BILLY GIBBONS AND THE BFG’S : « Perfectamundo »
Pour son premier album solo, Billy Gibbons, le chanteur-guitariste de ZZ Top n’ a pas hésité à traverser le Rio Grande et bien au-delà pour métisser son légendaire blues-rock à la sauce piquante latin-music y rythmos de Cuba. Résultat des courses, le très réussi « Perfectamundo » nous offre le meilleur des deux mondes.
Quel contraste, entre cet album vivant et vibrant et la dernière prestation de ZZ Top au POPB . Autant, lorsqu’il était sur scène avec ses collègues Dusty Hill et Frank Bear, Billy comme les deux autres, avait l’air de se faire chier comme un rat mort. ZZ Top assurait, normal, mais de manière mécanique, sans aucune émotion. Rien à voir avec le groupe que j’aimais tant interviewer dans les années BEST. Il aura donc suffi d’un peu de ron et de tequila pour que notre Billy retrouve une forme…olympica ! Car c’est bien de fusion, de manière intense, dont il s’agit ici. Notre Billy, en fait, avait la chance d’avoir un papa musicien dont le leader de la formation était le meilleur pote du fameux Tito Puente. Ce dernier a alors recommandé le jeune Billy à Tito qui a pu ainsi étudier les arcanes de la « latin music » avec son « pape », le héros de cette communauté qui chaque semaine juché sur un camion parcourait les rues du « barrio » new yorkais avec ses compagnons pour offrir toute la fièvre de ses rythmes aux percussions imparables. Une sacrée école que Billy n’a jamais oubliée, même au sein de ZZ Top. Et un enseignement qu’il se décide enfin à mettre en pratique à presque 66 ans. Voilà pourquoi ce nouvel album est aussi crucial : dans la chaleur des congas, maracas, bongos et timbales, Billy nous offre cette imparable fusion où la latin music de Carlos Santana rencontre le tex-mex de Doug Sahm dans la moiteur des rythmes cubains.
Gringo loco
Enregistré entre Houston, LA, Austin et même l’Espagne, « Perfectamundo » tient absolument toutes les promesses de son titre et dés la première plage, une reprise du swamp blues « Got Love If You Want it » de Slim Harpo, interprétée en « espanglais », mélange subtil d’anglais et d’espagnol. « Yo tengo amor, baby » promet Billy-le-gringo-loco et cette promesse tenue est secouée comme une tequila sunrise. « You’re What’s Happenin’, Baby » sur d’imparables riffs de guitares laisse glisser son groove latin cool illimité. Mais c’est la suivante, « Sal y Pimiento », en fait la toute première chanson enregistrée du CD, qui rend un vibrant hommage aux beats popularisés par Tito Puente avec ses percus bien en avant. Pimiento y rime avec Tabasco dans la nonchalance pimentée d’un été torride. « Picking Up Chicks on Dowling Street » , un des titres les plus réussis de l’album, rend hommage à la rue la plus « chaude » de sa bonne ville de Houston, une rue surnommée « Black Las Vegas » tant les filles y étaient lascives et la tequila y coulait à flots dans ses tripots. Et comme Billy nous garde le meilleur pour la fin, il nous offre une autre reprise, le « Baby Please Don’t Go » de Lightin’ Hopkins, métamorphosé avec art en swamp-latin-blues suivie de l’excellentissime « Piedras Negras » (pierres noires) au puissant beat irrésistiblement Santanesque. Et tant pis si le texte est par trop simpliste, il est soutenu par un imparable groove épicé comme les « jalapenos », ces petits piments explosifs capables de vous faire avaler tout un abreuvoir pour éteindre le feu qu’ils déclenchent en vous. Enfin, une autre composition se distingue, celle qui offre son titre à cet album crucial : « Perfectamundo », néologisme inventé par notre Billy, qui sonne comme un choc frontal entre « I Love Rock and Roll » de Joan Jett et l’ivresse de la tequila. Ce « mondeparfait », vous n’avez pas fini d’en entendre parler tant il mérite très largement qu’on en fasse…tout un monde. Felicitaciones senor Gibbons ; longue vie aux BFG’s en croisement suggéré de Billy F Gibbons et de Booker T and the MG’s !