Kim Fowley : mort d’un Pygmalion du rock
Comme un McLaren avec les Pistols, Kim Fowley a su inventer de toutes pièces un groupe de rock au féminin qui allait percuter l’Histoire : les Runaways. A 75 ans, ce producer-manager prodige de LA vient d’être emporté par le cancer qui le rongeait. RIP
Lorsque paraît le tout premier album éponyme « The Runaways » les girls ont tout juste 16 ans – à l’exception de la guitariste Lita Ford qui en avait déjà 17 -. Kim Fowley avait rencontré Joan Jett devant le fameux « Rainbow bar & grill » sur Sunset, antre du rock and roll de LA à l’instar du Whisky ou du Gazzari’s. Fowley n’était pas né de la dernière pluie : il avait démarré à l’aube des 60’s, signant ses premiers hits pour les radios AM. Comme son collègue producer Tony Visconti, à la fin des 60’s, il se délocalise à Londres où il co-signe des titres pour Cat Stevens et produit un album pour des échappés de Them. De retour à LA, il collabore au premier LP de Zappa, co-écrit les titres du premier album de Warren Zevon ou réalise pour les Modern Lovers de Jonathan Richman. Mais ce touche à tout rock n’a qu’une idée en tête : pour imiter son héros Phil Spector il va former de A à Z un groupe de rock féminin composé exclusivement de Lolitas. Ce sera les Runaways. Formé en 75, immédiatement signé par Mercury les Runaways publient leur LP le 1er juin 1976 : qui constituera la bombe de l’été…une « Cherry Bomb », comme le titre de leur tout premier single. On y retrouve aussi une version décoiffante du « Rock and roll » du Velvet Underground. J’avais eu la chance de croiser les Runaways autour de la piscine du mythique Tropicana Motel sur Santa Monica Boulevard à LA et je peux vous assurer que la fête n’avait aucun secret pour elles. Le reste appartient à la légende du rock : les Runaways à cheval entre le « rock décadent » façon Bowie-Slade. Sweet et le punk naissant des Ramones, de Richard Hell et de Blondie s’imposent sans peine à un public masculin conquis d’avance et à un public féminin qui découvre que le rock peut aussi bien être une affaire de filles. Avec leurs coiffures en pétard et leur énergie de petites rebelles, les Runaways vont cartonner jusqu’à la dissolution de 77. Joan Jett va alors émerger en solo avec son credo « I Love Rock and Roll ». Quant à Fowley, il collabore avec Alice Cooper et George Clinton durant les 80’s. Les années 90 le verront à nouveau changer de casquette puisqu’il devient réalisateur de documentaires rock. Enfin en 2014 il fait une apparition remarquée dans le clip « Haunted » de Beyoncé. Depuis septembre dernier, il était sous chimio pour tenter de réduire le cancer qui le rongeait, une bataille qu’il a finalement perdu, hélas.