BJÖRK ET LE ROCK EXTRA-TERRESTRE DES SUGARCUBES
Voici 30 ans dans BEST, GBD rencontrait à nouveau, mais cette fois à Paris et non pas à Reykjavik, ces Sugarcubes, petits sucres islandais d’une Björk tout juste agée de 24 ans, aussi rebelles que forcément… givrés, à l’aube de la sortie de leur second LP, le bien nommé « Here Today, Tomorow Next Week », juste avant leur passage en live à SOS Racisme. Flashback…
Quel privilège de travailler chez BEST ! Et si l’on pouvait encore en douter, il suffit d’observer avec un peu d’attention la couverture de ce numéro 255. Bien entendu, mes petits Sugarcubes, révélés l’année précédente par mon reportage en Islande, toute première interview de Björk et de ses petits camarades accordée à la presse hexagonale ( Voir sur Gonzomusic https://gonzomusic.fr/petit-sucre-bjork.html ), figurent en place d’honneur en « une » du mensuel rock de la rue d’Antin. Mais en observant attentivement, on lit tout en haut de la page « Interview exclusive des Rolling Stones ». Cette dichotomie incarne tout l’esprit de BEST insufflé par le brillant Christian LEBRUN par rapport au Rock & Folk de l’époque, par exemple ( Voir sur Gonzomusic https://gonzomusic.fr/best-vs-rock-folk-ou-la-rue-dantin-vs-la-rue-chaptal.html ), le choix d’un petit groupe aussi allumé que peu connu contre un pilier du rock, résume à lui seul tout le courage de Christian. Près de trente ans après sa tragique disparition, cette publication me donne à nouveau l’occasion de lui rendre l’hommage qu’il mérite. Love you man … wherever you are et merci pour ton flair légendaire qui a su repérer et parier sur tant de diamants invisibles dans leurs gangues, des joyaux tels qu’une p’tite Björk de 24 balais déjà aussi punk que totalement arty !
Publié dans le numéro 255 de BEST sous le titre :
DU SEL DANS LE SUCRE
« À quoi bon perdre son temps à se demander si les Cubes tournent rond ? Les bouts de sucre islandais sont sans contexte le groupe le plus insaisissable et le moins prévisible de la nouvelle galaxie du rock, celle qui ignore les frontières traditionnelles du genre. Risquant l’hypoglycémie, Gérard BAR-DAVID tente de remuer la petite cuillère sans renverser la tasse. » Christian LEBRUN
Matsuko Fujii porte a ses lèvres un dé à coudre de saké brulant imaginaire. À ses côtés, les Sugarcubes piaillent joyeusement dans leur étrange langue insulaire. Débarqué à Reykjavik au début 80, Matsuko l’étudiant de la Nippon School of Anthropology a choisi d’étudier les spécimens sans doute les plus zarbis du Royaume des glaces, histoire d’exorciser son entêtante passion des géo-phénomènes du rock and roll. Et comme dans l’Islande des geysers et du lichen fluo où les tripes de la Terre tracent sans cesse quelques faux-semblants, tout ce qui touche aux Cubes baigne dans un troublant surréalisme. Matsuko n’est pas plus jap que vous et moi. Il est grand, roux et 100 % – sang pour sang – d’hémoglobine islandaise irriguent ses veines. À notre précédente rencontre, il était Hilmar Orn Hilmarsson, un ami d’enfance du groupe. Comme Batman dans sa Batcave n’est plus tout à fait Bruce Wayne, Hilmar pousse le réalisme journalistique jusqu’aux frontières de la schizo en arrosant de thé vert ses rations de sushi.
Estomaqué par le rock extra-terrestre des Sugarcubes, en décembre dernier je m’étais embarqué sur un DC 8 d’lcelandair à destination de Reykjavik (voir le BEST N° 245 sur Gonzomusic https://gonzomusic.fr/petit-sucre-bjork.html ). Là, dans un paysage lunaire de coulées volcaniques, un petit chalet de bois vernis isolé face à la splendeur figée d’un lac gelé avait abrité ma première rencontre avec Björk, Einar et les autres. La retraite des Cubes était en fait la résidence d’été de la famille d’Hilmar. À l’époque, notre allumé barbu se baladait déjà sans cesse avec sa mémoire électronique a cassettes où il enregistrait des bribes de conversation avec la passion légendaire du chasseur de papillons. Je n’y avais guère prêté attention, trop sidéré par la beauté de Björk et l’extraordinaire vision de ces paysages figés dans un ciel bleu polaire éclatant des rayons d’un soleil rasant. « Life’s Too Good », le premier album des Sugarcubes était une bande originale parfaite pour ces aventures nordiques. À mi-chemin entre l’Europe et l’Amérique, leur rock sans renier ni Siouxsie ni les B 52’s faisait souffler une incomparable fraicheur d’alcool de menthe sur nos sens blasés par la monotonie d’une production musicale techno-uniforme et sans surprise. Avec leurs textes volontairement provocs, les rockers d’Islande ne respectent ni Dieu ni Diable. Et si l’alcool et le sexe sont si présents dans leurs chansons, c’est qu’ils constituent l’unique moyen de combattre efficacement la longue monotonie des hivers sans fin. Indispensables grains de folie dans nos charts aseptisées, ces envahisseurs intellos venus du nord savent sans doute mieux que nous que «la Terre est bleue comme une orange ». Les textes susurrés par la voix acidulée de Björk ou scandés par Einar avec les poumons d’un chef de gare, doivent bien plus à Paul Eluard qu’au géniteur de « Blue Suede Shoes ». L’écriture quasi automatique des nouveaux cubistes échappe aux habituelles fixations rock des filles, des bagnoles et de la rue. Mais lorsqu’on grandit dans l’isolation insulaire d’une nation de 250 000 âmes ou l’on se congèle les glaouis à longueur d’année, c’est l’imagination ou la mort. Les P’tits Bouts de Sucre ont choisi de jouer les boat people au pays du rock and roll. Si leur drakkar aborde à nouveau nos côtes c’est pour participer au méga concert SOS Racisme sur l’esplanade du château de Vincennes. Quelques heures avant le gig, je retrouve la tribu islandaise dans un petit apart du Marais. Surprise, ils ont tous la boule à zéro. Le crâne de Björk étincelle de paillettes. On la croirait échappée d’un plateau de tournage de la série Startrek. Venusienne irrésistible, miss Gudmundsdottir n’a rien perdu de son charme eskimo glacé. Sa bouche est largement ouverte et elle chantonne comme d’habitude d’inintelligibles comptines. Matsuko / Hilmar a branché son Sony, l’école cubiste au complet se livre au jeu de l’interview :
« Savez-vous où vous jouez aujourd’hui ?
Einar: « Tout à fait, nous jouons là ou le divin marquis de Sade a été bouclé. Et il en a profité pour écrire « Justine ou les malheurs de la vertu » son plus beau roman rédigé sur quelques papiers torchons retrouvés cent ans plus tard. »
C’est là votre raison majeure pour aller à Vincennes ?
E: « Sans compter l’attrait pour l’uniforme. Les marins et les bidasses des environs sont de charmants garçons. »
Avec les Cubes on ne sait jamais sur quel pied danser. J’insiste lourdement: « Vous savez sans doute que c’est un gig anti-raciste ? » Et Einar plonge avec humour :
« Il parait évident que si ce concert est baptisé SOS Racisme c’est qu’il a quelque chose à voir avec le racisme. Je me demande juste quel sens devons-nous donner au SOS ? Signifie-t-il qu’il faut tenter de sauver les derniers racistes avec l’acharnement des sauveteurs de bébés phoques ? »
Dans les interviews, les Sugarcubes ont deux sujets de prédilection : la morue, symbole essentiel de l’ile des glaces, et les 50 000 G.I’s yankees planqués dans des bases secrètes à l’intérieur des terres d’Islande :
« Les G.I’s essaient toujours de combattre nos farouches moutons- vampires », reprend Einar, « le 15 juin dernier, ils ont même été rejoints par 1 500 ricains frais envoyés pour sauver leurs petits copains. Ce sera sans doute la plus grosse manœuvre militaire jamais lancée sur la terre d’Islande. La veille, c’était le jour de notre fête nationale. Ils ont été forcé de repousser leur opération de 24 h car le jour de la fête nationale les moutons-vampires deviennent encore plus chauvins. Pauvres G.l’s paumés, cela aurait été un véritable massacre. »
Profondément anti-religieux, les Cubes ont même poussé le bouchon jusqu’au blasphème puisque dans l’album précédent le titre « Deus » racontait les divines parties de jambes en l‘air que la p’tite Björk organisait dans un bain chaud avec SON créateur. Quand à Einar, il racontait à qui voulait l’entendre que Dieu était le PDG d’une banque mondiale de sperme dont chaque église était une succursale. Or Jean Paul Il était en visite officielle en Islande ou 90 % de la population est protestante ou athée.
« Pour son concert de pope music, il avait la plus grosse sono jamais utilisée dans toute I’histoire du pays », raconte Magga, « et comme cette petite histoire nous a couté la bagatelle de 30 millions de couronnes, pour qu’elle soit rentable il faut souhaiter que tout le pays se convertisse rapidement au catholicisme. »
En un an, sur la lancée de leur succès British et de leur signature par Elektra pour les US, les Surgarcubes ont dévorés les kilomètres planétaires. Dans toutes leurs pérégrinations, qu’est-ce qui les a le plus marqué ? Bjork cesse un instant de chanter ses mélopées pour répondre :
« Jamais je n’aurais pu juger tout le changement traversé par I’URSS si nous n’y étions pas allé. C’était un drôle de feeling que de se retrouver là-bas, peut être avions nous la sensation de participer à un mouvement dans ces pays baltes qui se dirigent résolument vers l’indépendance. Là- bas l’espoir est immense et intense, mais je dois admettre que si j’étais restée en Islande pour découvrir toute la situation a la télé, cela m’aurait sans doute moins branché. Nous devions faire sept concerts en URSS, mais quatre d’entre eux ont été annulés par le Parti. Nous aurions pu rester la-bas et assurer quelques petits concerts privés, mais la situation ne s’y prêtait pas. Si le PC a supprimé nos gigs c’est a cause des rumeurs de grèves et de manifs qui secouaient toute la région. Et ils ne voulaient surtout pas que des ados se réunissent même à l’occasion d’un concert. Comme ça n’était pas notre combat, nous n’avions aucune raison de les affronter de face. Si j’étais née en Chine, par exemple, je serais allée manifester sur la place Tian Anmen, mais ça n’est pas ma vie. » ( Pour mémoire, le mur de Berlin va tomber à peine un mois après cette interview et moins de deux ans plus tard l’URSS se désintégrait avec l’issue que nous connaissons : NDR).
Ne crois-tu pas que lorsqu’on vit sur un rocher isolé au milieu de l’océan on partage un peu toutes les vies qui nous entourent ?
Björk: « Tout cela est trop loin de nous. En Islande, nous avons un sentiment d’indépendance hypertrophié. N’oublie pas que nous avons dû attendre 1944 pour accéder enfin à l’indépendance.
E: «Ça n’est pas notre boulot de groupe de rock de modifier la face du globe. Nous ne sommes pas des croisés en route pour la terre sainte mais des travailleurs normaux du monde qui font un job très étrange. Nous n’avons pas à déployer de bannière, chacun doit se faire sa propre idée. Nous avons joué a Riga et dans I’assistance certains avaient inscrit sur des draps qu’ils tenaient à bout de bras « Libérez la Lithuanie, la Létonie et l’Estonie ». Mais que pouvions- nous faire ? Nous n’avons pas le pouvoir magique de transformer ce régime. Il n’y a rien de plus frustrant que I’impuissance. » ( Le 6 septembre 1991, soit deux ans après cet entretien, l’URSS reconnaissait l’indépendance des pays Baltes.: NDR).
B: « Tous les groupes auxquels j’ai appartenu ces six dernières années n’avaient qu’un seul message : ce besoin vital de I’individualisme ou chacun doit agir totalement à sa guise. Et si nous avons eu une influence par notre musique, c’est de cette manière. Faites ce que vous voulez les gars mais ne forcez personne a jouer votre jeu. D’une certaine manière cela constitue le nec plus ultra du message politique.
E: « Qu’est-ce que Ia liberté ? Pouvoir déambuler rue Saint-Denis pour ramasser une pute ? Se bourrer la tête à cinq heures du mat pour aller dire merde au gouvernement, c’est cela la liberté ? La liberté tu te la crées seul.
B: « C’est comme les débats sans fin avec les journalistes autour de notre musique. Tant de groupes excellent dans l’art de raconter ce qu’ils font et lorsque tu écoutes le disque chez toi c’est carrément nul. C’est comme préserver I’indispensable piquant du mystère lorsque tu écoutes un disque en te posant des questions. Si l’artiste vient lui-même te faire une explication de texte, c’est exactement comme si tu apprenais dés le chapitre deux de ton polar que le maitre d’hôtel a fait le coup. Si ton roman est bon, tu n’as pas besoin de lire le résumé inscrit au dos. »
E: «Le plus chiant avec les gens que nous rencontrons en tournée c’est le moment où ils commencent à parler de musique. Et tu te retrouves a partager la vie de ces roadies qui n’ont pour seule conversation que leurs problèmes technico-nombriliques. Jour et nuit, des années et des années, ils ne parlent que de cela ; et l’on se demande ensuite pourquoi le rock est-il un tel désert culturel ? Le monde de la musique est carrément incestueux, c’est un serpent qui se mord la queue en produisant des débiles à la chaine tout juste capables d’articuler de profondes débilités comme : « Hé t’as vu le sample qu’on a collé sur la ligne de basse, mec ! ». Quelle triste réalité ! »
Björk semble craquer et pirate alors la conversation qui dévie sur la bouffe. La révélation culinaire lui est apparue dans le sud de la France sous forme réincarnée d’un chateaubriand au poivre vert flambé à l’armagnac et dégusté dans un jardin fleuri. Diner dehors en Islande est une coutume aussi rare que l’air conditionné. Et si les grands froids rapprochent les corps, ils poussent aussi les rockers dans le ventre tiède et rassurant des studios d’enregistrement. Et si on parlait de « Here Today, Tomorrow Next Week » ?
Einar se passe la main sur son crâne lisse et réplique :
« Nous avons enregistré au Syrrland, un nouveau studio a Reykjavik. II était si neuf qu’il sentait encore la peinture. Hélas, tous les équipements étaient loin d’être au point. »
Björk se remet à chanter, Einar s’interrompt et lui aboie quelque chose en islandais. Björk est une petite fille triste.
« Nous avons perdu trois semaines à tester leur studio, mais nous avons tout de même pu mettre en boite vingt chansons que nous sommes allés mixer a Londres. »
Sur leurs disques, les Cubes ont habitude de ré-enregistrer leurs propres chansons dans des versions différentes en changeant de titre a chaque fois. Le nouvel LP n’échappe pas à cette perversion du « doublage » puisque la version CD contient un titre baptisé « Hot Meat »… en fait une version décousue du « Cold Sweat» de « Life’s So Good ».
« Connais-tu notre chanson « Deus », me demande Björk de sa petite voix, « lorsqu’on bossait en studio son titre de travail était « The French Pop Song » car on pensait qu’elle ferait une superbe chanson pour le prochain Grand Prix de l’Eurovision. »
« On a un titre de travail, puis un titre pour les concerts et enfin un titre pour l’album », explique Einar, « chaque composition a au moins trois titres et ils changent sans arrêt. « Eat The Menu » s’est d’abord appelée « Ykjos » – nom d’une banlieue de Reykjavik » – puis elle a porté le titre ironique de « By The Bush ». De même, « Traitor » était d’abord « Révolution » puis « Beltink » – révolution en islandais – et enfin « A Drum Is Missing » car le jour ou nous l’avons enregistrée Siggi le batteur est arrivé très en retard. »
Je leur suggère alors de sortir chaque année le même album en se contentant uniquement de changer les titres des chansons. Einar éclate de rire:
« C’est justement le problème que nous avons avec « Here Today, Tomorow Next Week » car les gens nous disent qu’il ne sonne pas du tout comme « Life’s So Good ». On leur a répondu que si ça les gènait on allait justement leur re-balancer « Life’s Too Good » mais avec des titres différents. « Délicious Demons » sur le maxi était rebaptisé « Organic Punk Strand ». Nous avons reçu tant de lettres qui nous demandaient si c’était la même chose. Les gens sont-ils incapables d’écouter par eux-mêmes et de juger ; quelle tristesse ! »
Björk a décroché, elle s’amuse avec le lecteur CD au fond de la pièce. Einar raconte qu’il rêve d’être enterré au Pére-Lachaise entre Chopin et Oscar Wilde. Les Sugarcubes sont déjà sur une autre planète comme la chanson subtile et évanescente qui clôt leur deuxième et sidérant « Here Today, Tomorrow Next Week ». Matsuko / Einar éjecte la cassette de son Sony et me lance un sourire compatissant :
« Matsuko a suivi ces acteurs de la nouvelle scène depuis des années. Son bouquin -mon bouquin – retrace toute l’évolution des groupes comme Pulrrkur Pillnikk, Toppi Tikaras et Kulk qui ont donné naissance aux Sugarcubes. Elise Breton, la veuve d’André Breton a reconnu en eux d’authentiques surréalistes. Pour ma part, je crois que les Cubes sont plutôt des dadaïstes ce qui explique pourquoi ils sont aussi chiants dans les interviews avec leurs réponses sans queue ni tête. Voila pourquoi j’ai toujours mon petits magnéto branché avec l’espoir d’attraper de temps à autres quelques bribes d’un discours censé. Sur 52 heures de bandes j’ai au moins quinze minutes d’exploitables. »
Et Matsuko me donne son exemple de la chose la plus censée qu’ils aient dite en deux jours : « Ils parlaient d’une femme trés belle qu’on avait retrouvé noyée dans la Seine. Elle était si belle qu’elle a inspiré un artiste qui a fait son buste. Ainsi tous les Cubes voulaient se balancer a la Seine pour finir en statues. ». On raconte qu’un fameux rock-critique italien a renoncé a sa brillante carrière après avoir interviewé les Sugarcubes. Faut-il croire tout ce que l’on raconte ? Moi leur naturel m’adrénalise plutôt. Les Sugarcubes font souffler l’oxygène sur le rock comme on verse I’huile sur le feu. Tant mieux. Et si leurs chansons paraissent désarticulées, c’est justement pour mieux coller a la vie. Les voix de Björk et d’Einar s’entrechoquent pour créer les nouvelles règles d’une harmonie feu et glace qui ressemble tant aux visions d’Islande. Ici aujourd’hui, demain la semaine prochaine, les Sugarcubes sont aveuglants comme un tube futuriste à la radio.
APRES LE CONCERT SOS RACISME COUP D’ŒIL SUR LE NOUVEL ALBUM
SUGARCUBES LE SHOW ET LE RAFRAICHISSEMENT
Combat-rock en cheveux ras uniformes, le rock fraicheur menthol des Sugarcubes a créé l’évènement au gig de SOS Racisme sur l’esplanade de Vincennes. Björk Gudmundsdottir, lolita craquante et fragile, dévorait de sa bouche sensuelle les vagues de potes aux pieds de la scène. C’est vrai, le rock acidulé islandais des Cubes ne ressemble à nul autre. Ni anglo, ni yankee, il se singularise par une indépendance farouche. Comme leur terre d’origine, née dans la fusion des laves et des glaces, leur musique fait souffler simultanément le chaud et le froid. Dans la foulée de leur épicurien « Life’s Too Good » les p’tits bouts de sucre ont enregistré chez eux leur album à venir dont la sortie est prévue fin septembre. Brève rencontre parisienne pour découvrir les nouveaux titres comme « Eat The Menu » au texte esotérico-gastronomique dans la lignée de « Motorcrash », « Planet » où la voix de la jeune Björk s’envole à la recherche de quelque démon délicieux ou encore « Diesel » aux pulsions quasi africaines. Produit par l’équipe à succés de One Little Indian, leur micro- indépendant label anglais, le Sugarcubes nouveau nous fera tous une tête au carré dans une rentrée qui sera cubiste ou ne sera pas !
Publié dans le numéro 255 de BEST daté d’octobre 1989