Bob Dylan se confie au NY Times et soutient #BlackLivesMatter

Rough & Rowdy DylanSi l’on pouvait encore douter que Bob Dylan soit un prophète du 21éme siècle, entre les révélations de son interview exclusive accordée au New York Times et le choix si particulier du 19 juin, véritable déclaration de soutien en faveur de #BlackLivesMatter, pour publier son nouvel album « Rough and Rowdy Ways » (Des chemins cahoteux et difficiles), notre Zimmerman à 79 ans n’a décidément pas fini de prouver qu’il est toujours aussi absolument bluffant.

DylanComment, en une simple date de sortie d’album, commenter de manière si adéquate le maëlstrom de l’époque que nous traversons actuellement ? C’est facile, il suffit juste d’être Bob Dylan ! C’est mon brother Zak Alister qui m’a éclairé sur toute la symbolique de cette date du 19 juin, plus communément appelée « Juneteenth » aux USA (contraction de june/juin et de nineteenth/19). Car elle commémore le 19 juin 1865, date à laquelle le général de l’Union Gordon Granger a lu des ordres fédéraux à Galveston, Texas, selon lesquels tous les peuples précédemment réduits en esclavage au Texas étaient enfin libres. Car même si la Proclamation d’Émancipation les ait officiellement libérés près de deux ans et demi plus tôt, et que la guerre civile américaine se soit largement terminée avec la défaite des États confédérés, le Texas était le plus éloigné des États esclavagistes confédérés, avec une trop faible présence de troupes de l’Union, de sorte que l’application de la proclamation avait été carrément mise sous le tapis. Au 21e siècle, le 19 juin est célébré dans la plupart des grandes villes des États-Unis. Les militants des droits civils font d’ailleurs toujours pression sur le Congrès pour que le 19 juin soit enfin reconnu en tant que fête nationale. Dans 47 des 50 États, le 16 juin est reconnu comme une fête d’État. Pour mémoire, Donald Trump avait d’abord lui aussi choisi cette date pour tenir à nouveau un mega-meeting pour sa campagne présidentielle et de plus à Tulsa, en Oklahoma. Or et le choix de la date, qui commémore la fin effective de l’esclavage aux USA ET le lieu, Tulsa où en 1921 plus de 300 Afro-Américains qui célébraient cette fête avaient été massacrés par des blancs suprématistes, une horreur, sont loin d’être innocents. Face au tollé général, Donald Trump a dû repousser son meeting d’un jour. Et c’est précisément ce jour-là, « juneteenth » que Bob Dylan a choisi pour publier son « Rough and Rowdy Ways » (Des chemins cahoteux et difficiles), dans l’écho des manifestations #BlaclLivesMatter après l’assassinat de George Floyd par un policier blanc de Minneapolis ou comment peser sur le débat politique actuel par un choix de calendrier si judicieux… sacré Zim’ !

Parallèlement, voici trois jours, fait aussi rare que remarquable, Bob Dylan avait accepté de répondre aux questions de Douglas Brinkley, titulaire de la chaire Katherine Tsanoff Brown en sciences humaines et professeur d’histoire à la Rice. University, qui est aussi l’auteur de « American Moonshot »: John F. Kennedy and the Great Space Race ».

DylanPour faire écho à la mort de George Floyd, Brinkley dans son intro rappelle cette strophe de « Hurricane » en 1976 : « Dans Paterson, c’est comme ça/Si vous êtes noir, autant ne pas vous montrer dans la rue/ A moins que vous ne cherchiez les ennuis. ». Puis il nous fait partager sa conversation avec Dylan un jour après que Floyd ait été tué à Minneapolis. Il précise : « Visiblement secoué par l’horreur qui s’était produite dans son pays, il avait l’air déprimé. « Ça m’a rendu malade de voir George torturé à mort comme ça », a-t-il déclaré. « C’était plus que moche. Espérons que la justice sera rendue rapidement pour la famille Floyd et pour la nation. ». Dans cet entretien passionnant, puisque le prix Nobel de Littérature cite les Eagles et les Stones dans ce nouvel album, on apprend aussi quelles sont ses chansons favorites des deux groupes, soit « New Kid in Town », « Life in the Fast Lane », « Pretty Maids All in a Row ». Ça pourrait être l’une des meilleures chansons de tous les temps. » dit-il au sujet des Eagles  et « Angie », « Ventilator Blues » et quoi d’autre, laisse-moi voir. Oh oui, « Wild Horses » pour les Stones. Toujours interrogé sur sa brillante « I Contain Multitude » où il cite Anne Frank à côté d’Indiana Jones , Dylan réplique :

« Son histoire est très importante. Elle est profonde. Et difficile à articuler ou à paraphraser, surtout dans la culture moderne. Tout le monde a une capacité d’attention très réduite. Mais vous sortez le nom d’Anne de son contexte, elle fait partie d’une trilogie. On pourrait tout aussi bien se demander : « Qu’est-ce qui vous a décidé à inclure Indiana Jones ou les Rolling Stones ? » Les noms eux-mêmes ne sont pas solitaires. C’est la combinaison de ces noms qui donne quelque chose de plus que leurs parties singulières. Il n’est pas nécessaire d’entrer dans les détails. La chanson est comme un tableau, on ne peut pas tout voir d’un coup si on se tient trop près. Les morceaux individuels ne sont qu’une partie d’un tout. ». On apprend, entre autres que Dylan affectionne de composer dans des chambres d’hôtel. Enfin, Douglas Brinkley le questionne sur la crise planétaire que nous traversons, lui demandant s’il juge cette pandémie « en termes presque bibliques » ?  

La réponse de Bob Dylan est éloquente :

« Je pense que c’est un signe avant-coureur de quelque chose d’autre à venir. C’est une invasion, c’est sûr, et c’est très répandu, mais biblique ? Vous voulez dire comme une sorte d’avertissement pour que les gens se repentent de leurs méfaits ? Cela signifierait que le monde est en attente d’une sorte de punition divine. L’arrogance extrême peut entraîner des sanctions désastreuses. Nous sommes peut-être à la veille de la destruction. Il y a de nombreuses façons de penser à ce virus. Je pense qu’il faut juste le laisser suivre son cours. »

L’intégralité de ce brillant entretien est à suivre sur le site du New York Times

https://www.nytimes.com/2020/06/12/arts/music/bob-dylan-rough-and-rowdy-ways.html?smid=em-share

 

 

Vous aimerez aussi...

2 réponses

  1. Yazid Manou dit :

    Ce 19 juin 2020 est aussi la date de sortie du « nouvel » album d’un certain…Neil Young (74 ans). « Homegrown » disque dont la sortie fut soudainement annulée par l’artiste et très attendu par tous ses fans depuis 45 ans.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.