LA SAGA RAMON PIPIN Épisode 4

Les Excellents Musicien émérite, héros du rock hexagonal depuis mon adolescence, des Au Bonheur des Dames aux Excellents, en passant par les délirants Odeurs, l’auteur-compositeur-arrangeur-producteur-déconneur parisien n’a jamais cessé de créer ses désopilants standards. Pour célébrer ses 50 ans d’exercice impeccable du rock, Ramon Pipin revisitera ses propres compositions à travers les âges, d’Au Bonheur des Dames à Odeurs en passant par ses fulgurants albums solo ce 25  mai au Café de la Danse. En attendant, voici l’Épisode 4 de la Saga : Des Excellents à Son Excellence Ramon Pipin…

Ramon PipinCet été 1974 je suis en première au lycée Voltaire et si peu de groupes hexagonaux trouvent grâce à nos jeunes yeux fans des Dolls, de Bowie mais aussi de Neil Young, Santana, les Stones ou encore Ten Years After ; pourtant un OVNI sonique baptisé Au Bonheur des Dames va carrément nous vriller le cerveau. Avec leurs tenues provocs à la manière des New York Dolls justement et leurs textes délirants, les ABDD, comme on les appelait entre nous, nous ont offert cette année du BAC Français un hit imparable en forme de bol d’oxygène : « Oh les filles ». Quelques années plus tard au crépuscule des 70’s, devenu journaliste-rock je succombe à nouveau à ce qui ressemble fort à un nouvel ABDD, les bien nommés Odeurs, portés par leur irrésistible et néanmoins iconoclaste reprise du « I Want to Hold Your Hand » des Beatles… version marche militaire nazie. C’est à ce moment que je réalise qu’un certain Ramon Pipin est le responsable qui tire les ficelles de ces deux formations. Et son humour juif puise autant au « Springtime For Hitler » de Mel Brooks qu’au « Rock Around the Bunker » de Gainsbourg. De son vrai nom qui n’est pas son vrai nom Alain Ranval, l’homme n’en est pas à une casquette près. Parallèlement, il monte un studio parisien réputé baptisé Ramsès et devient, entre autres, arrangeur/réalisateur des meilleurs albums de Renaud, excusez du peu. Il signe une armada de bandes originales de films et après ses deux groupes emblématiques entame une vaste carrière solo riche de six albums publiés de 85 à nos jours. Enfin, et c’est crucial, il faut aussi évoquer sa dernière formation les Excellents ( Voir sur Gonzomusic https://gonzomusic.fr/vraiment-excellents-les-excellents.html et aussi   https://gonzomusic.fr/21-4-21.html  ) dont la raison sociale assumée est « les chefs-d ’œuvres du rock massacrés par nos soins ».

Les Excellents Or pour ses 50 années de carrière, Ramon Pipin nous convie à une soirée aussi introspective que commémorative, un show à la fois historique et dantesque entre « The Last Waltz » et « Phantom of the Paradise » où il revisitera ses propres compositions à travers le temps d’Au Bonheur des Dames à Odeurs en passant par ses albums solos, la seule incartade étant une interprétation de « La porte du jardin » de Donovan. 
Plusieurs invités le rejoindront pour une trentaine de titres et une dizaine de twongs. Avec 13 musiciens dont Shitty , Sharon , Jean-Michel Kajdan (gtr) , Eric Mula (tp) , Manu Katché – et  Klaus Blasquiz pour 2 heures de musique, un show unique qui marquera à coup sûr les annales du rock Hexagonal, comme Parmentier aura  définitivement marqué l’histoire de la pomme de terre, à l’instar de Roux avec Combaluzier ou de Rolls avec Royce. Et pour toutes les générations à venir, vous serez fiers de proclamer bien haut : j’y étais. Rendez-vous le 25 mai au Café de la Danse.

Vous l’aurez compris, ce héros du rock français n’a que trop longtemps attendu de voir publiée sa Saga, une injustice que ce quatrième et dernier  épisode contribue ENFIN à réparer ; voici  donc l’Épisode 4 de la Saga : Des Excellents à Son Excellence Ramon Pipin…

 

Les-excellents« Quand on découvre l’album des Excellents, on est déjà juste hallucinés par le nombre de pistes… bon j’ai très vite compris que certaines étaient très courtes, notamment les multiples versions de « Billy Jean ». J’ai bien entendu immédiatement songé aux Rolling Bidochons…

Bien sûr. Je connais bien Thierry Wolf qui en fait sortait mes disques auparavant. Sauf que, musicalement les Bidochons c’était assez diffèrent parce qu’ils reprenaient les chansons originales en respectant les arrangements …

Je ne parlais pas musicalement mais plutôt dans l’esprit des textes…

Ah, au niveau des textes, j’adore ce qu’a fait Thierry. Il avait comme moi ce souci de l‘homophonie. Quand il chante « Les petites bites » pour « Let It Be » par exemple c’était super. Depuis il s’est reconverti et produit maintenant les Chœurs de l’Armée Rouge pour le monde entier. Sauf qu’avec la guerre, il va devoir se recycler dans les chants corses rapido.

En même temps Wolf… ça fait médecin de Staline !

Oui, il est de la même origine que nous !

Justement tous les médecins de Staline étaient juifs !

Est-ce que tout cela est de l’humour juif ? Moi en tout cas je m’en réclame, bien entendu.

C’est évident à travers toute ta carrière.

Oui, l’auto-dérision, la paranoïa, l’hypocondriaque… c’est assez intéressant de trouver des correspondances. Sur l’album des Excellents il y a 31 morceaux, mais sur scène on en fait 44. Tu ne peux pas savoir l’engouement du public pour les Excellents. C’est à chaque fois standing ovation !Les Excellents

Pas étonnant, ce ne sont que des chansons qu’ils connaissent… ou plutôt qu’ils reconnaissent. Sur l’album, on retrouve tout de même deux compositions de Prince ainsi que deux de Leonard Cohen dont le mythique « Hallelujah » métamorphosé en « Ah les nouilles » !

Quand je trouve une correspondance phonétique, j’adore. Ça peut m’inspirer grave.

Tu reprends « Walk On the Wild Side » qui devient « Marche du coté sauvage », connais tu l’adaptation de Joey and the Gefilte Fish « Walk On the Kosher Side » ?

Non.gefilte joe and the fish

Tu vas adorer. Va voir sur Youtube… le mec a un accent yiddish à couper au couteau, les chœurs font poï poï poï et il balance plein de gros mots en yiddish. Et le disque est en forme d’étoile de David. On comprend que le public adore les Excellents car à la fois c’est un spectacle d’humour, à la fois c’est un concert rock avec des trucs qui leur parlent, c’est joindre l’outil à l’agréable. 

Absolument, je crois qu’on peut dire ça ! Surtout je dois avouer que je m’amuse beaucoup. Même si c’est un boulot de titan. Et surtout l’accueil du public est tellement génial, c’est un bonheur. J’ai souvent fait des concerts pour mes albums, qui marchaient très bien mais cela n’a rien de comparable au public des Excellents. Entre les chansons je raconte beaucoup de conneries.

Improvisées ou au contraire très construites ?

Non, tout est écrit. 50 pages de textes à mon âge…

Ah oui, tout de même ! Tu arrives à tout retenir ou tu as des anti-sèches ?

Non je n’arrive pas à tout retenir. Mais je ne suis pas seul à chanter, il y a tous les autres musiciens. Même Manœuvre a adoré… c’est dire !Les Excellents

Moi mon Top 5 c’est « Walk On the Wild Side (« Marche du coté sauvage ) », «  Bonnes vibrations ( Good Vibrations) » , « Hallelujah (Ah les nouilles) »… même si c’est un peu un crime de lèse-majesté envers Cohen, « Sweet Dreams (Les doux rêves)  » très drôle aussi  et  « Staying Alive (Retire ton doigt) » irrésistible sur le thème de la pédophilie dans l’église… et en bonus « Message In a Bottle ( Massage dans un bordel) » qui est juste à pisser de rire. Et en prime « Live And Let Die (Je livre toutes les tailles) »…

Oui celle-ci c’est mon côté Sentier shmates…

C’est une de celles qui m’a le plus touché car je retrouvais mes grands-mères qui vendaient des robes, quelque part là-dedans ; bien vu aussi « Life On Mars » (L’iPhone marche »)

Celle-là, ça n’est pas moi qui l’ai trouvé, c’est mon pote Jérôme.

Ça révèle aussi beaucoup de choses sur tes goûts musicaux et sur tes influences.

Tu sais, si l’accueil du public est aussi chaleureux c’est qu’ils sentent bien qu’à travers ce côté dérision je suis vraiment un amoureux du rock and roll.

Un music-lover comme on dit ?

Je suis un music-lover, je le confesse

Depuis notre entretien, une foule d’évènements graves se sont produits sur le terrain géopolitique mondial, quelle en est ton analyse ?Les Excellents

Le vacillement des démocraties, la progression des populismes et des extrémismes, le retour de la guerre insensée en Europe, l’appauvrissement culturel, le repli sur soi, la pandémie, la cancel culture et le mouvement woke, l’autocensure et la mortification, l’omniprésence du rire médiatique forcé, la disparition du silence, la décrépitude, tout cela m’épouvante. J’essaie de traduire mes sentiments, mes émotions, au travers de mes chansons ou mes textes. Je ne rajoute pas « tout simplement », car ça ne l’est pas.

Un dernier mot… pour la route ?

Sur ma tombe, on pourra inscrire :  » Il a écrit 200 chansons. Y en a 2-3 qui sont pas mal » »

 

Épisode 1 : De l’enfance à Au Bonheur des Dames en passant par l’éphémère IO https://gonzomusic.fr/la-saga-ramon-pipin-episode-1.html

Épisode 2: De Odeurs à the solo carrière en passant par Ramsès !

https://gonzomusic.fr/la-saga-ramon-pipin-episode-2.html

Épisode 3 : De Ramon Pipin’s band à Ramon Pipin en solo 

https://gonzomusic.fr/la-saga-ramon-pipin-episode-3.html

 

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