SANTANA « Africa Speaks »
C’est son VINGT CINQUIÈME album en CINQUANTE ANS d’une incroyable carrière et pourtant Carlos Santana, l’un de mes CINQ guitaristes favoris au monde continue inlassablement de nous surprendre, nous prenant par la main pour nous offrir le voyage extraordinaire d’une fusion inédite entre son fameux style latin et l’Afro Beat inventé par Fela. « Africa Speaks » est un sublime hommage, une déclaration d’amour à mother Africa….
Je n’ai pas vraiment le souvenir d’avoir jamais entendu une chanteuse assurer tous les lead vocals d’un album de Santana. Mais une fois n’est pas coutume et dans ce projet d’intense fusion latine-africaine, Carlos Santa a confié le rôle crucial des vocaux de ces 11 titres, la plupart en espagnol, à la chanteuse Buika. Cette dernière, bien que née à Palma de Majorque, est originaire, par ses parents, de Guinée Équatorienne. Et sa voix puissante fait souffler le vent sur ces braises musicales incandescentes, un incroyable feeling métissé comme un pont imaginaire jeté entre l’Afrique de l’Ouest et l’Amérique du Sud. En 1971, j’avais assisté au premier concert de ma vie : le triomphe de Santana à l’Olympia, peu après la sortie de « Santana III » en 71. Un moment magique comme une première fois. Quel bonheur de retrouver Carlos, plus de 40 années plus tard, toujours au sommet de son art avec ce projet « Africa Speaks » si ambitieux qui évoque inexorablement l’un des plus grands héros de l’Afrique, Fela Anikulapo Kuti, que j’ai eu le privilège de côtoyer au début des années 80. Pensée également à cet amoureux de la world music qu’est Carlos Santana, qui a tendu la main ces dernières années à mes vieux complices Touré Kunda (Voir dans Gonzomusic https://gonzomusic.fr/toure-kunda-lambi-golo.html ) et à mon pote Rachid Taha dont l’absence pèse si lourdement. Pour revenir à ce nouvel album, alors oui, indubitablement « Africa Speaks » et sa fulgurante syntaxe musicale ne peuvent laisser quiconque indifférent. Enregistré à la vitesse de l’éclair, en seulement dix petits jours et sous la houlette de l’immense Rick Rubin dans son antre perso, le Shangri-La Studios à Malibu, l’album se révèle aussi surprenant qu’intemporel. Tout commence par la chanson-titre, et quelques percus sous le cri de la guitare emblématique de Carlos et la voix de Buika qui lui répond dans une longue complainte : la machine est lancée. Il y a de l’«Oye Como Va » ou du « Django” dans “Batonga”, telle une boucle latine enfiévrée, une puissante et caliente parabole musicale, qui résumerait à elle seule tout le parcours du guitariste surdoué de San Francisco tombé amoureux des musiques du monde.
Percutante comme l’afro-beat qui l’inspire « Oye Es Mi Canto » s’abreuve équitablement aux deux sources mexicaine et nigérianes pour une pure ivresse sonique qui vibre sous l’hypnotique guitare de Carlos et les percussions. Quant à Buika, elle délivre une performance vocale entêtante comme un shaman…ou plutôt une shawoman 😉 sous peyotl. Dans la suivante, par contre, « Yo Me Lo Merezco » (je le mérite), plus afro que latine, elle vocalise avec une puissance de feu digne d’un Salif Keita, soutenant la note haut et fort comme un griot au féminin jusqu’au long solo final apothéose de guitare…effectivement méritée ! 9 minutes et 8 secondes, Carlos se lâche avec « Blue Skies », long blues de la savane teinté de jazz qui monte crescendo comme une furieuse tempête tropicale avant de redescendre délicatement et nul ne s’en plaindra. Esprit libre Don Carlos ne s’est-il pas toujours affranchi des formats que le musicbiz a toujours vainement tenté d’imposer ? Back to Lagos et le mood entêtant de son high-life avec « Paraisos Quemados » (Paradis brûlés) porté par la voix incroyable de Buika. Cuivres et accordéon pulsent dans « Breaking Down the Door » aux puissantes vibes positives. Les chœurs funky et féminins répondent à la chanteuse, sur un rythme furieusement festif qui me rappelle les nuits de Mindelo au Cap-Vert lorsque Cesaria a commencé à émerger. Sans doute une des compositions les plus originales de ce projet pimenté que l’on avait découvert sur le mini-album « In Search of Mona Lisa » l’hiver dernier ( Voir sur Gonzomusic https://gonzomusic.fr/carlos-santana-in-search-of-mona-lisa.html ). Décidément « Africa Speaks » a choisi de nous faire voyager, cette fois cap sur l’Afrique de l’Est, entre Soudan et basse Égypte avec « Los Invisibles » qui évoque le nubien Ali Hassan Cuban et ses percussions. Forcément hantée, « Lucha Hechicera » (Combat de sorcière) prouve le parfait équilibre entre l’expertise latine de Santana et la voix de légende africaine de sa chanteuse pour un effet envoutant garanti. Plus cool et délicate, sans pour autant sacrifier son pouvoir énergétique, joli brin de hit en puissance, « Bambele » évoque le Santana intemporel de « Dance Sister Dance » mais cette fois pimentée par ces épices africaines qui font tout le sel de cet album. Enfin, cette fiesta donnée aux pieds du baobab s’achève sur « Candombe Cumbele » subjuguante comme une cérémonie vaudou. Mission accomplie pour ce 25éme épisode des aventures de Super-Carlos !
Excellente chronique…je l’écoute en ce moment. Une vraie résurrection pour Santana parés des années d’errance musicale…
J’adore c’est chanson qui me fait rêver. Je suis très heureux de voir que tu es un homme très très très courageux et que tu es très très très connu pour moi et aussi que je te souhaite une bonne année et pleine de bonheur et de joie.