DAVID & DAVID & (BAR) DAVID

 

David & David 

 

Voici 30 ans, dans BEST, GBD multipliait au cube les David en réunissant David ( Baerwald), David (Ricketts) et (Bar) David pour une interview forcément historique. Groupe culte de LA n’ayant enregistré qu’un seul mémorable album, néanmoins cette année 1987 le duo David & David semblait plein de promesses portées par son « Boomtown » ( voir la chronique de l’album sur Gonzomusic https://gonzomusic.fr/david-david-boomtown.html ), qui reflétait tout autant le smog que le soleil de la Californie. Flashback…

 

David & David by JY Legras

David & David by JY Legras

Dans ces temps néandertaliens du rock, l’ami GBD était si occupé que, parfois pour se faire interviewer, certains groupes devaient carrément venir à lui. Et c’était le cas, justement, de David & David. À l’époque, en plus de BEST, je réalisais de nombreux sujets pour la télé et j’assurais une émission quotidienne de radio à l’antenne de RFI. Ce jour-là, je devais être en montage, lorsque les deux David m’ont rejoint pour cet entretien. De même, j’avoue m’être laissé emporter en prédisant un avenir doré au duo. Leur second album, qu’ils évoquent presque achevé durant cette conversation ne verra hélas jamais le jour, les deux David ayant splitté avant qu’il ne soit achevé. Pourtant, en 2016 une rumeur s’est répandue annonçant une sortie d’un second album de Baerwald et Ricketts, mais à ce jour il n’est toujours pas sorti. Pour mémoire en 92 David Bearwald a publié un album solo intimiste intitulé « Triage » , mais les David n’ont rien produit de notable. Fort heureusement, il nous reste toute la nostalgie de cet éphémère « Boomtown » de 1987, album à la beauté magique qui reste néanmoins à jamais figé par le temps.

 

Publié dans le BEST 229 sous le titre :

 

DAVE & DAVE

 

Dans la Cité des Anges, les héros qui survivent n’ont pas froid aux yeux. Hollywood Boulevard et tous ses dropés blafards dans les néons qui s’allument à la bière, les clochards de LA ont notre âge et souvent une détresse abyssale au fond des yeux. De Bel Air à East LA, le Dollar se joue des extrêmes et la crise crée ses propres mutants. Poudrés, déchirés, naufragés d’un désastre qui les dépasse, ils sont dans la rue, ils sont la rue. David Baerwald et David Ricketts alias David and David auraient pu plonger comme eux, mais ils ont lutté. Sur leur bouée était écrit « rock and roll »… L’an passé, ils nous ont offert ce premier album, « Boomtown » et mon sang de surfer s’est soudain mis à bouillir, la Californie rock n’avait pas subi une telle secousse sismique depuis le Wall of Voodoo Stan Ridgway. Imaginez un choc en studio, comme si les Dead Kennedys se mettaient à jammer avec la reformation du feu et regretté Steely Dan. « Boomtown » c’est Jackson Browne assimilant toutes les leçons des Sex Pistols, tout le background west coast électrisé, décryogénisé, réveillé par le speed des 80’s. Énergiques, instinctifs, tout simplement R.O.C.K., David et David, sans bouleverser l’ordre mièvre des charts hexagonaux ont pourtant fait craquer tous ceux qui ont pu écouter leur « Boomtown » ! Aux States, la Davidmania est en marche, ils culminent dans les cœurs et les ventes. Multi-instrumentistes chant/ basse/guitare/claviers, les deux David sont des aliens non conformistes et c’est ce qui les détache du rock yankee. lls ont le glitter de l’anonymat et misent tout sur leurs chansons. Des titres comme « Welcome to the Boomtown » ou « Swallowed by the Cracks » peignent des personnages forts et déracinés, avec un réalisme puissant à vous empoigner les tripes et vous filer le jet-lag. L’écriture de David and David tue. Et dire que je ne savais rien de ces types !

David & David

« Vous venez d’où les Davids ?

David Baerwald : Philadelphie, sur la côte est, puis le Kansas. Je vis à LA depuis huit ans.

David Ricketts: Moi je suis né dans l’Ohio, puis j’ai vécu au Japon et enfin à LA. On s’est rencontré chez un copain.

Ce qui m’a frappé dans l’album c’est sa maturité et sa fraîcheur.

D.R.: David a vingt-sept ans, moi j’en ai trente-trois. J’ai passé pas mal de temps à bosser seul dans mon coin, c’est peut-être ce qui explique le côté mature. Disons que j’ai vécu…

D.B. : Avant David and David, moi je zonais dans les rues de Los Angeles. Quand j’avais seize ans, la révolution punk était en marche avec les Pistols et les Ramones. C’est moins la musique qui me faisait craquer, mais le contexte, la liberté totale. J’ai passé huit années à être punk rocker dans un environnement totalement décousu. J’ai vécu dans de drôles d’endroits avec de drôles de gens. En rencontrant David j’ai soudain compris que je pouvais prendre ma vie en main au lieu de la laisser dériver.

En tout cas, votre « Boomtown » a eu un accueil cyclonien.

D.R. : On a été choisi par tous les polls de critiques de Rolling Stone. Time nous a élu « meilleur nouveau groupe de l’année ». Mais chacun fait ce qu’il lui plaît, le rock est si narcissique. Trop de de musiciens sont plus branchés par leurs sapes que par leur musique. Si ta robinetterie fuit à la maison, tu n’as pas besoin d’un plombier flamboyant pour te réparer ça. Tu ne veux pas d’un mec qui s’offre un égo-trip sur tes tuyaux, tu veux juste qu’ils ne fuient plus. La musique c’est comme la plomberie, si tu es bon, ton téléphone n’arrête pas de sonner.

Vous n’avez jamais joué en Europe. Vous êtes-vous offert le circuit habituel des clubs de LA: Roxy, Palace, Lingerie, Wong… ?

D.B. : Tu sais, on est avant tout des faiseurs de chansons. Avec mes groupes précédents, j’ai hanté les scènes des clubs de LA et ça ne m’a pas apporté grand-chose. Quant à David, son groupe n’a jamais pu atteindre la porte du garage parce qu’il était composé d’une écrasante majorité de fumeurs de dope. Alors avec David and David on a préféré enregistrer chez nous notre musique plutôt que de s’essouffler dans les clubs.

Vos chansons reflètent la rue d’aujourd’hui. Dans votre prochain album, à quoi ressembleront les gens qui s’enfoncent dans la crise ?

D.R.: Je crois qu’au contraire les choses s’arrangent. LA et la Californie pompent tous les capitaux coréens et japonais et à chaque coin de rue on voit apparaître un centre commercial champignon .-boomtown !»

Dans leur studio huit pistes, les Davids ont jeté les bases de leur second LP. Davitt Sigerson qui a réalisé  « Boomtown » devrait à nouveau assurer pour le duo électrique. Basés à Hollywood, ils évitent soigneusement les parties et les rencontres du genre : « hé, mais qu’est-ce que t’as de plus que moi pour ramasser autant de dollars ». Naufragés dans la cité, les Davids sont purs et durs comme le granit des statues taillées pour durer. »

 

 

Publié dans le BEST 229 daté d’aout 1987

 

BEST 229

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