SHEILA & B DEVOTION « King of the World » 40eme édition
Avril 1980, GBD recommandé par Hervé Muller entre à Rock & Folk et choisit pour sa toute première chronique, en guise de provoc, un LP iconoclaste, le « King of the World » de Sheila & B Devotion, en fait un funkyssime album de Chic, écrit composé et réalisé par Nile Rodgers et Bernard Edwards. Quatre décennies plus tard, ce Sheila incomparable ressort boosté de nombreux remixs et c’est Jean Christophe Mary qui lui voue toute sa… dévotion.
Retour vers le futur, en 1980 je faisais mes premiers pas à Rock & Folk. Au cours de mes trois voyages en Californie, j’avais découvert Norma Jean et craqué sur son « Saturday », en fait un hit de Chic dans la glorieuse foulée de « Le Freak » et annonciateur de leur fulgurant « Good Times » à venir. Juste avant un certain Prince, Nile et Bernard inventaient déjà leur incroyable modèle de fusion où le rock venait percuter leur funk d’airain. Alors pour moi, débarquer à Rock & Folk « temple » de la rock culture et chroniquer Chic, au-delà de l’intense satisfaction de défendre un son qui ne ressemblait alors à aucun autre était déjà en soi un acte aussi militant… que provocateur, sorte de punkitude de la funkitude 🤪 . Bon, il est nécessaire de préciser que le futé Claude Carrere, grand manitou des disques Carrere, qui publiait entre autres les albums de Sheila, avait alors acheté la quatrième de couve, le dos de couverture du journal, pour y passer une page de pub pour le LP de Sheila, par conséquent Paringaux, Colin et consorts, au nom de l’appât du gain publicitaire, n’avaient guère le choix que de publier ma chronique, même si elle était à des années-lumière de leur politique rédactionnelle ! D’ailleurs, un an plus tard après avoir rejoint la rédaction de BEST, pour mon premier reportage aux USA pour le fameux mag de la rue d’Antin ( Voir sur Gonzomusic https://gonzomusic.fr/best-vs-rock-folk-ou-la-rue-dantin-vs-la-rue-chaptal.html ) je débarquai à New York City pour retrouver Chic au légendaire Power Station studio où ils enregistraient « Take It Off », leur cinquième 33 tours, un entretien exclusif que je vous ferai sans doute partager l’an prochain sur Gonzomusic pour les 40 ans de sa publication, mais en attendant, boys and girls délectez-vous de la sublime nostalgie groovée de cet irrésistible « King of the World » qui nous propulse de son précieux « Spacer ».
Par Jean Christophe MARY
Pour les 40 ans de cet album mythique, le label Warner Music France publie 3 éditions anniversaire de « King of the World » : une édition coffret numéroté limité 2LP+2CD+1DVD, une édition 2CD enrichie et une édition vinyle rouge. Du charme, du charme et encore du charme. Pour savourer « King Of The World », l’album de référence de Sheila sorti en 1980, il faut l’écouter et le réécouter attentivement. Déjà dans l’album précédent « Singin In The Rain » (1977) le producteur Nile Rodgers (Chic) avait commencé à mettre au point la formule gagnante avec une fusion de disco de funk synthétique et de rock, le tout chanté en anglais. Car le début des 80’s marque un second souffle dans la carrière de Sheila. Après un divorce, un enfant et une cabale médiatique, la voilà désormais sacrée « reine du disco ». Lancé dans l’anonymat afin de ne pas heurter le public français, l’album « Singin In The Rain » de Sheila &B Devotion caracole en tête partout en Europe et même aux Etats Unis. Alors, pour battre le fer tant qu’il est chaud et élargir la fan base pour conquérir le marché international, Nile Rodgers structure les chansons, peaufine la matière sonore vers une pop funk plus synthétique. Là où les premiers albums de la midinette sage en jupe écossaise sonnaient pop yéyé, « King Of The World » est construit principalement autour de synthétiseurs et de boites à rythmes. L’écriture des chansons est un virage à 180 degrés et tranche avec le répertoire fleur bleue des 60’s et des 70’s. L’univers électro-funk est validé ici par une vraie signature artistique, avec ces synthétiseurs qui apportent un petit côté mécanique et robotique. Les 9 titres originaux explorent ainsi une large palette musicale qui vont du rock au disco et au funk. Richement inspiré, Nile Rodgers tient l’auditeur en haleine par un jeu de guitare subtil, une avalanche de notes et de mots qui swinguent tous plus haut les uns que les autres. Le tout étant rehaussé par un magnifique travail d’arrangements de chœurs où les voix semblent tout droit descendues du ciel.
L’album contient 8 hits disco-funk dont ‘Spacer’, ‘King of the World’, ‘Charge Plates and Credit Cards’ et « Your Love Is Good », autant de singles à succès qui s’enchainent sans temps mort. En ouverture, « Spacer » est un titre enjoué, un titre pour faire la fête, avec un groove et une rythmique à la signature Chic particulièrement marquée. » King Of The Pop « est de la pure pop qui ouvrira la voix au succès de « Little Darlin » l’année suivante quand « Misery » mets lui le rock au à l’heure de l’informatique musicale. Riche d’une carrière unique, Sheila a toujours su renouveler son répertoire et rester dans l’air du temps comme le prouve quarante après, cette collaboration unique entre Sheila et Nile Rodgers. Par bonheur, ces titres re-mastérisés offrent de nouvelles couleurs aux orignaux et respirent même une certaine fraîcheur qui devraient faire mouche auprès de la jeune génération.