Eddy Louis s’est fait la malle: son Hammond B3 et nous sommes orphelins !

 

 

Eddy LouissLa triste nouvelle est tombée hier : l’immense Eddy Louiss nous a quitté hier. Le légendaire claviers du Stan Getz Quartet puis de Nougaro, Gainsbourg, Birkin, Quincy Jones et autres icones ultimes est décédé hier à Poitiers au cours d’une banale opération de la cataracte.

 

Eddy LouissJe n’ai eu la chance de travailler avec Eddy Louis qu’une seule fois, hélas. Mais je m’en souviens comme si c’était hier. Alors que c’était il y après de vingt ans, en 96. Philippe Lerichomme, le réalisateur des albums de Serge et de Jane avait réussi à la convaincre d’enregistrer enfin un nouveau disque en reprenant des chansons de Serge qu’elle n’avait jamais chantées auparavant, arrangées par des artistes aussi divers que Les Négresses Vertes, Goran Bregovic, Boom Bass (Hubert Blanc-Francart, fils de Dominique, producteur du Solaar de « Nouveau Western » et moitié du binôme électro Cassius) et justement Eddy Louiss. Je revois encore les portes d’acier du défunt Studio Plus XXX, à un jet de pierre des Buttes-Chaumont. Philipe m’avait demandé de réaliser le documentaire du making of de l’album de cet album de Jane- je ferai aussi le suivant pour « A la légère »-, j’étais donc présent à la plupart des cessions. Et ce matin j’étais tombé sur cette crème d’homme, à la simplicité légendaire. Et le musicien m’avait tout autant bluffé. L’émotion à l’état brut jaillissait de son Hammond, d’ailleurs en trois prises la version jazzée de “Elaeudanla Teiteia (Lætitia)” était en boite et on pouvait voir Philippe Lerichomme et Dominique Blanc-Francard les visages fendus d’un immense sourire. Voici ce que j’écrivais à l’époque :

Deux jours plus tard, la planète Plus XXX vibre d’une autre pulsion avec le bluesman Eddy Louiss. Comme un gros nounours barbu, Eddie laisse courir ses doigts incroyablement agiles sur les touches de l’historique Hammond. Voilà bien des années, alors qu’il n’était qu’un tout jeune musicien, il avait déjà assuré pour Serge l’orgue magique de “Harley Davidson”. Près de trente ans plus tard, il s’attaque à “Elaeudanla Teiteia (Lætitia)”.

“J’ai bien écouté la chanson…hier à la maison”, explique Eddy avant d’enchaîner: “Mais je la sens seulement aujourd’hui. Moi je ne fonctionne qu’au feeling.”

Et il le prouve. En moins d’une demie heure, ready-Eddy trouve sa vitesse de croisière en plaquant avec grâce ses accords volubiles. Puis Jane le rejoint dans le studio et ensemble ils entonnent : ” Sur ma Remington portative/ j’ai écrit ton nom Lætitia/ Elaeudanla Teiteia…”  De l’autre coté de la vitre, Blanc-Francard laisse tourner ses magnétos.

“Si on se l’essayait?”, lance nonchalamment le musicien.

Et la voix acidulée de Jane surfe sur l’ivoire du clavier, se mêlant sensuellement aux vagues émotionnelles d’Eddy pour déclencher un indicible frisson. DBF lance son classique : “On réécoute?” de sa cabine.

La prise est excellente. Et, avec quelques modifs cosmétiques, elle sera conservée telle quelle sur l’album. Cela se passait ainsi avec Eddie Louiss, l’émotion et la spontanéité…avec un peu d’expérience, bien sur et énormément de talent. La nouvelle de sa mort est d’une indicible tristesse. Le musicien souffrait du diabète depuis déjà quelques années. Il avait déjà dû être amputé du pied gauche. Il s’est éteint hier au CHU de Poitiers à seulement 74 printemps. Son Hammond B3 et tous ceux qui vibrent pour la musique se sentent un peu orphelin ce soir. Au revoir Monsieur Eddy…

 

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