MY BACK PAGES DYLAN & EUX

Dylan

Faire tout un bouquin sur une seule chanson, déjà je trouvais cela sacrément gonflé. En même temps, il ne s’agit pas de n’importe quelle chanson, mais de celle dont le refrain porte à jamais cette phrase juste mythique, une phrase qui a inspiré des générations : « Ah, but I was so much older then/ I’m younger than that now »… soit « My Back Pages », sans doute l’une des plus fameuses compositions de Bob Dylan, vaillamment autopsiée, analysée, exégésée, extrapolée et très largement fantasmée par mon collègue rock-critic François Gorin. À la veille du prochain show parisien du Zim’, quelle merveilleuse manière de patienter en lisant ce « My Back Pages Dylan & eux ».

GorinLa scène se déroule ce fameux soir du 16 octobre 1992, au Madison Square Garden de New York City, lorsque le gratin de la rock culture a décidé d’honorer les trois freewheelin’ décennies du Zim’ par un concert monumental où cinq spadassins, qui comptent parmi les lames guitaristiques les plus affutées entouraient le Maître face à son public. François Gorin leur a trouvé un surnom, inspiré par Alexandre Dumas : les Cinq Mousquetaires. Mais alors cher François, si Neil Young, Roger McGuinn, Tom Petty, George Harrison et Eric Clapton sont les cinq mousquetaires, par conséquent Bob Dylan c’est… Anne d’Autriche ?

Capturée en vidéo modèle années 90 de qualité pourave, le live de la chanson ne dure que 4’ 45’’, et c’est juste un instant de grâce au pays du rock. Donc tant pis si l’auteur parvient à tartiner 174 pages sur le sujet, son style aussi puissant qu’attachant, aussi informé que méticuleux, parvient à nous alpaguer jusqu’à l’ultime point final. Sans oublier cette culture rock qui coule dans ses veines depuis le crépuscule des 70’s qui fleurit entre les lignes. À Rock & Shnock, où nous avons démarré… de concert, j’appréciais déjà la fine écriture de Gorin. 40 ans plus tard, il n’a décidément pas perdu la main, la preuve :

« Mais en 92 on sait bien, et mieux encore aujourd’hui, que de toute l’éternité Dylan sera ce personnage à l’air sournois et pourtant animé de purs élans mystiques, porté en pensée à des rencontres hautement symboliques en un lieu-limite crucial, désert ou rivière, sommet ou ruines, tel un Don Quichotte aux allures de Charlie Chaplin égaré dans un western biblique et faisant comme si tout se passait selon le plan prévu, même s’il n’en mène pas large »

On croise aussi dans le livre une foule de cruciaux personnages secondaires, de la belle Suze Rotolo dite Sue, qui s’affiche aux cotés de Bob, sur la pochette iconique du « Freewheelin Bob Dylan », ou encore Agnes Cunningham et Gordon Friesen, fondateurs du très politique mag « Broadside » qui lui inspirent son personnage du Dylan insurgé, son coté protest qui établira le socle de la légende Dylanienne. Gorin développe aussi les portraits des guitar heroes à ses côtés ce fameux soir : Neil Young, Roger McGuinn, Tom Petty, George Harrison et Eric Clapton. Enfin, à la fin de l’ouvrage il se glisse carrément dans la peau de Robert Zimmerman, une expérience qui se révèle aussi touchante que troublante:

« Regardez-moi, je suis là. Ne me cherchez pas, je n’y suis plus.  J’ai piqué des tas de trucs à droite et à gauche pour en faire des chansons ; j’ai mis des mots dessus, j’en ai tellement, et ma signature en bas, merci pour le copyright. Mais ces chansons, maintenant faites-en ce que vous voulez, comme moi le premier j’en fais ce que je veux. Je les chéris, les délaisse, les malmène, les modifie, les reprends, les sers, les masque, les repeins, les abuse, les glorifie. C’est selon. Je ne les oublie jamais tout à fait. »

Souvent à ceux qui me demandent souvent si, parmi tous les artistes que j’ai rencontrés, j’avais pu interviewer Dylan, j’avais pris l’habitude de leur répondre que Dylan ne parlait plus aux hommes mais seulement à Dieu. François Gorin n’a certes pas choisi le sujet le plus loquace pour écrire son livre, mais il s’en sort bien. Cependant en bon enculeur de mouches rock and rollesques, cher François je voulais te dire que sur la pochette du « On the Beach » de Neil Young, évoquée en page 78,  LP que j’avais acheté à l’époque au mythique Tower records, sur le Sunset Strip à Hollywood en juillet 1974, ce n’est non pas un missile planté dans le sable de Santa Monica Beach comme tu l’écris… mais le feu arrière d’une Cadillac modèle 1959… ce qui change tout, tu en conviendras… sinon, franchement le reste est carrément… OK !

 

 

 

 

« My Back Pages Dylan & eux » par François GORIN

Éditions le Boulon

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