STASH NOTRE PRINCE DU ROCK
Voici 30 ans dans BEST, GBD rencontrait enfin le flamboyant prince Stanislaus Klossowski de Rola, alias Stash, figure légendaire du swinging London. Chanteur, acteur, musicien, réalisateur, auteur, aristocrate helvète, modèle aux tenues les plus exubérantes, amant fameux de Faithful, Pallenberg, Nico et de tant d’autres et surtout ami intime de tout le Gotha artistique des 60’s psychédéliques de l’art au rock en passant par le cinéma. Prince aux mille visages, cette année 88, c’est Stash le producer des brillants Dirty Strangers que j’interviewais, mais n’y avait-il pas tant de Stashs…en Stash ?
Dans le précédent numéro de BEST, j’avais craqué sur les Dirty Strangers (Voir sur Gonzomusic https://gonzomusic.fr/the-dirty-strangers-the-dirty-strangers.html ) la production de Stash, sur leur self-titled album incarnait une certaine idée de la perfection rock and roll, largement boosté par la présence de ses vieux potes de Keith Richards et de Ron Wood. Car les Stones et Stash ont une vieille complicité héritée de leurs aventures communes durant les 60’s. Flamboyant et extraordinairement attachant, Stanislaus Klossowski de Rola était un de ces personnages riches en couleurs, un pur produit de la rock culture des 60’s. Authentique prince polonais et fils du fameux peintre Balthus, « Stash » avait toujours baigné dans les arts. Et sa vie est un roman. Il n’a pas 22 ans lorsqu’il débarque à Paris pour rejoindre les Playboys, le groupe de Vince Taylor en tant que percu partageant la même affiche que …les Rolling Stones à l’Olympia. C’est ainsi qu’il se lie d’amitié avec Brian, Mick et Keith. Mais Stash va pourtant quitter Vince Taylor, incontrôlable à cause de ses addictions et monter sa propre formation. Impressionné Eddie Barclay va lui proposer un contrat, qu’il refuse, car ce dernier veut faire de son groupe une version pop hexagonale des Beatles. Stash s’envole pour LA où également il refuse un plan juteux : tenir le premier rôle de la série the Monkees…qui se voulait être une version made in USA des Fab Fours.
S’il quitte la Californie, l’aristo-rock parvient néanmoins à ses fins : signer un contrat sous son nom ( ou presque : Stach de Rola) et publier le bien nommé « PEACE » son premier single…au Danemark…pour lequel il parvient néanmoins à enrôler Mick Jagger, John Lennon et Paul McCartney…excusez du peu ! Si le disque se révèle être un flop, il scelle néanmoins une solide amitié à la fois avec les Stones ET les Beatles, participant même à certaines sessions avec eux comme « Baby, You’re A Rich Man » et « All You Need Is Love ». Stash s’impose bientôt comme pilier de ce swinging London qui le fascinait où sa personnalité particulièrement lumineuse lui ouvre toutes les portes. Il se lie l’amitié avec Eric Burdon, Jimi Hendrix, les Who. Toujours vêtu de manière incroyable, c’est un dandy hippie qui hante toutes les soirées. Il devient très proche des Stones, les accompagnant au Maroc ou ailleurs. Le 10 mai 67, Stash se fait arrêter avec Brian Jones pour possession de marijuana. À cette époque, le rocker helvète avait un autre ami tout aussi givré que Brian : le « lunatic » Syd Barrett, qu’il accompagnait dans ses « trips » – dans TOUS les sens du terme- jusqu’au pays de Galles. Charmeur invétéré, il séduit les plus belles femmes de cette époque où la libération sexuelle a enfin explosé. Stash ne raconte-t-il pas que lorsqu’il accompagnait les Stones en tournée il se retrouvait forcé d’enjamber au petit matin en rentrant avec eux à l’hôtel après une nuit de défonce intense, les grappes de groupies assoupies devant les portes de leurs chambres. Plus tard il sera aussi réalisateur de films et écrivain, mais cette année 88 lorsqu’il découvre les Dirty Strangers, son sang bleu ne fait qu’un tour. Il décide alors de produire leur tout premier album qui portera le patronyme de ce groupe de Shepperds’ Bush qui s’est donné pour mission de perpétuer le feu sacré de Chuck Berry, Eddie Cochran et Gene Vincent. Et cerise sur le gâteau, Stash n’a aucun mal à convaincre ses buddies Keith Richards et Ron Wood de venir jouer les spadassins de luxe sur l’album. Le résultat est à la hauteur, les Dirty Strangers marquent de leur empreinte un chapitre de l’histoire du rock qui mérite largement d’être revisité, à l’instar de la légende de l’ami Stash…qui a survécu à mes calembours douteux sur les Rolling Stones tel que « Pierres qui roulent n’amassent pas mousse…Stash 😉 «
Publié dans le numéro 237 de BEST sous le titre
STASH BACK
Stanislaus Klossowski De Rola ne se contente pas d’être un authentique prince polonais, fils du peintre Balthus, élevé entre Rome, Paris, Londres et Genève. Sur scène avec Vince Taylor ou dans la vie avec les Stones, les Beatles, Hendrix, Dylan, les Doors, Stash a sù des les 60’s partager les plus hautes vibrations et les délires d’un rock and roll désormais mythique. En produisant aujourd’hui le premier album des Dirty Strangers, avec Ron Wood et Keith Richard en guest, Stash réactive le feu sacré de la légende. Déchirement temporel, le regard lointain, Stash savoure un alcool au restaurant d’un palace parisien. Couverts en argent, maître d’hôtel et serveurs en livrées noires, lustres tissés de cristaux, ici rien n’a changé depuis le Paris doré du jeune prince :
« Saint-Germain était le bastion des poètes de la beat génération avec Ginsberg et Kerouac, les bars de la Montagne Sainte-Geneviève vibraient des accords de jazz de tous ces génies black américains qui avaient su échapper à la ségrégation. Du point de vue de la création, Paris était une ville fascinante. À l’Olympia, Quincy Jones et les Platters se partageaient l’affiche. J’étais très lié avec tous ces gens et Tony Williams, des Platters, me donnait des cours de chant en m’expliquant qu’il ne fallait en aucun cas laisser une nana vous faire jouir avant de monter en scène, car cela cassait les voix hautes. Or à l’époque il chantait « Only You » avec ce timbre qui crevait toutes les hauteurs superlatives. »
Happenings acides avec Arrabal, Jodorowsky ou Topor, Stash voit Paris a travers les couleurs omni-changeantes des « lava lamps » ces spots à huile psyché. 1965 : percu de Vince Taylor, le Polonais allumé se retrouve donc en vedette américaine des Stones à l’O|ympia. Stash se lie d’amitié avec Brian Jones en partageant sa passion pour les filles comme Anita Pallenberg ou Zouzou la twisteuse :
« Ce soir-là, nous sommes rentrés tous les quatre à l’hôtel des Stones, bd des Capucines », se souvient Stash, « Cinq heures du matin, nous étions tous complètement pafs. Sur le bitume, devant l’entrée dormaient quelques petites anglaises qui attendaient Brian leur instamatic en main. Dans la blancheur du flash, c’était pathétique. »
Trois semaines plus tard, Anita devient l’égérie de Brian et des Stones. Keith perd sa petite amie et convoite Anita, Stash le confident se retrouve au centre des idylles.
« J’étais passionnément amoureux de Marianne Faithful. Elle était d’une hallucinante beauté. Je lui ai très longtemps écrit des poèmes enflammés. »
Ups and downs, Stash partage l’arrestation pour usage de stupéfiants de Brian. On le retrouve aussi dans les fauteuils de la Phantom V de Lennon :
« John Lennon avait choisi un tandem de peintres hollandais pour repeindre sa Rolls. Décorée comme une roulotte de bohémiens, elle était totalement psychédélique. Quel plaisir nous avions, dans cette voiture symbole de l’establishment, à faire la nique à tous ces soi-disants « adultes ». On n’avait aucune contrainte à l’époque, moi je prenais l’avion vêtu d’une robe de mariée syrienne brodée d’or et une couronne dans les cheveux. Et, tandis que je les toisais d’une canne à pommeau d’or, les gens n’osaient rien dire. »
Château imaginaire, Stash porte en lui sa Galerie des Glaces aux portraits éternels des Dorian Gray du rock :
« Dans ce film avec Burton et Taylor, « Boom », Noel Coward était Mister Death Angel. Il avait gagné son surnom en s’enrichissent au chevet de vieilles dames mourantes. ll a cette réplique flamboyante : « je suis un homme qui a perdu beaucoup d’amis », je peux hélas la reprendre à mon compte; j’ai aimé beaucoup de gens qui sont morts tragiquement. »
Heureusement, pour tout exorciser, il y a les Dirty Strangers, un combo r n’b speed comme l’enfer, que Stash a produit en cassant sa tirelire.
« L’album des Strangers n’a pas coûté 1 million de dollars comme celui de Robbie Robertson, par exemple. J’ai su résister au snobisme de l’entourage du groupe qui voulait tel ou tel producteur. Avec les Stones j’ai appris que la pièce, le studio avait une importance extrême. Lorsqu’on s’y sent bien, on obtient une qualité intangible qu’on ne retrouvera sans doute pas dans les plus grands studios. »
Right place, right time aussi quand même !
Publié dans le numéro 237 de BEST daté d’avril 1988
Un complément utile après la diffusion de la bio de Brian Jones sur Arte
Merci
MERCI Thierry
Tout à fait.
Très instructif, Merci
MERCI ❤️