DOMINIQUE A AU TRIANON
Troisième étape parisienne de sa tournée anniversaire entamée en 2024 à la Philharmonie, pour célébrer ses trente ans de carrière, Dominique A a livré un show intense, élégant et intime devant un Trianon plein à craquer. Une formation en power trio où le chanteur rock a revisité ses titres phares avec une énergie magnétique qui a par conséquent si gravement déboussolé notre JCM… qu’il ne peut que s’exclamer haut et fort… A(h) A(h) A(h)…
Par Jean-Christophe MARY
Un an après un concert symphonique magistral à la Philharmonie de Paris porté par les quarante musiciens de l’Orchestre de Chambre de Genève et quelques mois après une parenthèse habitée aux Bouffes du Nord, Dominique faisait halte une troisième fois dans la capitale dans un Trianon complet des gradins jusqu’en haut des balcons. Cette nouvelle étape parisienne confirme l’attachement intact du public pour un artiste qui, depuis La Fossette (1992), s’est imposé comme l’un des artisans majeurs du renouveau de la chanson française.
À 20h30, vêtu de d’une chemise et d’un pantalon noir, Dominique A apparaît entouré de Julien Noël (piano, Wurlitzer) et Sébastien Boisseau (contrebasse) ses fidèles compagnons de route. La scénographie est minimale, barres de lumière dessinant l’espace, pénombre élégante comme pour rappeler que l’essentiel se joue dans la tension des textes, dans ce mélange d’intériorité et d’élan qui le caractérise. Le concert s’ouvre sur « Ce geste absent », pièce lente, déployée dans une économie presque ascétique. La voix s’y installe, ample, doucement vibrante, avant de trouver un premier moment d’envol dans « La Poésie », qu’il dédie à « Moira », jeune spectatrice venue faire « baisser la moyenne d’âge du public » lance t il en plaisantant. Le ton est donné entre rigueur scénique et apartés malicieuses. Un équilibre délicat que Dominique A cultive depuis longtemps. Vient alors « Dernier appel de la forêt », introduit par « Un petit coup de distorsion et tout le monde s’enflamme » une boutade qui suffit à détendre la salle. Ce titre, l’un de ses plus sombres, résonne ici avec une puissance resserrée. Le concert s’envole et prend sa pleine vitesse avec « Immortels », morceau écrit pour Alain Bashung et devenu désormais classique de son répertoire. La voix s’y fait ample, solennelle, presque funèbre. « Vers le bleu » et « Marina Tsvétaeva » installent un climat plus introspectif. Hommage à la poétesse russe, ce dernier titre est l’un des plus émouvants du concert, porté par un piano sobre et une diction précise. L’un des moments les plus intenses survient sur « Les Animaux » avec cette pulsation rock sous halo de lumière verte qui dégage une énergie presque inquiétante, quasi chamanique. « Music-hall » permet au chanteur de déployer tout son art de conteur manière d’habiter ses textes, de les faire surgir à la frontière du récit. Parmi les moments les plus marquants, cette version bruitiste et déstructurée du « Courage des oiseaux ». Livré avec une tendresse nerveuse « Au revoir mon amour » s’impose comme l’un des sommets émotionnels quand le saisissant « Corps de ferme à l’abandon » révèle lui une dramaturgie presque cinématographique. Enfin « Tout sera comme avant » est un sursaut électrique aux parfums de Tom Waits. Le public, debout, rappelle le trio pour une salve finale avec « La fin d’un monde », « L’horizon », suivi du magnifqiue « Le Twenty-Two Bar. La soirée s’achève sur une version élégante d’ »Éléor » tout en retenue un « Oklahoma, 1932 » acoustique dépouillé à l’extrême. Pour ce troisième rendez-vous parisien de sa tournée des trente ans, Dominique A continue de réinventer son répertoire tout en continuant son chemin sur un fil lumineux et profondément singulier.
All pix by JCM
Set-list
Ce geste absent
La poésie
L’humanité
Le métier de faussaire
Valparaiso
Dernier appel de la forêt
Immortels
Vers le bleu
Marina Tsvétaeva
L’océan
La relève
Les Éveillés
Les animaux
Music-hall
Le sens
Hasta que el cuerpo aguante
Le courage des oiseaux
Au revoir mon amour
Corps de ferme à l’abandon
Tout sera comme avant
Encore:
La fin d’un monde
L’horizon
Le Twenty-Two Bar
Éléor
Oklahoma, 1932
