MORT D’UNE ICONE DE LA FRENCH POP
« Maman est partie » suivis de 14 cœurs, un peu comme on tire 96 coups de canon pour la mort d’Elizabeth II, c’est par ces terribles trois mots que Thomas Dutronc a annoncé la disparition de sa maman Françoise Hardy à 80 ans, terrassée par une longue, terrible et insupportable maladie. Bien entendu tous les garçons et les filles de notre âge, et bien d’autres, ont la larme à l’œil à l’annonce de la mort de la dernière icône au féminin de la French pop des 60’s.
Sur la photo précédente de son compte Instagram, postée voici quatre jours il fait encore le beau gosse insouciant, repostant une superbe photo de lui-même faites par Gilles Marie Zimmermann pour Paris Match. Et tout cela semble si normal et dérisoire face à sa publication d’aujourd’hui, ce si sobre et douloureux « Maman est partie ». Immense icone pop depuis son tout premier hit des sixties, elle avait su séduire Mick Jagger lorsqu’elle n’avait que Dutronc dans les yeux. Désormais, après les départs de presque tous ses pairs, de Gainsbourg à Berger, en passant par France Gall, Joe Dassin ou Jane Birkin, malgré l’adversité, Françoise Hardy ( Voir sur Gonzomusic FRANÇOISE HARDY « Quelques titres que je connais d’elle Vol 1 et 2 » ) était toujours parmi nous, droite comme un I, aussi élégante que discrète et cette sensation de froideur et de distance qu’elle pouvait inspirer. J’ai croisé une seule fois Françoise Hardy, c’était en 1998 lors de l’enregistrement de l’album « A la légère » de Jane Birkin où de nombreux artistes tels que Souchon et Voulzy, Alain Chamfort, MC Solaar ou encore Etienne Daho avaient chacun composé une chanson. C’était le tout premier disque de Jane où elle ne chantait pas du Gainsbourg, un vrai challenge pour elle, comme une sensation de se jeter dans le vide. Françoise Hardy comptait justement parmi les contributeurs et ce 19 Mai, elle débarque avec son compositeur de la chanson “La pleine Lune” dont Françoise Hardy a écrit les paroles. J’avais suivi toutes les sessions de l’enregistrement pour réaliser un documentaire qui servirait d’EPK au disque. J’avais parallèlement à mes tournages tenu un carnet de bord et voici ce que j’avais écrit à l’époque :
14h 15 Jane enregistre la seconde chanson composée par Gérard Manset, la troublante “Voyage au bout de la nuit”.
15h 05
Arrivée de Françoise Hardy et de son compositeur Alain Lubrano. Jane s’est esquivée pour aller chercher le déjeuner.
15h 12
Retour Jane.
“Coucou… j’ai entendu que tu étais là; je me suis préoccupée de choses très médiocres…comme la bouffe…”
Elle tend un financier à Philippe : “tiens toi qui ne voulait rien….”
“ce sont ces petits riens…. comme dirait Françoise” plaisante Philippe.
“Je suis venue avec le compositeur de la chanson, mais il a disparu avec Dominique ( Blanc-Francard) pour visiter le studio”, explique Françoise, “Tous les trois nous avons très souvent travaillés ensemble.”
Retour d’Alain Lubrano et présentation à Jane.
15h 19
Françoise Hardy découvre pour la première fois la version de Jane de sa chanson “La pleine Lune” et son inquiétant climat entre loups-garous et trip-hop.
“Ça va ?” demande Jane lorsque la bande s’arrête.
Rires un peu nerveux de Françoise.” C’est tellement différent…”
“Je trouve cela très bien, moi”, ose l’interrompre Alain Lubrano.
“…c’est surprenant. J’aurais besoin de l’écouter plusieurs fois pour m’habituer, c’est si éloigné de l’esprit original » poursuit Françoise. Dans le refrain, quand ça arrivait il y avait un balancement un peu magique qui faisait évoluer la chanson d’une autre manière. Il me faut un peu de temps pour m’y faire.”
“C’est plus risqué… au moins on aura sauté à l’eau” réplique Jane et Philippe d’ajouter : “… moi je pense que le vrai risque…c’est de ne pas en prendre”
15h 49 bises et départ de Françoise et d’Alain Lubrano… trente minutes chrono et un sentiment de courant d’air. Fabuleuse et distante, c’était tout elle. Pensée à Jacques Dutronc et à son fils Thomas.
Quant à nous, le public, elle nous laisse en héritage tous ses « Message personnel » et même « L’amour en privé ». Alors, forcément un jour tel que celui-ci, on pense à ce duo sublime avec Etienne Daho « Si je m’en vais avant toi »… à moins que cela ne soit plutôt « Comment te dire adieu »… so long Françoise Hardy….