ROXY MUSIC « Avalon »
Voici 42 ans dans BEST, GBD analysait avec précision le brillant successeur de « Flesh And Blood », l’irrésistible « Avalon », ignorant bien entendu que ce 8éme épisode de ses aventures incarnerait le chant du cygne de Roxy Music, le groupe de Londres de Bryan Ferry, découvert sur la scène du Bataclan à l’aube des 70’s dans l’explosion du mythique et fantasque glam-rock. Flashback…
Moins de trois mois après cette chronique de l’« Avalon » de Roxy Music dans BEST, je rencontrai Bryan Ferry dans l’écrin guindé du Ritz ( Voir sur Gonzomusic BRYAN FERRY de « Avalon » à « Avonmore » ), mais c’est sans doute grâce à cette chronique aussi positive qu’élogieuse que le label Polydor m’avait offert le meilleur créneau pour longuement deviser avec le brillant Bryan. Il est vrai qu’« Avalon » était un album superbe qui méritait d’être défendu.
Publié dans le numéro 168 de BEST :
Rangez donc cet œil lubrique, cette fois pas de jolie poupée offerte comme sur la page centrale de Playboy. Quand on parle de Roxy Music, on sort l’arsenal des pin-ups. Inutile de chercher plus loin, si « Avalon » a été descendu par les confrères (faux frères ?) au bazooka, c’est par frustration. Pourtant, s’ils s’étaient donnés un peu de mal, ils auraient vite découvert la super chérie, ce superbe brin de faucon femelle sur la pochette. Peu importe, allons droit au vinyle. Vous vous appelez Avalon. Bien, alors déshabillez-vous… Avalon est vraiment charmante. Appelez-ça un coup de foudre si vous le voulez. Tout a vraiment commencé dans les sièges de l’auto, lorsque la tête du lecteur s’est pressée contre la bande magnétique : « More Than This » a éclaté sur les 4 HP. La guitare de Manzanera et le timbre charmeur de Ferry, servis sur canapé, un son très sophistiqué -qui vous entraîne comme les ailes tendues d’un delta-plane. La voix de Ferry couvre mes virées en bagnole. Elle finit par m’accrocher. Je m’auto-matraque Roxy grâce à l’auto-reverse.
Dans le fond, depuis « Flesh and Blood », le cheminement de Ferry/Mc Kay/Manzanera est assez logique ; on retrouve en plus abouti le souci d’harmonie vers lequel tend le groupe. Ferry ne se résume pas en un dandy, il est dandy jusqu’au bout et même au-delà. Il impose sa griffe dans ses créations comme MM. Rolls et Royce pour leurs autos. Le même sens du raffinement, d’une certaine élégance où il s’amuse même à dépasser son image de marque. Chic dans tous les sens du terme, Roxy se laisse doucement porter vers un funk-rock dans le style blanc qui fait tourner la tête. « The Main Thing » touche droit au but. Ferry est un charmeur irrécupérable, d’ailleurs, tous ses textes ont un côté invitation, « Take A Chance With Me », « To Turn You On », ou rupture, « More Than This », « The Space Between ». Je sais qu’il y a parmi vous des Saint-Just du rock qui exhibent la lame de leur guillotine. « La tête… donnez-nous la tête ! ». Les mecs, vous pouvez toujours essayer, cette fois, vous ne l’aurez pas. Je connais par cœur l’acte d’accusation : le ci-devant Ferry Bryan est accusé de trahir l’esprit du rock. Si le rock était une religion, ça se saurait ; aux States, les trust RCA, CBS et consorts seraient exonérés d’impôts comme Moon et les Témoins de Jéhovah. Ferry et ses partenaires font de la corde raide entre le génial, la variété et la soupe. Je m’en fous, j’adore ça.
Publié dans le numéro 168 de BEST daté de juillet 1982