ORBITAL « Optical Delusion »
9 albums électro révolutionnaires, des méga-tubes planétaires récupérés par le cinéma, la télé et la pub, des tournées mondiales et puis…plus rien. On désespérait de réentendre un jour le duo Orbital, soit les frères Phil et Paul Hartnoll, sorciers du mix et empereurs du groove qui mis à part quelques excursions live derrière les platines, avaient été portés disparus entre 2004 et 2018. C’est donc avec un plaisir extrême qu’on apprend leur retour. Retour d’autant plus satisfaisant que le bien nommé « Orbital Optical Delusion » reprend l’histoire là où il l’avait laissé, autrement dit juste après le fabuleux « Monsters Exist » de 2018.
Par Jean-Christophe MARY
En trente ans, Orbital a créé une œuvre électronique vaste ambitieuse avec large éventail styles, de l’ambient à l’électro, en passant par le rock et les musiques de films. Au milieu des 90’s, le duo britannique sera devenu l’une des des figures incontournables de la scène electro internationale mais restera fidèle au public underground. Entre 1990 et 2018, les frères Hartnoll auront publié une série d’albums salués par la critique dont le célèbre « Orbital 2 » (1993) et « In Sides »(1996), albums autant plébiscités par les fans de rock que par le public electro. Le tandem se séparera en 2004 pour se reformer en 2009. Après une deuxième rupture en 2014, ils reviendront sur le devant de la scène avec le brillant « Monsters Exist » (2018). En 2023, Orbital persiste et signe dans une voie toujours aussi charnelle qu’organique. La preuve par « Optical Delusion » nouvelle collection electo acid house où les synthés analogiques et autres machines robotiques livrent toute leur humanité. Dès le morceau d’ouverture « Ringa Ringa (The Old Pandemic Folk Song), la patte sonore du duo transparaît de manière évidente avec cette structure acid house en forme de boucle cyclique boosté par un groove haletant, le tout porté par les voix de The Mediaeval Baebes.
Orbital construit, innove, dessine les lignes d’une electro house dont ils ont seuls le secret, une electro house qui respire la nostalgie d’une époque révolue, celle des 90’s. « Day One » enfonce le clou avec ces basses dansantes, ces claviers rebondissants qui devraient logiquement faire la joie des playlists Spotify, Deezer quand « Are you Alive ? » renvoie à la dream pop electro progressive planante d’un Mike Olfield sous influence Underworld. Sous cette immense cathédrale sonore, « You Are The Frequency » est une grande messe païenne où toutes les divinités electro 90’s de Alphex Twin à Leftfield en passant par Justice, Daft Punk et les Chemical Brothers seraient invitées à s’unir. «The New Abnormal» est un hymne hypnotique lumineux, très dansant. Porté par la voix de d’Anna B Savage (on pense aux arabesques vocales d’un Jimmy Sommerville ! ),« Home » nous tire doucement dans une ambiance hypnotique, nous ouvre la porte de rêves merveilleux et aquatiques, une sorte de plongée sous marine, avec ces notes de synthés cristallines, ces sonorités trip hop qui sont autant de petites bulles d’air qui voguent au gré de l’instant. « Dirty Rat » nous happe avec sa basse rugueuse, ses arrangements synthétiques portés par la voix imposante de Jason Williamson (Sleaford Mods), titre qui devrait logiquement faire des ravages sur les dancefloors internationaux. Tout au long de l’album, les deux frères conjuguent leurs multiples influences electro, rock 80’s et hip hop et fabriquent une bande son à l’atmosphère unique où viennent se greffer basses electro funk, pulsations saccadées et autres sons electro très surprenants. Mais leur musique est surtout construite avec intelligence et prend le parti du son aux couleurs du plaisir. Basses monumentales, voix alléchantes, cette bande son acid house trip hop est une infernale machine à danser. En attendant de les revoir live, voici le préambule idéal pour réchauffer l’hiver.