DREAM THEATER « Parasomnia »

Dream TheaterDans la galaxie du rock progressif, il y a les groupes qui vieillissent. Et puis il y a ceux comme Dream Theater qui osent se réinventer. Avec une durée de 71 minutes répartie sur huit titres, « Parasomnia » explore les troubles du sommeil à travers une musique technique et immersive. Le retour de Mike Portnoy le batteur historique absent depuis 2009, n’y est pas pour rien. Et autant vous dire que ça s’entend… assure le sans doute déjà sourd JCM.

Dream TheaterPar Jean-Christophe MARY

 

Il fallait s’y attendre. Après trois décennies à sculpter le métal progressif avec la minutie de maîtres horlogers, les Dream Theater n’ont plus rien à prouver et c’est précisément pour cela qu’ils osent, qu’ils expérimentent, qu’ils rêvent. « Parasomnia », leur nouvel album studio est un voyage au cœur du sommeil perturbé, une plongée sans oxygène dans les méandres du subconscient. Dès l’ouverture, « The Arms Of Morpheus » démarre en douceur par une longue introduction instrumentale, une texture musicale planante où se mêlent guitares pastorales et claviers éthérés. On dirait du Pink Floyd sous sédatif. Pas de démonstration, juste une ambiance qui installe d’emblée la thématique du disque. Le véritable choc arrive avec le titre suivant Night Terror. Illustrant les terreurs nocturnes, le riff est lourd, sombre, intense digne du meilleur de « Train of Thought » (2003) même si la structure labyrinthique, entre passages calmes et montées en tension, rappelle le cauchemardesque « Scenes From a Memory » (1999). Jordan Rudess triture ses claviers tel un Jon Lord sous acide quand James LaBrie y livre l’une de ses meilleures performances vocales depuis des années : dramatique, tendue, presque théâtrale. Le refrain hante l’oreille bien longtemps après l’écoute. Avec sa mélodie poignante et ses paroles introspectives, « A Broken Man » revient sur des terres plus émotionnelles. John Petrucci signe l’un de ses solos les plus mélodiques depuis « The Spirit Carries On ». Ce morceau, qui flirte avec le néo-progressif, tranche par sa sincérité en font l’un des titres les plus touchants de l’album. Avec ses 11 minutes au compteur « Dead Asleep alterne entre passages calmes et explosions sonores. Hypnotique, répétitif, lancinant, il symbolise les phases du sommeil profond, oscillant entre sérénité et chaos. Jordan Rudess s’y amuse avec des sons de cloches et d’horloges, comme si il illustrait la bande-son du sommeil paradoxal. Le break central est un sommet de virtuosité. On pense à Tool, à Opeth, et bien sûr à Pink Floyd dans ses moments les plus psychédéliques.

Dream TheaterMid-tempo groovy, basse grondante, riff haché à la Metallica et harmonies vocales gospel en fond sonore, l’énergique « Midnight Messiah » mêle rythmes complexe. Avec son refrain accrocheur conçu pour être repris dans les stades, ce titre injecte une bonne dose d’adrénaline et de dynamisme au milieu de l’album. Co-écrit avec le batteur Mike Portnoy, il sonne comme un hommage à l’époque « Six Degrees of Inner Turbulence » (2002).  Interlude instrumental joué à l’orgue, « Are We Dreaming » est une pause contemplative entre rêve et réalité, un sas de décompression avant les deux derniers titres. Polyrythmies, mesures asymétriques, ruptures de rythmes, ralentis expressifs ou roulements de fûts à gogo, « Bend The Clock » combine les éléments progressifs et mélodiques propre à Dream Theater. La guitare floydienne de Petrucci groove comme jamais, le clavier de Rudess grince quand la voix de LaBrie flotte sur la bande son avec une légèreté inhabituelle. Du Dream Theater tel qu’on l’aime. Clôturant l’album « The Shadow » Man Incident nous embarque pour un voyage musical peuplé de montagnes russes émotionnelles. Ce mini opéra de 20 minutes convoque tout l’arsenal du groupe — virtuosité, lyrisme, complexité — pour raconter une histoire de paralysie du sommeil et d’entités tapies dans l’ombre. Les envolées instrumentales angoissantes alternent avec des moments de pure terreur sonore, entrecoupé d’accalmies jazz, de solos en cascade qui se conclue sur un final apocalyptique. Le final, à la fois tragique et libérateur, conclut ce voyage comme un réveil en sursaut. Rarement Dream Theater n’aura sonné aussi … théâtral ! Plus qu’un album concept « Parasomnia » est une exploration du subconscient mise en musique par des artisans orfèvres talentueux. Dans cette expérience immersive sensorielle, le retour de Mike Portnoy redonne une tension organique que l’on croyait perdue. On attend le live avec impatience pour vivre pleinement et intensément au théâtre ce soir !

 

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