VAN MORRISON : « Keep Me Singing »

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 Pour son 36 éme album solo, en plus d’un demi-siècle d’une carrière vertigineuse, Van Morrison, le baladin de Belfast, revient à ce qu’il sait nous faire de mieux : du Van Morrison.  Celui-ci excelle dans cet art de la soul irlandaise éternelle depuis Them. « Keep Me Singing » est un rayon de lumière qui perce l‘obscurité qui semble nous cerner de toute part. Morrison incarne à lui seul tout l’espoir de ce monde, forcement meilleur, vers lequel nous devons tendre hic et nunc.

 

VAN MORRISON : « Keep Me Singing »Mon premier réflexe, lorsque j’ai découvert que le Van publiait un nouvel album a été de me dire : mais il n’est pas trop vieux ? Mais non, le héros de « Gloria » n’a que 71 printemps et en fait, il nous semblait déjà vieux lorsqu’il était encore jeune. C’est au cours de mon premier trip à LA en 74 que j’ai découvert Van ‘the Man » Morrison en version solo. « Hard Nose the Highway » était sorti un an plus tôt et son « Wild Children » résonnait encore sur les FM californiennes. Sa grosse voix aussi puissante que rassurante avait déjà ce pouvoir de savoir m’émouvoir. Toutes ces décennies écoulées, ce pouvoir n’a manifestement rien perdu de sa force de conviction. Dès le tout premier titre, « Let It Rhyme », Morrison s’envole sur une balade classique. Toute la coolitude exacerbée de sa voix est portée par un clavier rétro Wurlitzer. Intemporel. Quelle voix parfaitement préservée, malgré le tourbillon des années. La même que celle des 70’s. Et toujours ce culte  exacerbé de l’amour, que l’on retrouve si fréquemment dans ses textes. La suivante, « Everytime I See a River » marque un peu le retour de « Wild Children », justement, développant  une puissance toujours aussi émotionnelle. La grosse voix blueseuse  de Van, qui rugit comme un grand fauve, est portée par de somptueux arrangements et empreinte d’une totale délicatesse rock. Cette sublime composition se révèle capable de me faire pleurer…des rivières ! Slow track mélancolique, « Keep Me Singing » me parait tout simplement  Sam Cookesque. C’est une soul cool blanche empreinte à la fois d’une tristesse infinie et d’espoir, résumant à elle seule le fameux paradoxe irlandais. L’harmonica cool, comme celui de Dylan, achève cette mélodie ensoleillée, à la manière d’un happy end à la fin d’un film. Sad song  et violons classieux,  classique tune mélancolique, « Out In the Cold Again » domine cet album par son rétro cool intemporel, comme une dernière chanson exécutée dans la salle de bal du Titanic. Mais on se dit alors que, parfois, cela console de pleurer, comme lorsqu’on combat le feu par le feu, la tristesse par la tristesse. Van the man nous offre comme un brûlot dans le froid mordant de la nuit infinie. Quelle sublime émotion, qui vous donne la chair de poule. Balade irlandaise classique, « Memory Lane » déborde de cette celtique soul music, qui incarne à elle seule toute l’âme irish.  Cette merveilleuse « allée du souvenir » est une parfaite compo pour vous donner la larme à l’œil. À l’heure où nous guette tant d’obscurantisme, Van Morrison se plait à nous rappeler que « la plume est plus puissante que l’épée ». « The Pen Is Mightier Than the Sword »  sonne tel un gospel folk aux réminiscences du « Gotta Serve Somebody » de Dylan. Cette superbe expression prend décidément tout son sens dans les années Trump qui s’annoncent. Van est un visionnaire et nous le prouve.

Souvenirs perdus des jours heureux insouciants d’une adolescence éternelle

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Slow tune propulsée par les violons unis au piano, « Holly Guardian Angel » est une intemporelle et parfaite love-song. Tout le pouvoir de Van est de parvenir à échapper avec tant de brio aux griffes du temps. Les chœurs gospel montent si haut, comme dans la nef d’une cathédrale virtuelle. De sublimes arrangements d’une totale délicatesse évoquent la liturgie profane de « Someone Like You » ou de « Warm Love ». On est au paradis! Claviers classiques, pour une pure rétro soul balade des 60’s,  à la manière d’un albino black, « Share Your Love With Me » a cet irrésistible feeling des standards de Sam Cooke placé toujours sous le signe de l’amour. Cool as fuck, « In Tiburon » fait vibrer la fibre émotionnelle imparable de la nostalgie. La chanson nous transporte au temps jadis, au sud de San Francisco, juste de l’autre coté de la baie, dans Marin County. C’est un peu toujours la même chanson que « Wild Children » 50 years ago…mais quelle chanson ! . Sa voix, bien trop classieuse, égrène les souvenirs perdus des jours heureux insouciants d’une adolescence éternelle. En un mot, comme un seul : superbe. Plus atypique, « Look Behind the Hill » se la joue jazzy swing et cuivres style années 30, pour un charleston en version film au ralenti. Encore une balade américaine avec « Going Down to Bangor », mais cette fois pulsée par le souffle de l’harmonica pour un parfait blues du Delta. Vrai faux classique, pour Van dont la bonne grosse voix rugit et colle admirablement à ce style musical qui évoque incroyablement  le « Most Likely You Go Your Own Way and I’ll Go Mine » du Zim en 66. Joli brin de composition nonchalante et soulesque, « Too Late », est légère simple, comme le rêve des 60’s. Enfin, le drôle de rythme de « Caledonia Swing » clôt cet album. Un déjà-vu de New Orleans, pour une fanfare cuivrée, cet instru radieux musclé par les barrissements des cuivres nous offre une superbe conclusion, farandole irrésistible pour achever ce « Keep Me Singing » sur une note optimiste, en forme de happy irish end.

 

 

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