LE RETOUR DU PROPHÈTE DYLAN

IBob DylanIl sort ENFIN de son silence, avec la chanson la plus bouleversante entendue depuis longtemps, la plus belle composition sur la « tragédie de Dallas » depuis le troublant « The Day John Kennedy Died » de Lou Reed. Intitulée « Murder Most Foul », chargée à bloc de références musicales politiques et culturelles, sous son titre emprunté à « Hamlet », cette première originale de Bob Dylan depuis huit ans arrive à point nommé dans cette drôle de guerre contre l’ennemi invisible histoire de nous remettre les neurones en place.

Murder Most FoulRecord battu…il est passé de 16 minutes et 31 secondes, avec « Highlands »,  extraite de son album « Time Out Of Mind » de 1997 jusqu’à ce prodigieux « Murder Most Foul » de 16 minutes et 56 secondes, une chanson consacrée à l’assassinat de JFK…mais pas que. Ce nouveau titre, s’il faut en croire Dylan, aurait été enregistré « il y a un certain temps ». Mais, depuis  « Rolling Thunder Revue : A Bob Dylan Story » peut-on croire tout ce que dit Dylan ?

Des années durant, les aficionados du Zim’ ont vénéré  ce qui était alors la plus longue chanson qu’il n’ait jamais publiée, « Highlands », un titre de1997 qui s’étendait sur 16 minutes et 31 secondes. Aujourd’hui, 23 ans plus tard, tandis que l’horloge a sonné minuit, heure de la côte est US, ce vendredi matin (5 heures du mat à Paris : NDR), Dylan a posté une nouvelle chanson, « Murder Most Foul », portée par l’assassinat du président John F. Kennedy, qui hante tant les Boomers – et bien d’autres- depuis 1963. Où étions-nous lorsque Kennedy a été assassiné ? Chacun s’en souvient encore aujourd’hui. La nouvelle chanson était accompagnée d’un petit texte de notre prix Nobel de littérature ( Voir sur Gonzomusic  https://gonzomusic.fr/?s=Dylan+nobel  ) :

« Salutations à mes fans et à mes disciples, avec gratitude pour tout votre soutien et votre loyauté au fil des années. Voici une chanson inédite, que nous avons enregistrée il y a quelque temps et que vous pourriez trouver intéressante. Restez en sureté, restez attentifs et que Dieu soit avec vous.

Bob Dylan »

DylanLa voix éraillée de Dylan est posée sur un coussin minimaliste de violon, de piano et de percussions à peine perceptibles, pour une chanson juste irrésistible, une composition inédite dont on tombe immédiatement amoureux. Amoureux mais transi… son dernier album de compos originales, « Tempest », date de 2012, bien qu’il ait publié depuis trois CD de ses reprises de chansons du Great American Songbook, la dernière étant le triple album « Triplicate » d’il y a trois ans. Ce nouveau titre si shakespearien annoncerait-il enfin un tout nouveau Bob Dylan ?  En attendant, les paroles de ce morceau monumental vont sacrément donner du grain à moudre aux fans. Car à travers le prisme de l’assassinat de Kennedy, comme un « Hamlet » moderne, ( la chanson tire d’ailleurs son titre d’une citation de la fameuse tragédie Acte 1 Scéne 5)  Dylan, déroule le fil d’Ariane de notre culture pop, celle qui a su si bien nous façonner, entre Dieu (Woodstock) et diable (Atalmont). Enchainant les slogans et les titres de chansons. Il chante « The Beatles are coming, they’e gonna hold your hand » référence directe à l’arrivée des Beatles aux USA début 1964 comme une antidote au poison tonique de la dépression ambiante qui règne depuis Dallas; il cite « Ferry Across the Mersey » de Gerry and the Pacemakers, Woodstock et « The Age of Aquarius » des hippies de « Hair » avant de passer à « Tommy Can You Hear Me » et «  The Acid Queen ». Dylan remonte également le temps au-delà des années 60. Jusqu’à « Autant en emporte le vent » modifiant le « Frankly my dear, I don’t give a damn » de Clark gable à Vivien Leigh en « Franchement Mlle Scarlett, je m’en fous ». Et notre prophète rock d’enchainer les citations: Lindsey Buckingham et Stevie Nicks, Don Henley et Glenn Frey, Dickey Betts de l’Allman Brothers Band, « Only the Good Die Young », « Nightmare on Elm Street », Buster Keaton, Harold Lloyd, Art Pepper, Oscar Peterson, Stan Getz, « Charlie Parker et tout ce bazar, Nat King Cole, Marilyn Monroe, John Lee Hooker, Wolfman Jack, Patsy Cline, Houdini, « Wake Up Little Suzy », « Let the Good Times Roll », « The Old Rugged Cross », « Down in the Boondocks », « The Merchant of Venice », « Memphis in June », « Moonlight Sonata », « Play Misty for Me », « Lonely at the Top » et « Lonely Are the Brave ». ” What a genius juke-box !

 

DylanCependant, Bob Dylan veut que nous soyons plus performants que des éponges et il s’évertue à semer ses indices pour faire tourner nos cerveaux qu’il doit juger trop souvent passifs ces jours-ci. Alors, le Maitre remixe lexicalement ses références à la culture pop et à l’assassinat, de JFK, comme lorsqu’il chante « You got me Dizzy Miss Lizzy, you fill me with lead ».  Quant à l’assassinat proprement dit, Dylan peut se révéler cruellement journalistique : « Ils lui ont explosé la tête alors qu’il était encore dans la voiture », chante-t-il dans le premier couplet. Avant de dépeindre la fuite frénétique de la Cadillac présidentielle loin du carrefour de la mort de Dealey Plaza, racontant même à la première personne du singulier le point de vue du Président défunt: « Je suis sur le siège arrière à côté de ma femme / Et c’est tout droit dans l’au-delà / Je me penche à gauche, j’ai la tête sur ses genoux… » Il donne aussi des détails glaçants qui suivent le décès, comme « Johnson a prêté serment à 2h38 ».  Il prend également le point de vue des assassins des Kennedy – ou, selon lui, des agresseurs – vocalisant des répliques provocantes comme « Nous avons déjà quelqu’un ici pour prendre votre place » (Johnson ?) , ou, à propos des frères de Kennedy, le glaçant « nous les aurons aussi ». En ces temps confinés, le Zim’ a mille fois raison de s’étendre sur cette prophétie de près 17 minutes, un bonheur pour la tête et le cœur que nous n’avons pas fini de méditer… et de passer à la moulinette de nos exégèses persos.

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