LES OBJETS : « L’intégrale »
Au tournant des années 90, un duo à la pop élégante émerge dans l’Hexagone, sorte de Squeeze à la Française. Les Objets ne se distinguent pas uniquement par leur patronyme iconoclaste, mais surtout par leurs textes décalés, leur humour inimitable et leurs influences résolument hétéroclites. 25 ans plus tard leurs deux albums de 91 et 94 « La normalité » et « Qui est qui » sont élégamment réédités sous forme d’un double CD baptisé « L’intégrale ». Classe !
En septembre dernier, j’avais succombé à l’irrésistible spectacle baptisé e-pok d’un certain Jérôme Rousseaux « Ignatus » ( voir sur gonzomusic https://gonzomusic.fr/ignatus-est-loin-detre-un-hibernatus.html ). Jérôme était loin d’être un inconnu pour moi. Au début des 90’s, j’avais déjà craqué sur son duo avec Olivier Libaux baptisé Les Objets, au point de réaliser un long sujet télé pour le défunt – mais néanmoins épatant- magazine Ramdam sur FR3 (désormais France 3) où j’œuvrais à l’époque. À des années-lumière du rock insurgé de Noir Désir, leader à l’époque, et d’à peu près toutes les autres formations hexagonales, les Objets jouaient et gagnaient à leur petit jeu furieusement décalé. Certes, Jérôme et Olivier étaient bien plus proches des Innocents, des Max Valentins ou de Daho, justement, à qui ils avaient fait parvenir leur première maquette et qui leur avait donné un coup de pouce pour démarrer. Du coté résolument British de leurs influences, on pouvait songer à ce Monochrome Set dont ils reprennent « La Jet Set Junta », mais également à XTC, aux Pale Fountains, aux Bluebells et bien entendu à Squeeze. Signés chez CBS par un directeur artistique visionnaire, un certain Frédéric Rebet, on ne peut pas dire que les Objets ont remporté tout le succès escompté. Pas grave, en ce temps béni, quand on aimait, on ne comptait pas. On savait parier sur des Artistes. Et on pariait gros! Ainsi, sur le premier album « La normalité » paru en 91, les deux singles « Sarah » et la chanson-titre, un slow romantique, sont carrément clippés par Michel Gondry.
Objets-cultes !
Et dés la première plage, le décapant « La saison des mouches » annonce la couleur d’une pop musique à la Française, si atypique et pourtant festive. De même, « L’hiver est là » est une véritable « boule à neige » pour les oreilles. On trouve également un joli duo avec la comédienne Gabrielle Lazure « L’histoire d’un couple », où elle faisait sans doute ses premiers pas derrière un micro. Exotique avec les néo-japonaiseries joyeuses de « Watashi Wa ». En tout 14 titres, dont deux inédits sur ce premier disque. Trois ans plus tard sort « Qui est qui ? », toujours dans cette veine poétique et allumée d’une pop-rock émotionnelle qui sait vous toucher comme un direct au plexus solaire. Touchés par la grâce avec l’élégante « Ces mots là » ou par une sourde révolte fatalement peace and love « Ma violence », les Objets font couler leurs cascades mélodiques dans la jungle si luxuriante de leur imagination. Ainsi, « Qui est qui » qui inspire son titre au CD est une parfaite, mais oh combien décalée, love-song. Après avoir chanté l’hiver, cette fois les Objets s’attaquent…à l’automne, avec la mélancolique « Les journées d’automne ». L’album s’achève avec la délicate « Le temps », au titre prophétique pour un groupe sur lequel le temps justement semble n’avoir aucune emprise. Car malgré leur 25 ans d’âge, ces chansons-pop semblent bien ne pas avoir pris une ride. Ces Objets déjà inclassables à l’époque sont désormais devenus des Objets-cultes !