SHEILA E AU TRIANON

Sheila E

Pix by Jean Christophe Mary

Douze ans après son dernier passage au New Morning, Sheila E la reine des percussions, a offert un concert incandescent au Trianon, entre funk, jazz et rythmes latins. Et c’était loin d’être l’heure de la récré ! En effet, entourée de sa formation E-Train et de son père le fameux Pete Escovedo 89 printemps au compteur, tout de même, la batteuse légendaire a livré un hommage vibrant aux musiques qui l’ont façonnée, comme le prouve ce live report percutant de JCM !

Sheila ELe 12 juillet 2025, Paris vibrait au rythme des toms et des cymbales. Sur la scène du Trianon, Sheila Escovedo, plus connue sous le sobriquet de Sheila E (Voir sur Gonzomusic SHEILA E : « Romance 1600 »  , DANS LE HAREM DE PRINCE  , PRINCE DE A (COMME APOLLONIA) À V (COMME VANITY) et aussi  SHEILA E : « Sheila E »  )  ) apparait telle qu’on l’espérait : solaire, fougueuse et généreuse. À 67 ans, la musicienne révélée au grand public par Prince, multi-instrumentiste au parcours jalonné de collaborations mythiques (Marvin Gaye, Diana Ross, George Duke) vient rappeler qu’elle est bien plus qu’une batteuse : une véritable force de la nature. Dès les premières mesures de « Baila », le ton est donné : un maelström de funk et de rythmes afro-cubains, porté par la frappe précise et incendiaire de Sheila E, qui alterne entre batterie et timbales avec une aisance sidérante. La salle retient son souffle sur chaque break percussif déclenchant des salves d’ovations. Puis la batteuse se lance dans un solo d’une redoutable complexité, alternant timbales et batterie avec une aisance déconcertante. Les polyrythmies, ces entrelacs de motifs binaires et ternaires, s’enchaînent alors avec une rigueur millimétrique, sans jamais sacrifier la pulsation qui emporte la salle. Sheila E. maîtrise l’art du contretemps et du décalage : son jeu syncopé, héritier de Tony Williams et Tito Puente, fait dialoguer la tradition jazz-funk américaine et les percussions latines héritées de son père, Pete Escovedo. Le concert est marqué par un moment d’émotion intense lorsque la musicienne accueille justement son papa, Pete Escovedo, figure tutélaire de la scène latine jazz, pour célébrer ses 90 ans. Debout derrière ses congas, le patriarche qui a joué avec Santana démontre qu’il n’a rien perdu de son swing ni de sa complicité musicale avec sa fille. Ensemble, ils tissent un dialogue rythmique hypnotique, uni par une même ferveur.

Sheila E et son papa

Sheila E et son papa

La setlist, éclectique et brillante révèle tout l’éventail des talents de Sheila E. et de son groupe The E-Train. La reprise de « If You Want Me to Stay » de Sly Stone, portée par la voix souple et soulful de Lynn Mabry (ancienne choriste des Talking Heads et de George Michael), a injecté une dose de sensualité et de groove irrésistible. Mabry, véritable alter ego vocal de Sheila pour cette tournée captive le public par sa présence magnétique. Clin d’œil malicieux à l’un des artistes avec lesquels elle a travaillé, Ringo Starr, Sheila entraîne la salle dans un chant collectif sur « Yellow Submarine ». Sa version jazzy, délicatement réarrangée transforme la ritournelle pop des Beatles en un moment d’intimité ludique porté par une rythmique feutrée et syncopée. Le final est un feu d’artifice. « A Love Bizarre » a fait lever tout le Trianon, qui reprends en chœur les refrains de ce classique coécrit avec Prince, tandis que Sheila martèle ses fûts et ses cymbales avec fougue. Puis vient « The Glamorous Life », hymne irrésistible où se sont entremêlés saxophone jazzy, percussions enflammées et un solo de batterie d’une précision chirurgicale. Là encore, Sheila démontre qu’elle est une des rares artistes capables d’allier virtuosité technique et sens aigu du spectacle. Tout au long du show, c’est sa générosité, son large sourire qui marquent les esprits. Générosité dans le jeu, où chaque roulement de caisse claire et chaque frappe de cloche semblent dialoguer avec le cœur du public. Générosité dans le partage, lorsqu’elle distribue son dernier album à un des spectateurs dans la foule. Et enfin, générosité dans l’hommage à ses racines, incarné par la présence de Pete Escovedo, symbole vivant de la transmission musicale. Douze ans après son dernier passage parisien, Sheila E. n’a rien perdu de sa superbe. Au contraire, elle semble jouer comme si chaque note pouvait changer le monde. Et ce samedi 12 juillet au Trianon, elle l’a fait vibrer, battre, danser.
 

 

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