STEPHAN EICHER « Homeless Songs »
C’est un album aussi sage que discret, un album aussi enchanteur que crève-cœur et c’est comme si toute la beauté de l’hiver nous faisait soudain signe. Je ne saurai dire pourquoi la musique de Stephan Eicher fait si souvent tomber des flocons de neige imaginaires dans nos têtes. « Homeless Songs » c’est comme chausser à nouveau ses skis et se sentir enfin libre… à nouveau.
Album noir. Photo noir et blanc vue à travers une fenêtre sur laquelle coule la pluie. Ambiance automne-hiver, si l’ami Stephan Eicher était un styliste sa collection de mode serait à l’image…de cette image : sage, mélancolique, empreinte de gravité, de nostalgie, mais aussi de tendresse et d’espoir. Une délicatesse rock presque Dylanesque nous envahit, tant ces 14 chansons sont un pari gagné sur la profondeur des sentiments. Depuis l’aube des 80’s, lorsqu’il était seul sur scène avec sa guitare et ses machines, tel le gladiateur sur le sable de l’arène, Stephan Eicher a toujours occupé cette place à part dans nos cœurs et dans notre discothèque. Inclassable, il nous subjuguait de sa remarquable « polyglottité », sorte d’ubiquité linguistique, passant alternativement du français à l’anglais, en passant par le suisse allemand voire l’italien…tout en conservant à chaque fois sa marque. Comme un hybride européen de Springsteen et de Cohen, au fil de ses 15 albums l’ami Stephan ne nous a jamais déçus.
Même son petit dernier, l’OVNI « Huh » ( Voir sur Gonzomusic https://gonzomusic.fr/stephan-eicher-traktorkestar-huh.html ) sorti en février dernier, où il revisitait, en version fanfare, certaines de ses chansons, a su nous enchanter. « Homeless Songs » est son second album de l’année, car Stephan sans doute frustré par le conflit qui l’avait longtemps opposé à son précédent label Barclay devait avoir quelque part envie de rattraper le temps perdu et de publier ses compositions. Pourtant, que l’on se rassure, pas d’overdose d’Eicher, bien au contraire. Ces 38 minutes et quelques poussières, malgré leur calme et leur quiétude filent paradoxalement à train d’enfer. 14 chansons magnifiques- dont les textes français sont toujours signés Philippe Djian- qui s’écoutent trop vite, dont l’irrésistible balade « Si tu veux (Que je chante) » aux faux airs de « Les chansons bleues », comme une sorte de retour aux sources, la cool country « Monsieur- Je ne sais pas trop », la vague valse « Gang Nid Eso », la troublante et délicate « Still » et bien entendu la crépusculaire aveuglante à trois voix « La fête est finie » aux côtés de Miossec et d’Axelle Red. Par contre, cher Stephan, « Homeless Songs » porte bien mal son titre : la preuve, ces chansons ne seront plus jamais SDF puisque nous les avons adoptées…à jamais !