythique à son ultime opus au nom prédestiné de « She Walks In Beauty », en passant par son incroyable « Broken English » au tournant des 80’s et ce précieux « A Secret Life », Lady Marianne ne finira jamais de résonner dans nos cœurs.
–Marianne Faithfull est décédée à l’âge de 78 ans, a annoncé son porte-parole, la bien sad news est tombée hier soir. Née à Hampstead en décembre 1946, a été notamment révélée par son tube « As Tears Go By », arrivé en tête des charts British en 1964, et pour ses rôles principaux dans des films tels que « The Girl On A Motorcycle » (1968). Celle que l’on considérait alors comme la muse des Stones a également inspiré des chansons telles que « Wild Horses » et « You Can’t Always Get What You Want » en étant la petite amie de Mick Jagger, dans les années 1960. Après une période d’addiction à l’héroïne dans les 70’s, elle a ressuscité une première fois sa carrière avec le sublime album « Broken English ». Marianne à l’instar des chats avait au moins neuf vies ( Voirs sur Gonzomusic ). Mick Jagger a compté parmi les premiers à lui rendre hommage en la décrivant comme « une amie merveilleuse, une chanteuse magnifique et une grande actrice », ajoutant qu’il était « très attristé ». Son alter-ego Keith Richards a fait part de sa « grande tristesse » après la mort de Faithfull, ajoutant qu’elle lui « manquera énormément ». Pour sa part, le guitariste des Stones, Ronnie Wood, a posté deux photos sur Instagram. L’une est une vieille photo de lui, Marianne et Keith Richards dans un studio d’enregistrement, avec la légende « Adieu chère Marianne », l’autre une photo plus récente des trois complices avec la mention « Marianne va beaucoup nous manquer. Qu’elle soit bénie xx ».
« Marianne s’est éteinte paisiblement à Londres aujourd’hui, en compagnie de sa famille aimante », a déclaré son porte-parole officiel. La chanteuse avait déjà souffert de multiples problèmes de santé, notamment de boulimie, de cancer du sein et d’emphysème causé par des décennies de tabagisme. En 2020, elle a contracté le Covid-19 et a été hospitalisée pendant 22 jours. Les médecins avaient déclaré qu’ils ne s’attendaient pas à ce qu’elle survive, mais elle a survécu et a sorti son 21ᵉ album, « She Walks in Beauty », un an plus tard. Ces dernières années, elle avait travaillé avec des auteurs-compositeurs comme PJ Harvey et Nick Cave, qui l’ont tous deux citée comme source d’inspiration. Marianne Faithfull a également collaboré avec David Bowie, Lou Reed, Jarvis Cocker, Damon Albarn, Emmylou Harris et Metallica, dont le batteur Lars Ulrich a remercié Faithfull pour son « incroyable et unique contribution à notre musique, et pour avoir toujours été prête à se joindre à nous pour l’interpréter ». a carrière d’actrice s’est déroulée en parallèle de sa carrière musicale. Sur scène, elle a joué aux côtés de Glenda Jackson dans Les trois sœurs de Tchekhov et a interprété Ophélie dans Hamlet, admettant plus tard que sa descente nocturne dans la folie avait été renforcée par des produits chimiques. Elle a également joué Dieu dans deux épisodes de la sitcom Absolutely Fabulous, et le diable dans la comédie musicale de William Burroughs et Tom Waits, The Black Rider. Mais c’est bien la musique qui fait le plus battre son cœur. Son avant-dernier album, « Negative Capability », sorti en 2018, est une méditation sur le vieillissement, la solitude et le chagrin, inspirée en partie par la mort de sa vieille amie et compagne des Rolling Stones, Anita Pallenberg, et en partie par les attaques terroristes contre le Bataclan, une boîte de nuit parisienne où elle se rendait régulièrement. Pour boucler la boucle, l’album comprend un réenregistrement brut et émouvant de son fameux « As Tears Go By » qui a fait pleurer tout le monde dans le studio, selon le producteur Rob Ellis. Marianne Faithfull a été nommée commandeur de l’Ordre des Arts et des Lettres par le gouvernement français. La chanteuse a été mariée et a divorcé trois fois : avec l’artiste John Dunbar en 1965, avec Ben Brierly du groupe punk The Vibrators en 1979, et avec l’acteur Giorgio Della Terza en 1988. Elle laisse un fils, Nicholas Dunbar.
En mai 1995, pour mon émission BUZZ TEE VEE sur Paris Première j’avais tendu mon micro à Lady Marianne dans la cathédrale de lumière de l’Institut du monde Arabe face à Notre Dame, elle venait alors de publier son merveilleux « A secret Place » enregistré avec Angelo Badalamenti le “maestro” attitré de Lynch.
« Qu’est ce qui a servi de déclencheur à ta collaboration avec Angelo Badalamenti ?
J’ai écrit la chanson du thème de “La Cité Des Enfants Perdus” avec Angelo Badalamenti qui a aussi composé toutes les musiques de mon CD “A Secret Life”.
Il a la réputation d’être un personnage secret et taiseux, comment était-il avec toi ?
Pour moi Angelo est un véritable “Pater Familias”, mais c’est surtout un compositeur extraordinaire, un musicien hors pair ; il est si brillant. C’est vraiment quelqu’un de charmant.
Comment qualifierais-tu ce nouveau CD ?
C’est drôle, car juste avant la sortie de “A Secret Life”, tous les journalistes que je rencontrais pour la promo me posaient les mêmes questions :
Mais comment est cet album ?
Est-il zarbe comme “Twin Peaks” ?
Non
Sonne-t-il comme Julie Cruise ?
Non
Sonne-t-il comme “Blue Velvet” ?
Non
Il faut l’écouter pour se faire une idée ; c’est très différent. Et sans vouloir paraître prétentieuse, je dirais que c’est une nouvelle forme de musique.
Parlons de tes textes, comment les as-tu écrits ?
Angelo m’a dit : “dès que tu rentres chez toi, je veux que tu écrives en huit lignes ta profession de foi : qui tu es, en quoi tu crois et tout ce que tu es. Mais tout doit tenir en huit lignes.”
Comme un devoir à la maison.
J’ai dit : “ oui monsieur le Professeur !” J’étais abasourdie ; c’était la mission la plus difficile de ma vie. Alors je suis rentrée à Dublin et je me suis mise des jours et des jours avec un bloc-notes et un stylo à plancher sur ce texte. Et j’ai séché. Comment me définir en huit lignes ? C’était si dur, alors, désespérée je me suis tournée vers Dante. En cas de doute, il faut toujours se tourner vers Dante.
Huit ans d’attente depuis ton précédent album « Strange Weather » c’est très long pour ton public ?
Je me suis fait ce serment à moi-même, que je ne jouerai plus jamais sans un nouveau scénario, sans avoir écrit de nouvelles chansons. Je ne pouvais plus. Mes vieilles chansons, je les aime d’amour…”Broken English”, “The Ballad Of Lucie Jordan”…et des tas d’autres, mais j’ai besoin de chansons fraîches, sinon je deviens folle. Je refuse absolument d’être réduite à un spectacle nostalgique même si je suis très fière de mon époque. C’était si fun durant les 60’s… tu sais. Pour rien au monde je n’aurais voulu manquer cela. »
So long sweet lady Marianne… fier de t’avoir rencontrée et tant aimée.