EXPO ELECTRO DE KRAFTWERK A DAFT PUNK
Cynthia Pagès a 18 ans, elle est élève de terminale et elle est allée visiter Électro « De Kraftwerk à Daft Punk », boosté par une bande son originale signée Laurent Garnier. Séduite, elle fait partager à Gonzomusic son coup de cœur pour ce périple aussi sonique que chronologique qui nous fait (re)vivre une réelle et belle expérience immersive.
Par Cynthia PAGÈS
L’exposition Électro « De Kraftwerk à Daft Punk » à la Philharmonie de Paris (du 9 avril au 11 août 2019) dresse une étude complète et complexe sur la musique électroacoustique, tout en rendant une explication fluide et accessible pour un public pas forcément initié, sachant que la musique électroacoustique est particulièrement difficile à appréhender en raison de toutes ses technicités. Or la force de cette expo c’est qu’elle est à la fois intelligente et abordable. Dans le cadre futuriste de la Philharmonie, Électro se dévore sur un mode chronologique.
Dans sa première partie, on plonge dans la genèse de cette musique électroacoustique. On nous explique d’abord que son émergence est essentiellement technologique, au gré de nouvelles inventions : des machines électroniques détournées de leurs usages premiers pour en faire des instruments de musique, à l’instar du fameux Thérémine apparu en 1920. Cette période correspond à la fin du XIX et au début du XXe (les premières machines électroniques et l’utilisation de l’électricité).
Mais la musique électroacoustique s’est surtout démocratisée dans les années 1950/1960 grâce à Pierre Schaeffer et les premiers studios de recherche (bien que John Cage ait déjà composée la première musique électroacoustique en 1939 : Imaginary Landscape 1). C’est ainsi que la musique concrète émerge, suivie de la musique électronique, puis de la musique électroacoustique dans les années 60/70 en Allemagne, aux États-Unis, en France et au Royaume-Uni avec le fameux et répétitif « Rainbow In Curved Air » de Terry Riley. Sans oublier Walter Carlos, popularisé par sa bande originale pour le film « Orange Mécanique » de Stanley Kubrick. Mais c’est en Allemagne, en 1970 avec Kraftwerk que les synthés vont vraiment prendre le pouvoir et les faire rentrer dans la lumière : après trois LP underground l’incroyable « Autobahn » en 74 répand ses hypnotiques séquences sur la jeunesse, confirmant l’essai avec « Radioactivity » puis « Trans Europ Express ».
Puis, dans les 70’s, aux États-Unis, émerge la disco, qui s’empare de cette musique créée par les premiers synthés pour en faire un beat irrésistible à danser, avec notamment Giorgio Moroder et ses prods des hits de Donna Summer ou de Blondie. Puis, au crépuscule des 80’s, la disco mutante devient une musique électro, festive, diffusée dans les boites de nuits (les premières sont à Détroit) et étroitement reliées aux communautés homosexuelles : la house music. Après la chute du mur de Berlin en 1989, l’Allemagne, en tout cas sa jeunesse, s’est réunie autour de la musique électro qui a ce pouvoir rare de fédérer le public. C’est aussi une musique rebelle, souvent vectrice de revendications politiques ou humaines pour les droits LGBT par exemple.
L’électro a aussi révolutionné l’aspect traditionnel des concerts auparavant constitué d’orchestres d’instruments, de voix…. Avec cette nouvelle musique, l’aspect scénique était réduit au maximum, avec simplement une mixette et deux platines, et, désormais grâce aux progrès technologiques, un simple ordinateur. Les DJ ont pris le pouvoir, à l’instar de Jean Michel Jarre, mais il a fallu réinventer un spectacle/show attractif qui puisse satisfaire l’absence de mise en scène, d’où ses shows spectaculaires aux quatre coins du monde. Cette compensation se faisant par l’immersion : les lumières, la musique électro est diffusée par des haut-parleurs, agencés partout dans la pièce (pour créer des effets d’écho), avec projection d’images… Le studio Philipps en Belgique en est l’exemple typique. Les concerts électro (ou festivals et boites de nuit) sont l’occasion de se plonger dans une atmosphère immersive et transcendante (c’est pourquoi souvent beaucoup de drogues circulent dans ces événements : il s’agit d’intensifier la transcendance ressentie). Elle devient aussi une sorte de « religion », faite de symboles (le smiley qui sourit) ou de lieux presque sacrés (la boite « Berghain » à Berlin qui est très prisée). Il nous est également expliqué que l’électro s’est mondialisée dans les années 2000, avec le succès international du fameux « One More Time » des Daft Punk et des français novateurs qui ont suivi.
Ainsi, durant cette expo, différentes salles nous font partager un concept immersif que l’on retrouve les clubs. On découvre également dans des vitrines de nombreux instruments/machines qui produisent de la musique électroacoustique (des machines qui ont été réellement utilisées par des compositeurs), agencés de façon à reconstituer un studio d’enregistrement. (On peut le découvrir au début du parcours de l’expo, proche de l’entrée). L’expo électro nous fait également partager différents sons et beats électro tout au long de l’expo en entêtant fond sonore, mais aussi en branchant notre casque (car un casque nous est délivré) aux écrans diffuseurs de sons. En conclusion, cette expo « De Karftwerk à Daft Punk » est un puissant périple sonique, un trip à travers le temps qui nous fait partager une réelle et belle expérience.
Expo Électro « De Kraftwerk à Daft Punk » à la Philharmonie de Paris (du 9 avril au 11 août 2019)