LIKE A SEX MACHINE
Voici 42 ans dans BEST GBD n’hésitait pas à dévoiler toute l’intimité d’une troublante et black machine sexuelle qui allait alors s’inviter le samedi soir sur la deuxième chaine de la télévision, sous la bannière « Les enfants du rock ». Il voulait bien entendu évoquer le « Sex Machine » de l’Orchestral Manœuvre in the Black et du futé Dionnet, unique vecteur de la funkitude agitée sur tout l’espace télévisuel hexagonal et son titre en forme d’hommage au godfather of soul-music Mister James Brown. Let’s groove et flashback…

Manoeuvre Dionnet & Fifi
Je sais que beaucoup d’entre vous cultivent, à juste titre, une certaine nostalgie de « Les enfants du rock » ce brillant et sonic concept fourre-tout inventé par Pierre Lescure qui vous aura en partie servi d’éducation musicale. Cet été 83 Christian Lebrun, le Rédac Chef me confie une VHS de la prochaine émission télé de Jean Pierre Dionnet et de Philippe Manœuvre, qui œuvraient ensemble aux destinés du mag Metal Hurlant, pour que j’écrive un avis critique. Comme j’adorais ces musiques et ces artistes, sur lesquels d’ailleurs j’écrivais pour la plupart, je n’avais guère eu à me faire prier pour accepter la mission. Certes après avoir visionné ce premier épisode de « Sex Machine » je trouvais que le côté « animation-présentation » prenait un peu trop de temps d’antenne par rapport à la musique, mais je ne devais pas être très objectif car de la moitié des 80’s à la fin des 90’s la plupart des émissions télé sur lesquelles j’ai bossé avaient remplacé le présentateur par une simple voix off ( « Ramdam », « Megamix » ou encore « Buzz Tee Vee », par exemple) justement pour gagner en musique contre la tchatche superflue. Mais c’est encore une un autre débat et par conséquent une autre histoire du rock.
Publié dans le numéro 178 de BEST sous le titre :
GET UP !
Noir. Funk Energie. A l’heure où les rock clips squattent les écrans T., où sont passés les Wonder ( Voir sur Gonzomusic https://gonzomusic.fr/?s=Stevie+Wonder ), les Prince ( Voir sur Gonzomusic https://gonzomusic.fr/?s=Prince ), les Chic ( Voir sur Gonzomusic https://gonzomusic.fr/?s=Chic ),, les Ross ? Dans la rue, sur les FM, dans les clubs, les apparts, dans les caisses, les rythmes noirs cassent les fessiers blancs. Grâce à Manœuvre-Dionnet « Les Enfants du Rock » s’engagent enfin sur la funkitude ; le 21 avril, Antenne 2 balance Sex Machine, un show vidéo zébré de sketches. Groovy or not ? Pour s’en assurer, la VHS de l’émission a été visionnée par 258 blacks et moi. « Ah, man, cette programmation ! » : Paul, un jeune Antillais, grimpe aux rideaux, dès que James, le Parrain, apparaît au générique. Lorsque nos duettistes rock et B.D. surgissent en SECAM, il se retrouve sur le cul « Man, ces mecs, c’est du p’tit lait. » Heu, n’exagérons rien. On peut se laisser emporter par le funk sans avoir poussé ses premiers cris dans un hôpital du Bronx. Manœuvre dans ses papiers, comme d’autres critiques rock, a toujours défendu la négritude speedée. Mais la funk-tendance à travers le regard rock parait un peu castrée. Où sont l’énergie, le feeling, l’enthousiasme ? Lorsqu’un rocker parie rock, il est passionné. Lorsqu’il soule, on dirait que c’est seulement du bout des lèvres ! Sex Machine se présente comme un caméo de clips, une mini- histoire qui intègre des vidéos. Le « Sex », en l’occurrence, est une boîte de nuit qui ressemble comme une sister au R and R Circus. Manoeuvre et Monnet clownent entre les clips en tentant par tous les moyens de forcer l’entrée et inlassablement se font jeter par gros-Fifi, le Master Videur ( c’est justement le même Fifi qui servait de garde du corps à Serge Gainsbourg le jour de l’acquisition aux enchères de son fameux manuscrit original de « La Marseillaise » de Rouget de Lisle : NDR) .

Fifi & Serge le jour de la vente de « La Marseillaise »
Heureusement, les pop (je devrais dire funk) promos sont souvent somptueuses : Grandmaster Flash « The Message », c’est « Greetings from NY », Marvin Gaye« « Sexual Healing » ou le retour du Diable noir ( Voir sur Gonzomusic ) ; E, W & F « Let’s Groove », Prince et ses girls Vanity 6, Junior, Michael Jackson « Billy Jean » et Chagrin d’Amour chantant « Sex Machine » sur la scène du Circus. Instant doré et sacrée James Brown live et une étonnante leçon de danse où il dévoile tous ses plans de gigolo. Boogaloo, Funky Chicken, Robot, Mashed Potatoes : le Godfather décompose tous les mouvements. L’une de ces danses s’appelle d’ailleurs Soul Train, une référence à l’émission Black mythique de la télé américaine où sont passés tous les dieux ébènes du r’n’b, de la soul, du funk ou du disco. Certes, Manœuvre n’est pas Don Cornelius, « Sex Machine » n’est pas « Soul Train », ne rêvons pas. Lorsque Junior finit sa chanson, il présente les deux danseuses qui l’accompagnent : « These ladies are great but James Brown is better… » et on enchaîne sur James C’est rapide, net et sans bavure. Idéal. Pourtant les sketches ne sont pas dénués d’humour, ils sont juste un peu déplacés. Dans le montage de l’émission, la présentation rogne souvent les intros des vidéos. Pour les copains africains et antillais, 20 secondes en moins de Marvin Gaye ou de Prince, pour 20 secondes d’humour rock, c’est de la provoc. Les seuls Noirs qui passent sont décoratifs : funkeurs ou roller skateurs, ils n’ont pas l’occasion de placer deux mots. Mais le funk n’est pas une propriété privée noire. « Sex Machine » m’a bien éclaté dans ses vidéos. Le côté condescendant de Philippe Manœuvre peut être mis sur le compte de l’humour, à un degré ou un autre. Si vous l’ampexez, vous aurez toujours le loisir de jouer avec le bouton forward du magnétoscope. Quant au direct, man, c’est une autre histoire. Check it out !
« These guys are great but black is better l
Publié dans le numéro 178 de BEST daté de juin 1983