THE RACONTEURS « Help Us Stranger »
On ne va pas se la raconter… ce 3é épisode des fulgurantes aventures de mister Jack White et de ses tonitruants spadassins est une intense bombe à fragmentations rock and rollienne. 11 compositions inédites et une reprise de l’irrésistible « Hey Gyp » de Donovan, après plus de dix ans d’attente, on ne peut pas dire que l’ex-White Stripes nous submerge de ses œuvres. Tels des « rockbusters » the Raconteurs avec cet « Help Us Stranger » assument pleinement leur mission accomplie de sauver le rock !
Ex-boss de major, Denis Garnier n’a rien perdu de sa flamme pour le rock au sens le plus large, puisqu’en ardent « music lover », il nous fait à nouveau partager une de ses intenses passions : le volcanique nouvel album des Raconteurs, soit Jack White à la guitare et au chant, Jack Lawrence à la basse ( ex Dead Weather), Brendan Benson à la guitare et au chant, et Patrick Keeler à la batterie( ex The Greenhornes). Porté par le puissant « Help Me Stranger » et sa collec de pures gâteries soniques, ce the Raconteurs n’a pas fini de s’inscrire durablement dans notre paysage musical.
Par Denis GARNIER
Dès « Bored and Razed » le ton est donné, dense et compact, la soudure prend tout de suite. Bien sûr, le titre n’est qu’une bravade, car on ne s’ennuie pas une seconde dans ce puissant blues incantatoire aux moulinets guitaristiques, grandioses comme du Led Zep. Le Graal ultime atteint ! Puis on poursuit cet infernal roller-coaster avec le hit « Help Me Stranger » en single de choc et l’on reste encore sidéré de passer de Hank Williams en guise d’intro, à l’acoustique égarée dans les limbes du transistor, au quatuor de potes lancés à toute puissance pour un titre absolument haletant qui sent le bon vieil analogique à plein nez, comme le napalm du « j’adore l’odeur du napalm au petit matin » de Robert Duvall, alias Lt Colonel Bill Kilgore dans « Apocalypse Now ». Ceux qui croiraient que les Raconteurs ne fonctionnent qu’à 200 à l’heure, se trompent lourdement, la preuve par la délicate balade « Only Child » , premier mi-tempo de l’album, cool comme un coucher de soleil Cinemascope made in USA. Retour au speed intense avec la fusée kritpto-punk « Don’t Bother Me » , embarquement immédiat pour un rock dru, speedé, fouetté, sans une once de concession, propulsé aux confins du « Race With Devil » de Gun et de la fièvre de Nirvana. On reprend son souffle avec « Shine the Light On Me », et son piano bastringue que l’on croirait tout droit sorti d’« Honky Tonk Woman », le bouge des Stones. Toujours à la cool, nos Raconteurs prouvent avec le blues high power « Somedays », que peu importe que Jack ou Brendan soient aux commandes vocales ou vocalisent de concert, ça roule comme une Mustang 67 sur le macadam de Nashville. Curieux, mais bienvenu hommage au trop méconnu Donovan Leitch, trop longtemps resté dans l’ombre de Dylan, avec l’une de ses compositions les plus cruciales « Hey Gyp », revue et corrigée blues dans l’urgence d’un rock jouissif au rythme tranché comme le fil du rasoir. Keeler le batteur killer s’en donne à cœur joie, imposant son rythme infernal. Mention spéciale à l’harmonica digne des Free, Nine Below Zero et autres bluesmen majeurs aux visages pales. Aux confins du Jefferson Airplane et de ZZ Top,« Sunday Driver » appuie là où ça fait mal. On martèle, on compacte, on démarre, on décolle carrément psyché pour planer sérieusement.
Titre avant-coureur de l’album à venir, on avait déjà découvert le deep blues entêtant de « Now That You’re Gone » voici déjà quelque temps et l’on se disait alors que si le reste était à la hauteur, ce retour des Raconteurs se promettait d’être mémorable. Promesse tenue, l’intense « Now That You’re Gone » dispense sa sombre énergie pour éponger tout le spleen de la vie. Avec « Live A lie », Jack et ses acolytes prouvent que Detroit ne s’oublie jamais, la preuve par le MC5, avec ce titre pur métal machine lancé à toute allure jusqu’aux frontières de nos souvenirs, punk rock par essence, en 2 minutes et 21 secondes le T-shirt est trempé, mission accomplie. « What’s Yours Is Mine », et l’on monte encore le son. Son riff sourd à la Jack, nous vrille délicieusement le cerveau. Enfin, dans l’écho de Led Zep, « Thoughs and Prayers » achève classieusement ce putain d’album climatique en intense balade blues à la « Dazed and Confused », matinée d’une touche country. Voilà donc avec « Help Us Stranger », ce qui constitue un album majeur, qu’on rêve de découvrir au plus vite sur une scène. Merci Jack, Brendan, Patrick et Jack: toutes ces longues années d’attente n’auront pas été vaines.