LES NUS « Enfer et Paradis »

 Les Nus 1 by Richard Dumas

Les Nus 1 by Richard Dumas

C’est vrai, depuis l’aube des années 80, j’ai toujours eu un faible pour les groupes rennais et les Nus ont toujours compté parmi ces favoris. Trois ans après leur cinglant second album éponyme, la formation de Christian Dargelos revient avec cet « Enfer et paradis », impétueux comme la charge de la Brigade légère, et toujours porté par la voix puissante de son chanteur leader charismatique.

Enfer et ParadisC’est toujours avec un petit pincement au cœur que j’écoute un nouvel album des Nus, car je ne peux m’empêcher de penser à un ami disparu, l’immense guitariste Frédéric Renaud, le Keith Richards de cet exceptionnel groupe rennais. Frédéric était aussi cool et débonnaire qu’instrumentiste surdoué. Parti en 20013, ses good vibes sont pourtant toujours présentes dans l’esprit de ce rock de l’ouest. Heureusement, Christian Dargelos le chanteur, lui est toujours là pour tenir le flambeau et le moins qu’on puisse dire c’est qu’il est…flamboyant. Trois ans sont passés depuis son précédent projet  ( Voir sur Gonzomusic https://gonzomusic.fr/les-nus.html ) mais alors que son frère d’armes Philippe Pascal s’en est allé jammer avec les anges, le leader des Nus demeure, avec Darcel et Daho, l’un des derniers piliers de ce rock de Rennes qui nous électrise depuis près de quatre décennies. Cet « Enfer et paradis » n’en est donc que plus précieux. En tout, dix titres de moins de quatre minutes, affutés au fil du rasoir, pour mieux nous aiguillonner. Et tout démarre avec « Les ravages du temps », où la voix puissante et lyrique de Christian Dargelos monte en crescendo sur un rock aussi pur que métallisé. On y évoque le testament d’Orphée dans les déflagrations des guitares que ne renieraient ni les Stranglers ni les Damned. Punk un jour, punk toujours malgré ou peut-être justement grâce à ces « ravages du temps » invoqués.

Photo by Raymond Lemenn

« L’enfer et le paradis », la chanson-titre et phare de ce 3éme album nous rappelle, si l’on pouvait l’avoir oublié, qu’avant les Nus, Christian avait accompagné la naissance du Divin Marquis. Grandiloquence dantesque et théâtrale d’un rock aussi implacable que festif, sa sombre puissance se révèle forcément addictive. « Dans la maison d’Eva », au rythme entêtant entre Television et Led Zep, déploie son énergie comme dans un combat de boxe, une rage pure et maitrisée, dans une certaine grandiloquence, qui rentre si bien dans nos têtes. Sans doute parce que j’y ai séjourné ( avec Joe King Carrasco & the Crowns à la grande époque 🤩)  j’ai un attachement tout particulier à « Corpus Christi » où les Nus font preuve d’un rare optimisme sonique. Ensoleillée comme cette plage radieuse sur le golfe du Mexique, la balade américaine ne peut laisser quiconque indifférent, tant elle claque comme le bleu du ciel. « Vous faites du rock n’est-ce pas ? » est très certainement une phrase que Christian Dargelos a dû entendre tant et tant de fois. Et sans doute la meilleure réponse à apporter est de la tailler dans le rock 😛, un rock lancinant comme une douleur sourde, dans le cri des guitares saturées par le blues. Sans doute un des titres les plus efficaces de cet album, en tout cas un de mes favoris. Avec « Suspicion », entre les Inmates et Nine Below Zero, on plonge incontestablement dans le pub rock tonitruant, sans oublier au passage un petit clin d’œil aux Woodentops sur l’intro. Sacrés music-lovers, les Nus laissent filtrer leurs influences majeures, au fil de ces compositions qui filent si vite, qu’elles en feraient flasher les radars, si d’aventure les pandores s’évertuaient à les contrôler. « Ceci n’est qu’une nuit » à la fois dramatique et harmonique me fait penser aux Who version « Quadrophenia », aux Kinks, pour un rock fulgurant d’inspiration british. Il porte bien son titre ce « Cafe bizarre », un peu Gainsbourg, un peu Stranglers aussi, pour une élégante et sombre balade nostalgique. « Jim Crow » en version « Bal des Lazes » de Polnareff…mais aussi écho d’Ennio Morricone pour le symbole fort d’un combat  épique contre le racisme. Enfin, ce testament d’Orphée rock s’achève en beauté avec « Le portes claquent » sur une love story tourmentée et élégante, aux guitares puissantes et raffinées, sans doute un des plus belles de cet album, comme une conclusion en forme d’adieu crépusculaire. Il me tarde décidément de voir vivre ces chansons sur une scène à côté de chez moi…

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