SNOWFALL
Après REBEL (voir sur Gonzomusic https://gonzomusic.fr/rebel.html ) John Singleton, le brillant réalisateur de « Boyz N the Hood », poursuit son aventureuse exploration de la communauté noire américaine, s’attaquant, cette fois, aux ravages de la coke et de son dérivé le plus mortel : le crack, durant les 80’s. Pour l’illustrer, trois personnages principaux se télescopent : un petit dealer black de neige, un catcheur mexicain qui trempe dans des mauvais coups, un agent de la CIA sans scrupules prêt à empoisonner le jeunesse pour financer les « contras », ces anti-révolutionnaires fachos sud-américains, et la fille d’un parrain du crime mexicain.
Dans une banlieue black de LA où l’on aperçoit les rangées de palmiers dans le ciel blanc pollué, les avions de ligne volent si bas que l’on pourrait les toucher. D’ailleurs, filmées par un drone, de superbes images ne tardent guère à nous entrainer au-dessus de la ville. Un panneau « South Central Los Angeles, 14 juin 1983 » s’affiche à l’écran. Si vous vous attendiez à voir des skieurs skier et des alpinistes grimper, vous risquez d’être déçus. Car vous l’aurez compris, la seule neige que l’on croisera au fil de cette série n’est pas du tout celle qui décore les sapins, mais cette poudre sniffée sur la ligne blanche…et son diabolique alter ego, le crack. À la manière de Robert Altman dans son « Short Cuts » John Singleton nous tisse sa toile où se percutent ses différents personnages. Comme Franklin Saint (Damson Idris) un ado de 19 ans qui deale la beu que lui procure son oncle. Ou le catcheur mexicain Gustavo « El Oso » Zapata (Sergio Peris-Mancheta) qui bosse à côté comme homme de main pour un cartel de malfrats. Ou encore l’agent de la CIA Teddy McDonald ( Carter Hudson) volontaire pour poursuivre la mission de son ex-chef de service Logan Miller. Ce dernier est mort connement par overdose d’une coke trop pure dans une villa de rêve de LA, au milieu d’une scène de débauche parmi des montagnes de neige. McDonald va non seulement « faire le ménage » plaquant corps et indices, mais il va surtout poursuivre la mission : importer et dealer de la drogue pour financer la guerre menée par Reagan pour aider les contras à mener leur contre-révolution. Mais bien entendu, la CIA n’est pas censée opérer sur le sol US. SNOWFALL est décidément un joli puzzle télévisuel.
La musique est d’enfer jusqu’au générique
Retour à notre petit dealer à South Central. Il a un pote comme Radio Raheem, le ghetto-blaster man de « Do the Right Thing »…mais lui c’est à fond dans le bus pour choquer le petit blanc ( à LA en 83 faut vraiment être fauché pour prendre le bus ) Franklin Saint livre son matos dans la San Fernando Valley à un de ses potes qui bosse dans l’industrie florissante du film porno…et qui consomme à donf la neige blanche. Bientôt Franklin va rencontrer un gros dealer israélien et se retrouver avec un kilo à fourguer…du matos de grand pour une gueule d’ange. Tout au long du film, la musique est d’enfer jusqu’au générique de ce premier épisode avec une Nina Simone torride qui vocalise « Don’t Let Me Be Misunderstood » . John Singleton documente avec talent l’histoire récente et terrible de la société noire américaine, assommée par les drogues depuis l’héro du Vietnam au crack, en passant par cette coke omniprésente. Bien sûr, on se souvient tous que la CIA pour financer ses guerres secrétes en Amérique du Sud, au Salvador, au Nicaragua avec ses contras usait de l’argent sale de la drogue pour imposer la droite extrême là où la gauche était au pouvoir. Dix fois plus réaliste que THE GET DOWN, la série de Baz Luhrmann qui fantasme la genèse du hip hop en « West Side Story » (voir sur Gonzomusic https://gonzomusic.fr/the-get-down.html), SNOWFALL diffusée sur FX ne compte pour l’instant que six épisodes diffusés. Le 10éme et dernier est programmé pour le 6 septembre prochain.