OCTOBRE « Next Year in Asia »
Voici 41 ans dans BEST GBD explorait l’après-Marquis de Sade avec ce premier mini-album d’Octobre, la formation de Frank Darcel. Certes quelque peu distant, ce « Next Year In Asia » qui captive néanmoins par la puissance de son funk passé à la chaux-vive et ouvre la voie à l’extraordinaire parcours jusqu’ à nos jours de ce guitariste rennais surdoué qui inventera ensuite Senso puis Republik puis Marquis écrivant ainsi parmi les plus belles pages de l’histoire du rock hexagonal. Flashback…
Je n’ose plus vous présenter Frank Darcel pour avoir déjà si largement documenté ici et ailleurs les si nombreux faits d’armes de ce guitariste- auteur-chanteur-compositeur-arrangeur-producteur héros de scène rock hexagonale ( Voir sur Gonzomusic https://gonzomusic.fr/?s=Frank+Darcel ). Cependant au printemps 1982, le rennais tourne officiellement la page de Marquis de Sade avec le lancement de sa nouvelle formation baptisée de ce patronyme calendaire d’Octobre. De son coté, Philippe Pascal ( Voir sur Gonzomusic https://gonzomusic.fr/?s=Philippe+Pascal+ ) avait déjà monté son vibrant et émotionnel Marc Seberg. Pus funk, sans doute un poil plus pop, mais toujours hanté par ses racines punks new-yorkaises Octobre la nouvelle créature sonique du rennais arrive sans doute trop tôt pour un public hexagonal qui ne saura guère l’apprécier à la hauteur de sa créativité. Quatre décennies plus tard, le son d’Octobre défie pourtant le temps et ce « Next Year in Asia » le prouve de manière cinglante…
Publié dans le numéro 164 de BEST
Et à ton avis, le meilleur de tous ? Téléphone ? Taxi Girl ? Trust ? Starshooter ? Rien de tout cela, répond le rock computer miroir, le meilleur, c’est Marquis de Sade. Ouais, mais MDS s’est fait « seppuku » en avril dernier et le cadavre est encore tiè-dé : le public français est de cette race de gens qui ne sont capables de chérir que ce qui leur file entre les doigts. Dommage. Octobre, c’est MDS retranché de son chanteur, Philippe Pascal. Eric Lanz, un Parisien, a pris la suite derrière le micro. Il chante juste, mais il est loin de posséder le magnétisme pascalien qui irradiait le groupe d’une manière si inquiétante. Sur « Rue de Siam », le second MDS, « Submarines and Icebergs » achevait la face deux comme un symbole, un pont jeté à travers le brouillard vers l’autre rive… Pour Darcel et ses copains, l’autre rive, c’est un groupe qui ne connaît pas de leadership bicéphale, le tiraillement entre deux pôles de personnalités qui rongeait le Divin Marquis comme un cancer ( and drugs) virulent. Du coup, la musique d’Octobre parait plus apaisée, moins torturée ; ses racines s’étirent et plongent jusqu’aux entrailles des grandes métropoles : New-York, Paris ou Berlin, peu importe, de toute façon, elles reflètent un funk urbain, presque universel. « Next Year in Asia » est un « albumette » de six chansons, en anglais et en français, bourré de qualités. D’abord, cet « Acteurs » qui est de loin mon titre préféré à cause de sa mélodie en froide transparence. Il y a aussi « Nastassja » dont le beat et la trompette me rappellent assez le son Material, malgré des claviers bien plus techno-funk et insulaires. Pourtant, j’avoue avoir du mal à me faire complètement à cette musique. Il y a l’accent un peu contestable d’Eric lorsqu’il chante en anglais. Mais ce qui me gêne surtout dans la musique d’Octobre, c’est son côté distanciation qui se pose grand comme un iceberg : comment se reconnaître dans un album aussi beau, mais hélas si froid ? Ce qui manque au groupe, c’est une dimension plus humaine, une présence qui saurait se faire plus forte que les ficelles et les simples effets de style. « Next Year in Asia » est un titre idéal pour un album chargé d’espoir ; d’ici là, Octobre apprendra peut-être à briser la glace.
Publié dans le numéro 164 de BEST daté de mars 1982