REBEL
Produite par la chaine black BET, la série REBEL, où le fameux rapper Method Man apparait sous son véritable blaze de Cliff Smith, mêle polar bien ficelé et contexte sociopolitique affuté par les inégalités raciales aux USA. Et, avec le légendaire John Singleton à la manœuvre, au moins on est sur que tous les Boyz N the Hood ne manqueront pas d’une once de street credibility.
Elle se rend dans un club et en bad girl version cops et arrête violemment, en usant de sa matraque télescopique et en menaçant de brandir son « autre arme » de service, un gusse accusé d’avoir violé et torturé une femme devant ses potes qui mataient. « Tu es pire qu’une bête » lui lance-t-elle. Avant d’ajouter « je vais t’enfermer dans une cage, là où l’on met les types dans ton genre ! ». Elle roule des mécaniques, mais aussi en Jeep Cherokee. Elle rentre chez ses parents, où son daddy passe un savon au petit frère. Daddy picole, il évoque ses racines de la Louisiane… « là d’où ils viennent, on est des gens au sang mélangé un peu de créole, un peu de français, un peu d’indien…. ». Il se déchire au cheap Cognac. Son petit frère fait du rap ; il lui fait écouter ses sons. Et ils sont cool…il assure. En fait, il veut planter ses études et la bourse que sa sœur est parvenue à lui obtenir. Ils évoquent leur mère disparue. Il allume un énorme spliff devant sa sœur…flic. Quelques heures plus tard, le petit frangin Malik se prend douze bastos tirées par les propres collègues de sa sister sous les yeux de ladite sister. Super lumière, super photographie mais choc émotionnel. Alors notre héroïne cauchemarde, se repasse ne boucle le best of de ses séquences les plus terribles : la mort de sa mère dans un accident de voiture, la guerre en Irak et l’hélico qui se transforme en boule de feu sous ses yeux et désormais la mort de son frère. Elle pète les plombs, c’est ce que vous feriez à sa place, non ? Method Man alias TJ-le-beau-gosse, l’ex-fiancé de cette vibrante Rebecca « Rebel » Knight (Danielle Moné Truitt) tente de lui remonter le moral. Mais notre Rebel est une insurgée. Auditionnée sur les événements qui ont conduit à la mort de son frère, elle attaque la police. Car à ses yeux, elle viole son propre code qui stipule en axiome gravé dans le marbre qu’un détenteur de la force publique ne peut pas tirer sur un civil désarmé. Un badge de policier n’est pas un permis pour tuer. On songe alors à la trop longue litanie de tous les blacks, principalement mâles, tués par la Police au fil des ans. C’est une référence directe au mouvement Black Life Matters qui a enflammé à chaque fois les rues américaines. Cette série es une mise en abime, par Singleton, de l’intense dichotomie qui existe, selon la couleur de sa peau, entre noirs et blancs, dés qu’il s’agit de justice.
Une justice de classe à deux vitesses
Jay-Z s’est tout récemment insurgé dans une vibrante tribune parue dans Time magazine, contre le système inique des « bail bonds », des sommes versées en caution et des prêteurs qui exploitent les prévenus, souvent noirs qui se retrouvent incapables de payer ou de rembourser. Ces derniers, coupables ou innocents, sont du coup piégés par une machine gravement coercitive : prisonniers économiques, avant d’être justifiable. Encore la preuve qu’il existe bien une justice de classe à deux vitesses aux USA. Singleton demeure inexorablement le réalisateur de « Poetic Justice », où Janet Jackson tombait amoureuse du bad boy aux yeux de braise, le troublant et si regretté 2pac Shakur…sauf qu’en l’occurrence, ici la justice n’a plus rien de poétique . Avec REBEL, elle devient brute et directe, sans aucun filtre ou presque preuve cette baston entre Knight et un collègue blanc, qui lui balance « kiss my pale ass »…littéralement embrasse mon cul pâle. Rebelle donc, jusqu’au bout de ses ongles manucurés. Si l’on pouvait en douter, la notion de race est le fil rouge de cette série qui ose appuyer là où cela fait vraiment mal dans la société américaine…comme bien d’autres ailleurs d’ailleurs. Cette REBEL, nouvelle Foxy Brown, va remonter le fil des évènements qui ont conduit à la mort tragique de son frère, bastonner un maximum de mauvais garçons et mériter forcément son pseudo. Après ce premier double épisode inaugural, 8 épisodes complètent cette série socio-policière sacrément bien menée avec une héroïne qui n’a pas froid aux yeux.