MA PREMIÈRE RENCONTRE AVEC FATBOY SLIM VOICI 30 PIGES

Fatboy Slim

 

Dans le numéro 218 de BEST, à l’automne 1986, j’avais craqué sur le tout premier LP « London 0 Hull 4 » des Housemartins. Deux mois plus tard, GBD se voit récompensé en rencontrant enfin à Londres mes nouveaux héros du rock British que sont les quatre mousquetaires aussi pop que rebelles de Hull. Paul-dit P.D-Heaton le chanteur, Stan Cullimore le guitariste, Hugh Whitaker le batteur et Norman Cook le bassiste sont-ils nos nouveaux Fab Four, that’s the question posée dans le BEST 220 daté de novembre 1986.

 

the HousemartinsEn interviewant, pour la toute première fois, le bouillant et déjanté Norman Cook et ses copains, dans les locaux du petit label indé Go Discs, j’ignorais que cette rencontre ne constituerait que le tout premier épisode d’une longue aventure. Pourtant, en croisant ces quatre gamins à Londres, j’aurais du de douter de quelque chose. Comme on dit là-bas, Norman Cook stole the show, il a littéralement « volé le show », répondant de manière aussi incisive qu’insurgée aux questions du reporter de BEST. Lorsque les fringuants Housemartins se désintègre deux ans plus tard, après nous avoir livré les excellents « London 0 Hull 4 » en 86 (voir dans Gonzomusic https://gonzomusic.fr/the-housemartins-london-0-hull-4.htmlsuivi par « The People Who Grinned Themselves to Death » un an plus tard, le groupe de Hull fait littéralement sécession. Les deux frères ennemis montent chacun leur propre formation. Et tandis qu’Heaton continue d’entretenir la flamme pop et sarcastique des compositions des Housemartins, avec sa nouvelle formation the Beautiful South, l’ami Norman Cook fonde son Beats International à succès. .

Beats International

Hélas, plus artiste que juriste, dés leur le tout premier 45 tours « Dub Be Good to Me» Cook utilise au moins trois samples dont le ‘I’ll Be Good to You » de SOS Band, le « Guns of Brixton » des Clash et le célébrissime thème de « Il était une fois dans l’ouest » de Ennio Morricone…en oubliant de « clearer » les échantillons ainsi prélevés auprès des différents éditeurs intéressés. Norman se retrouve alors dans la position aussi insoutenable que paradoxale à devoir plus de royalties qu’il n‘en engrangeait. Échaudé, il va ensuite monter un groupe funk, Freak Power qui sort son premier CD en 94, porté par le cool post-hippie hit « Turn On, Tune In, Cop Out ». Cependant, l’ami Norman se sent de plus en plus attiré par la vague électro qui commence à émerger. Il crée alors son personnage de Pizzaman, et sort un album de cette house-music qui agite alors  l’Angleterre avant le reste du Monde. Deux ans plus tard, en 96, Norman Cook endosse un nouvel alias : ce sera Fatboy Slim. Et pour ne pas perdre ses habitudes, il décroche son premier hit sur le sample emblématique de « My Generation » des Who. En novembre 1986, dans BEST  j’ignorais bien entendu tout de la future radieuse carrière de Norman Cook, mais néanmoins je craquais déjà sur les radieuses harmonies militantes des Housemartins Flash-back aveuglant !

Fatboy Slim

Fatboy Slim

 

Publié dans le numéro 220 de BEST sous le titre:

 ALLEZ HULL !

 

 Un sang neuf, riche et turbulent, un sang qui fait tourner la tête du rock anglais, voici les Housemartins : la nouvelle sensation venue de Kingston-Upon-Hull, un port sur la mer du Nord. Avec leur semi-hit « Sheep » et le tube homologué « Happy Hour », sur le thème des dragues sexistes dans les pubs, le quatuor échappe aux schémas archétypes du pop biz. Paul-dit P.D.-Heaton le chanteur, Stan Cullimore le guitariste, Hugh Whitaker le batteur et Norman Cook le bassiste sont-ils nos nouveaux Fab Four, c’est la question qui me brûle les lèvres lorsque je rencontre les Housemartins à Londres dans les bureaux familiaux et militants de Go Discs, le label de Billy Bragg.

 Parlons un peu de Hull.

 Stan Cullimore: Hull c’est une petite ville qui vivait de sa pèche. Aujourd’hui, elle offre une image plutôt pathétique. La semaine dernière, on tournait sur les docks un reportage pour BBC TV au milieu des bateaux rouillés, abandonnés pour cause de crise. Hull c’est un peu cette image de cimetière naval, même si la ville se débat pour survivre. Contrairement à Birmingham ou Liverpool, on peut encore s’y dénicher un job à condition d’être sacrément motivé. Au moins à Hull, les gens ont su rester chauds et amicaux, contrairement a Londres.

 « London O/Hull 4 », c’est un titre-résultat de foot pour votre album ?THE HOUSEMARTINS : « London 0 Hull 4 »

Norman Cook : Eh oui, nous sommes de vrais « têtes a ballon » -en français dans la conversation-. Les Housemartins, c’est comme une équipe de foot.- Hugh c’est le goal, mois je suis défenseur, Stan le flamboyant assure défense et attaque tandis que Paul joue les buteurs.

 La politique aussi est indissociable de l’image du groupe ?

 N.C : C’est très mode en ce moment en Angleterre, mais je ne préfère encore un engagement superficiel à aucun engagement. Il y aura toujours des groupes pour ados, mais j’aime dix fois mieux « Two Tribes » ( de Frankie Goes to Hollywood) que « Ballroom Blitz » (de Sweet).

S.C : À quinze ans, les gars et les filles ont besoin de héros. Moi, mes influences politiques me sont venues grâce aux groupes punk. Sans notre penchant à gauche, les Housemartins perdraient toute raison d’exister.

The Housemartins 

On vous compare aux Beatles ou à Squeeze. Vous avouez vos influences ?

 S.C : Tu parles, nous avons pillé Al Green, the Persuasions. Pour notre titre « Freedom », nous sommes les premiers a reconnaître l’influence de Solomon Burke à qui nous avons emprunté ce riff très simple, mais si efficace. On nous a toujours comparés à des tas degroupes, mais nous n’essayons pas de ressembler aux Buzzcocks, Undertones, Squeeze ou aux Beatles. Nous sommes juste très anglais et on fait une musique simpliste.

 N.C : Si on sonne de temps a autres comme les Beatles, c’est une coïncidence: on vient du même coin et on a la même formation.

 Importante caractéristique des Housemartins : votre légendaire sens de l’humour…

 S.C : Notre humour, c’est plus de la dérision que des blagues graveleuses ; mais par contre nous faisons les grimaces les plus hideuses de toute la scène rock.

N.C : Et cette blague, vous la connaissez ? Ce type rencontre Frank Sinatra au restaurant. ll lui dit « Hé Frankie, je dine avec ma nana et elle serait très impressionnée si tu venais nous saluer dans le genre « Ce vieux Bob ça fait une paye ». » Alors Sinatra se pointe à la table de Bob et dit « Ce vieux Bob, ça fait une paye ». Et Bob de rétorquer.- « Hé Frank, tu ne vois pas que je suis déjà occupé. » On est allé faire un concert en Allemagne et ils ne pigeaient rien à notre humour. Dans la loge il y avait un frigidaire plein à déborder de bières. Je suis allé voir le promoteur pour lui dire .- « Hé, jamais il n’y en aura assez ; il nous fout un ou deux autres frigos de plus. Le plus sérieusement du monde, le mec a répliqué  « Vous auriez du m’en parler avant, à cette heure-ci ça va être difficile de vous trouver cela. » Tu vois, je n’ai pas la sensation que notre humour se traduise bien. (rire)

 Comment vous êtes-vous retrouvés ici sur Go Discs ?

 S.C : Moi je suis venu en taxi…

 N.C: Notre attitude face aux maisons de disques était ferme: okay pour la musique, mais pas question de se laisser saucissonner en produits. Il nous fallait trouver une boite qui colle à nos idées sans jamais chercher à faire de nous des pantins. On a rencontré Andy- Mac Donald, le PDG de Go Discs- et ses idées nous plaisaient.

 S.C : On rejette totalement l’opportunisme du showbiz, le hit pour le hit à tout prix. Et s’il faut le décrocher en s’accaparant une chanson, en la ruinant pour lui coller le son de la semaine comme on file une MST, juste pour le blé, nous préférons l’obscurité à ces projos pourris. Si on m’assurait du hit le plus massif en faisant un cover de « Mull ot Kintyre », la chanson de Paul McCartney, je répondrais « non merci les gars, ça n’est pas pour moi, ça n’est pas du tout la musique que j’ai envie de faire. Les Housemartins ne sont pas là pour l’appât du gain ».

The Housemartins

Les Housemartins sont de sacrés gaillards. Ils répondent aux lettres intelligentes de leurs fans et expédient aux autres de cauchemardesques grimaces dédicacées. Sur papier glacé. En tournée, ils fuient les hôtels et dorment sur le sofa ou la moquette de leurs aficionados rencontrés au hasard des fins de gigs, histoire de vivre un contact authentique et fort avec leur public. À Paris, ils risquent fort de débouler chez moi,  à la maison, mais n’est-ce pas la dure loi du rock and roll?

 

Publié dans le numéro 220 de BEST daté de novembre 1986

BEST 220 

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