RIP BEVERLY WATKINS HEROÏNE INCONNUE DU BLUES

Beverly "Guitar" WatkinsElle avait attendu ses 60 printemps pour enregistrer son premier album solo même si elle avait excellé à la guitare toute sa vie dans l’obscurité des clubs, Beverly Watkins nous a quittés, terrassée par un infarctus. Héroïne méconnue du blues, cette native d’Atlanta aura enflammé la scène et les cœurs durant plus de 60 ans. RIP sweet Beverly !

 

Beverly "Guitar" WatkinsÀ l’instar de Sixto Rodriguez, qui retapait des maisons de Detroit pour nourrir sa famille lorsqu’il ne jouait pas, Beverly Watkins, une des rares femmes guitaristes de blues, faisait la femme de ménage lorsque la musique ne lui souriait pas suffisamment. Native d’Atlanta, celle qui n’avait pas enregistré son premier album solo avant ses 60 printemps est décédée d’une crise cardiaque le 1er octobre dans sa ville natale. Elle était âgée de 80 ans. Son fils et unique survivant direct, Stanley Watkins, a précisé que sa crise cardiaque avait été précédée d’un AVC. Beverly Watkins est née le 6 avril 1939. Sa mère est morte quand elle avait 3 mois, elle a donc été élevée par ses grands-parents maternels, Luke et Phyllis Terrell, métayers à Commerce, Ga, une localité à environ 70 miles au nord-est d’Atlanta. Elle grandit entourée par la musique : son grand-père jouait du banjo et de l’harmonica, et ses tantes étaient toutes chanteuses. L’une d’entre elles, Margaret, lui offre une petite guitare acoustique vers l’âge de 9 ans. »Parfois, mon grand-père allait chez un ami et ils se réunissaient et jouaient de l’harmonica et de la guitare « , a confié Mme Watkins à Living Blues. « J’étais avec mon grand-père, avec ma petite guitare, et je m’asseyais à côté de lui. »

Devenue une guitariste accomplie, elle a rejoint Billy West Stone et le Downbeat Combo, puis Piano Red , les Meter-Tones, un groupe devenu plus tard Dr. Feelgood and the Interns, qui a assuré les premières parties de James Brown, Aretha Franklin et Ray Charles. Mme Watkins, souvent surnommée Beverly « Guitar » Watkins -sans doute en clin d’œil à son illustre confrère et homonyme Johnny « Guitar » Watkins-, était souvent comparée à des femmes fortes telles que Sister Rosetta Tharpe, une chanteuse de gospel dont le brillant jeu de guitare électrique a influencé le rock’n’ roll, ou Memphis Minnie, chanteuse de blues, guitariste et parolière de chansons. Elle avait collaboré avec la star du R&B Piano Red, et des groupes comme Leroy Redding et les Houserockers et le Ink Spots du regretté Eddie Tigner ( Voir sur Gonzomusic https://gonzomusic.fr/ready-for-eddie.html ) décédé en avril dernier. Beverly Watkins était un vrai phénomène et dans un univers essentiellement masculin, elle parvenait par sa dextérité à bluffer ses collègues masculins. Comme tant de guitaristes de blues, elle donnait un prénom à ses guitares qu’elle baptisait Red Mama, Sugar Baby. Cette femme courageuse faisait la femme de ménage dans les maisons les bureaux et travaillait  même dans les car-washs lorsque les concerts ne rapportaient pas assez. Seule ou avec d’autres musiciens, elle jouait parfois accompagnée d’une boîte à rythmes. Elle pensait souvent que jouer du blues était un moyen de guérir les gens.Beverly "Guitar" Watkins

« Quand je monte sur scène, c’est comme si je m’électrifiait, vous savez », avait-elle déclaré au Post and Courier de Charleston, S.C. en 2009. « Je m’allume et je me retrouve dans la foule. » Elle disait que les gens venaient la voir après une représentation et lui disaient : « Tu sais, quand je suis arrivé à ton spectacle, je me sentais plus bas que terre, mais désormais je me sens si bien. » Beverly Watkins qualifiait sa musique de « lowdown », de blues piétinant. C’ était un sacré personnage et une véritable show-woman n’hésitant pas à se livrer à des acrobaties avec sa guitare électrique, qu’elle était capable de jouer sur son dos voire sur sa tête tout ne naviguant d’un bout à l’autre de la scène. Sauvage, lorsqu’elle chantait, elle pouvait pousser des cris ou carrément des grognements.Beverly "Guitar" Watkins

« Elle pratiquait ce show incroyable depuis la fin des années 1950, mais elle n’était pas une star parce qu’elle avait été derrière les autres durant presque toute sa carrière, jouant avec des groupes sans succès », a déclaré Brett J. Bonner, rédacteur du magazine Living Blues. « C’était pourtant une guitariste fabuleuse. » Des décennies plus tard, elle était encore largement méconnue. Mais au milieu des années 1990, alors qu’elle jouait à l’Underground Atlanta, on lui a présenté Tim Duffy, qui avec son épouse Denise, avait créé le Music Maker Relief Foundation pour aider les musiciens du Sud dans le besoin.

« Je suis allé la voir jouer », a raconté Tim Duffy « Elle était seule et tout simplement remarquable. » Avec son aide , elle a pu repartir en tournée avec d’autres musiciens affiliés à Music Maker Relief Foundation, dont Taj Mahal. MMRF a également permis à Beverly Watkins d’enregistrer enfin son tout premier album, « Back in Business » en 1999. Lorsque l’album a été nominé pour un Blues Award en 2001, la catégorie « meilleur début d’artiste ». Elle avait alors 62 ans. Dans une interview accordée au New Yorker en 2014, Taj Mahal la qualifiait de  » musicienne à toute épreuve qui peut s’affronter sur scène avec les meilleurs – homme, femme ou enfant prodige « .Dans la foulée, elle a ensuite publié deux autres albums, « The Feelings of Beverly’Guitar’ Watkins » (2005) et « The Spiritual Expression of Beverly « Guitar » Watkins » (2009). « Elle était comme une douce grand-mère du Sud, sans prétention, » a dit Tim Duffy « Mais sur scène, où elle cassait la baraque c’était une artiste née, qui savait faire crier et hurler le public. C’était juste une héroïne méconnue du blues. » RIP sweet Beverly !

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