BOB DYLAN ILLUMINE LE GRAND REX
C’était hier soir, sous le plafond rococo étoilé du Grand Rex, Bob Dylan était à l’affiche pour une époustouflante performance d’un rock poète prophète de 81 printemps durant presque deux heures d’un show aussi laid-back qu’émotionnel où il aura, entre autres, interprété 9 des 10 compositions de son petit dernier, le flamboyant « Rough and Rowdy Ways » et su nous captiver par une set-list aux antipodes du « Best Of… » composée de titres majoritairement publiés entre 67 et 71, marquant ainsi toute sa différence d’un show-biz juke box bien trop souvent obnubilé par les hits.
Exact comme un coucou suisse, il est exactement 20 : 30 lorsque Bob Dylan accompagné de ses cinq musiciens, Bob Britt guitare, Charley Drayton batterie, Tony Garnier basse, Doug Lancio guitare et l’homme-orchestre Donnie Heron accordéon, violon, mandoline électrique, lap steel guitar et pedal steel guitar, investit le Grand Rex dans la semi pénombre, un éclairage particulièrement soft qui donne au show une ambiance intimiste façon « cabaret » . Car la totalité des lights éclaire par le sol, d’abord le grand rideau tendu derrière les musiciens, qui les fait apparaitre en silhouettes, presque des ombres chinoises avant que la scène elle-même ne se transforme en vaste damier lumineux. S’il n’était pas allumé uniquement de blanc, il ressemblerait à la piste de danse de Travolta dans « Saturday Night Fever », cependant bien entendu l’analogie s’arrête là. Notre Zim’ s’installe derrière son piano, tandis que ses musiciens s’amusent à interpréter quelques notes du classique « Oh Susannah »… qui se fond dans la première chanson « Watching the River Flow », un titre de 71 composé avec la complicité de Leon Russell , un des inédits qui ouvrait son « More Bob Dylan Greatest Hits ». Cependant, cette version donne la couleur du show qui se déroule devant nous, porté par un son particulièrement « laid back » pour un folk blues résolument sudiste qui nous transporte dans un bayou imaginaire où Dylan va nous entrainer tout au long de ce concert. Une autre composition « When I Paint My Masterpiece » est également extraite de ce « More Bob Dylan Greatest Hits »… ce qui constitue un sacré clin d’œil de la part de notre Zim’, car contrairement à l’écrasante majorité des artistes et groupes, dont toutes les set-lists de concerts prennent systématiquement la forme d’un « Greatest Hits »- on songe aux Stones notamment- Bob Dylan, comme toujours à contre-courant semble fuir ses propres hits comme la peste. Ici pas de « Lady Lay », pas de « Like A Rolling Stone » ni de « All Along the Watchtower » ou de « Blowin’ In the Wind ».
La seule et unique concession « tubesque » sera le « Gotta Serve Somebody » de son « Slow Train Coming » de 79 ! Et si l’on pouvait douter de la détermination du maitre à imposer ses convictions à son public, le choix de chanter neuf des dix titres de son dernier CD- seule la bluesy « Crossing the Rubicon » sera oubliée ce soir- fait preuve d’une rare bravado. Franchement, je ne connais pas un seul artiste de son pédigré qui ait les roustons d’imposer ainsi sa dernière œuvre au détriment de son vaste catalogue de tubes. Et autant, pour l’avoir vu souvent en concert, il fut un temps où Bob Dylan prenait un plaisir sadique à bouleverser ses arrangements, au point de rendre ses chansons absolument inidentifiables, sauf peut-être à un moment où un petit bout de refrain nous éclairait enfin sur ce qu’on était en train d’écouter. Rien de tout cela ce soir où notre Zim chante comme jamais, avec une émotion appuyée et un feeling illimité. Presque un crooner, en tout cas pour nous l’ivresse d’assister à une magnifique performance et tout le frisson d’observer un Prix Nobel de Littérature au sommet de son art. Entre chaque morceau, le maitre se lève pour saluer son public sous un tonnerre d’applaus. Et on mesure tout le privilège de le voir ainsi évoluer dans un cadre aussi intime et précieux que ce Grand Rex… lequel aura rarement été aussi …grand ! A l’entrée de la salle, dans la queue avec moi, un petit couple de trentenaires se photographient l’un l’autre. Je leur propose de faire une photo d’eux et on engage la conversation. Ils sont Brésiliens, de Rio et fans du Zim’. Ils ont traversé l’Atlantique et passé une semaine à Paris uniquement pour voir Dylan et c’est juste craquant. De même, dans la salle derrière moi, deux jeunes filles ados accompagnent un monsieur âgé: elles sont soeurs et trop mignonnes accompagnent leur grand-père à ce concert où elles l’ont invité pour son anniversaire. Et c’est bien là tout le pouvoir du Zim’, tisser un lien indéfectible entre les générations par la force de sa musique. Près de deux heures de show, 17 chansons enchainées sans entracte ni rappel, après plus de TROIS MILLE concerts de son Never Ending Tour démarré en 1988, notre héros Marathon man Bob Dylan demeure à jamais stratosphérique, la preuve par ce magnifique Grand Rex.
happy for you . , donc a te lire , sans compromis ………..comme toujours , le meilleur ou le pire , TOP