COUNTERPART
C’est un cocktail, certes, mais un cocktail pour le moins réussi. Une pointe de FRINGE pour son univers parallèle et un soupçon de THE MAN IN THE HIGH CASTLE pour son coté rideau de fer revisité, dans une ambiance délicieusement Orwelienne à la 1984, COUNTERPART séduira à la fois les aficionados de John le Carré tout comme les fans de SF. On reste scotché aux dialogues improbables des aventures d’Howard et de son doppelganger venu « de l’autre côté » à la manière de « le monde à l’envers » de STRANGER THINGS. Un cocktail vous ai-je dit….
Bienvenu dans le monde d’Howard Silk, obscur gratte-papier dans une administration secrète de l’ONU basée en Allemagne. Cependant, Silk ( l’excellent J.K. Simmons découvert dans LAW & ORDER) n’est pas tout à fait aussi banal que son personnage le suggère, ce que démontrera un peu plus tard le déroulement de l’action de ce pilote de la série. Tout démarre par des feux d’artifice et, soudain, un type traverse une vitre et s’écrase lourdement sur le bitume, comme s’il venait de traverser d’une autre dimension à la Terminator. Sauf qu’il est bien mort et ratatiné.Tous les passants portent de masques chirurgicaux. Un commando armé de la Polizei investit l’immeuble et monte dans l’appartement où ils tombent sur un cadavre lardé de plomb. Un second cadavre dans un fauteuil est lui aussi refroidi…mais une fille est encore vivante, recroquevillée dans la douche de salle de bains. Un sac contenant de l’argent liquide est découvert…mais c’est de la monnaie qui vient de « l’autre côté »…à la FRINGE. Les deux flics embarquent la fille. Mauvaise pioche, car c’est bien elle la tueuse qui a refroidi tous ces gars. Elle égorge le premier poulet, se saisit de son arme et dégomme le second poulet avant de récupérer le sac plein de fric. Générique
Un vieux mec joue au jeu de go avec un type et perd la partie. C’est Howard. Il se lève, va prendre un train et marche jusqu’à un bâtiment officiel massif d’apparence soviétique gardé par des hommes en armes. C’est le Bureau de l’Interchange, une agence d’espionnage. Il passe le portique de sécurité de l’ONU en activant son code, puis dépose son téléphone dans un casier surveillé par des gardes. Puis il se rend dans un vestiaire où il retire montre et bijoux, placés dans un petit coffre mural blindé. Puis il se déshabille avant d’enfiler un costume gris souris à la MAN IN THE HIGH CASTLE. Il signe puis reçoit un coup de tampon officiel sur un certificat et on lui remet un attaché-case. Enfin, il attend, adossé contre un mur, comme des dizaines de ses semblables vêtus gris souris, l’ouverture d’une porte devant lui. La lumière passe au vert et les portes s’ouvrent simultanément. Dans ce minuscule bureau, une table et une chaise font face à un mur de verre. De l’autre côté pénètre un type en costume noir attaché-case à la main qui lui fait face et qui vient se placer face à lui, également sur une chaise. Chacun armé d’un coupe-papier tranche les scellés de son propre attaché-case, avant de l’ouvrir. Le sien contient un mince dossier, dans lequel on trouve plusieurs enveloppes krafts. Costume noir sort un papier bleu et le lit : « j’ai pris un chemin de traverse pour me rendre au bureau aujourd’hui ». Or, costume gris détient justement une enveloppe sur laquelle est inscrit : « j’ai pris un chemin de traverse pour me rendre au bureau aujourd’hui ». Il l’ouvre avec son coupe-papier et à l’intérieur découvre deux feuilles dactylographiées. Il commence à lire « il faisait trop chaud pour faire du vélo ». L’autre, lisant également un feuillet énonce : « Cela ne se rafraichit jamais à cette saison. ». « Ma mère adore l’hiver, mais elle vit dans le sud » réplique alors l’autre et le dialogue à la Kafka se poursuit, largement surréaliste. À la fin, chacun se lève, range ses papiers et se prépare à sortir. Un sourire échangé et ils sortent chacun par sa porte.
Howard découvre, stupéfait, son propre visage comme un doppelganger
Univers de technocrates en costumes sombres. Pesant. Howard va retrouver un rond de cuir supérieur aux fins fonds d’un bureau pour tenter d’être muté du service « Interface », où il végète depuis si longtemps, au prestigieux département « Stratègie » « Howard, cela fait 30 ans que vous êtes là, si vous aviez du être muté vous auriez déjà été muté », lui balance le rond de cuir. Comme chaque jour, il se rend à l’hôpital et apporte des fleurs à sa femme dans le coma, branchée sur des machines, et lui fait la lecture. Et le lendemain, il se rend au bureau comme à l’accoutumée. Mais en passant le portique de sécurité, son code a été désactivé. Un garde lui fait alors signe de le suivre. On le mène à une salle sombre d’interrogatoire où tournent nombre de bobines de magnétophones à bande dans une pure ambiance Orwell 1984. On lui explique qu’un type serait venu de « l’autre côté » et qu’ il ne veut parler à nul autre qu’à Howard. Et un garde conduit un type entravé par des chaines et une cagoule sur la tête. « Quoiqu’il arrive ne paniquez surtout pas ! « lui dit-on. Et, lorsqu’on soulève la cagoule, Howard découvre, stupéfait, son propre visage comme un doppelganger qui lui lance un « Salut Howard ». Puis Howard bis les alerte sur une intrusion venue « de l’autre côté », pour causer un maximum de destruction. En fait, durant la guerre froide une expérience en Allemagne de l’Est a mal tourné, ouvrant une « porte » avec un univers parallèle similaire, mais forcément altéré. Dans un club gay, le collègue d’Howard qui venait justement d’être promu au poste « stratégie » drague un jeune homme…qui l’entraine dans les back-rooms où la tueuse de tout à l’heure lui tire deux balles dans la tête. Booom ! Kaboom ! Dans le même temps, l’alter ego d’Howard regagne l’autre côté en passant une frontière comme dans un aéroport. Plus tard, les deux Howard se retrouvent à nouveau réunis. De l’autre coté une guerre politique fait rage, faction contre faction, suggérant que cela peut avoir un rapport avec la venue de cette tueuse professionnelle. En fait, l’autre Howard est un chef espion au sein de la Section 2, spécialisée dans les opérations d’infiltration « de l’autre côté ». Il pense qu’ils vont s’en prendre à la femme d’Howard, Emily pour l’atteindre lui. Rythme lent, presque séquencé, COUNTERPART ne peut laisser indifférent, tant la série pousse au maximum le jeu subtil de ce théâtre de l’absurde. Les costumes et les décors rétro-futuriste contribuent à nous plonger dans un climat qui ressemble un peu à celui du film « La taupe » inspirée du roman de Le Carré. Produite pour la chaine Américaine Starz, cette première saison de COUNTERPART ne comptera que 10 épisodes, mais au vu des 100% de satisfecit accordés par Rotten Tomatoes on peut parier qu’une seconde saison sera bientôt tournée, comme la précédente, entre Berlin et LA.