EMINEM “Music To Be Murdered By”
On peut dire que pour le 11éme épisode de ses aventures Eminem a frappé fort : au-delà du clin d’œil à l’album homonyme du Maitre Alfred Hitchcock et sans mauvais jeu de mots, ce CD est juste une tuerie. 20 titres, une armada de guests…killers, un flot fatalement impétueux aux rimes coup de poings irrésistibles, “Music To be Murdered By” est LE meilleur Eminem depuis son historique « Encore » de 2004. Carrément.
Deux ans après son déstructuré « Kamikaze », le fameux rapper revient avec du lourd, du très lourd. Certes, on connaissait depuis toujours le penchant de l’ami Marshall Mathers pour les histoires morbides. On a tous en mémoire son « Stan » où, via un échange épistolaire avec un fan, Em’ découvre que ce dernier a zigouillé sa moitié, avec sa fille dans la bagnole. Certes, ce n’était alors qu’une image au moment où justement lui-même vivait un divorce agité avec Kim, la mère de sa fille, mais c’est tout le style du Slim Shady, une nonchalante dérision morbide qu’il applique avec soin dans ce sidérant “Music To Be Murdered By”…au titre et au concept emprunté à Alfred Hitchcock qui avait publié un LP portant ce même titre en 1958 ( « Alfred Hitchcock Presents- Music to Be Murdered By » by Jeff Alexander). L’ami Alfred, ou plutôt sa voix, apparait d’ailleurs ici vocalement à trois reprises, fidèle au concept tracé par l’artiste, en sympathique fantôme tutélaire. Cependant, Alfred n’est pas le seul revenant de cette histoire, puisque le défunt Juice WRLD ( Voir sur Gonzomusic https://gonzomusic.fr/juice-wrld-death-race-for-love.html , https://gonzomusic.fr/mort-tragique-de-juice-wrld-a-21-ans.html , https://gonzomusic.fr/juice-wrld-pris-de-convulsions-lors-dun-controle-de-police-a-fait-une-od-dopioides.html , et également https://gonzomusic.fr/juice-wrld-fait-le-meilleur-free-style-du-monde.html ) partage le micro avec Eminem pour LE titre le plus fracassant « Godzilla », où le natif de Detroit y rappe plus vite que son ombre : soit 10.65 syllabes à la seconde.
Mais plus que par son speed c’est qualitativement que ce titre sait aussi bien nous scotcher : pour sa première apparition post-mortem, les mots de Juice WRLD font de jolis bleus au cœur. L’autre constante de l’album, c’est qu’il est ponctué de coups de feu, comme en ouverture de « You Gon’Learn » avec un featuring de Royce Da 5’9’’ et de White Gold. Ou surtout dans le troublant et controversé « Darkness » qui évoque, vu par les yeux de l’assassin, la terrible tuerie de Las Vegas à l’arme automatique tirée d’une fenêtre d’hôtel par une ordure, dont je me refuse à écrire le nom, sur une foule qui assistait à un concert country ce funeste 1er octobre 2017. Fort heureusement, il y a aussi des moments d’insouciance comme ce nerveux « Those Kinda Nights » où Ed Sheeran lui donne la réplique ou le lumineux « Leaving Heaven » avec l’angélique Skylar Grey. Mais, à l’image de son alter ego le Slim Shady, le sombre lui sied si bien. La folie aussi, comme cet allumé « Yah Yah » aux côtés du vétéran Q Tip et du fougueux Royce Da 5’9’’ qui revient manifestement en deuxième semaine…avant de s’imposer à nouveau en featuring sur un « I Will » disons…plein de promesses, qui ne lient que ceux qui y croient. Et à ce propos, “Music To Be Murdered By” semble tenir toutes les siennes : number one Billboard et tout autour du globe, l’hémoglobine de la danse macabre d’Eminem coule un peu partout dans nos têtes.