STEPHAN EICHER PAR SÉBASTIEN BATAILLE
De ses origines tziganes à son dernier CD, le lumineux « Ode » en passant par sa discographie intensive, ce « Stephan Eicher », signé Sébastien Bataille, embrasse toute la brillante carrière de Stephan Eicher, artiste multi-langues et multi-instrumentiste, comme un couteau Suisse sonique, et héros du rock à la manière d’un Springsteen made in Europa, se révèle être un ouvrage indispensable à tous ceux qui chérissent un tant soit peu ce vibrant helvète underground !
En un peu moins de 300 pages, Sébastien Bataille développe toute la carrière du fameux natif de Münchenbushsee, dans le canton de Berne, avec une rare précision, s’attachant à chaque album, chaque collaboration, de ses débuts avec le groupe Grauzone à son dernier opus de 2022. Parfaitement documenté, y compris avec mes propres articles pour BEST et ailleurs, ce « Stephan Eicher » se dévore d’une seule traite. Pour avoir pratiqué « Chtephâne » depuis ses débuts, je n’ai noté qu’une seule omission : le générique qu’il a réalisé début 1986 pour le « Mini Journal » de Patrice Drevet, soit l’édition de 18 h du JT de TF1. En effet, j’ai rejoint la rédaction de Cognaq-Jay fin 1985 et mon tout premier sujet pour la télé était de « couvrir » un des tous premiers concerts donné par Stephan Eicher (Voir sur Gonzomusic https://gonzomusic.fr/?s=Stephan+Eicher ) dans la fameuse salle de la Cité à Rennes. Ce soir-là j’ai été totalement subjugué par un Eicher seul sur scène avec ses machines, comme une version mutante entre un Springsteen ( pour la vibrante rage rock ) et un Prince ( pour le côté multi-instrumentiste en solitaire). Or Patrice souhaitait remplacer la chanson « Un autre monde » de Téléphone, qui servait de générique au Mini JT, par un autre thème. En découvrant mon sujet Drevet flashe sur la modernité de Stephan et lui offre de composer un thème original pour l’émission. Stephan sample la phrase « Mini Journal » pour l’harmoniser sur un sequencer et créer ainsi un écho électronique qui répète ad lib « Mini journal ».
Si cette petite anecdote, ne figure pas dans le « Stephan Eicher » de Bataille, rassurez-vous l’auteur décline son petit Eicher de A à Z, répertoriant chaque album, chaque concert avec une précision quasi chirurgicale. De surcroit l’auteur a aussi tendu son enregistreur sonore au batteur Manu Katché, qui officie sur de nombreux albums du rocker Suisse, ainsi qu’au réalisateur Philipe Gautier, qui a œuvré sur de nombreuses vidéos. Cependant le livre est bien plus qu’un simple « disque à disque », « Stephan Eicher » s’attache aussi aux racines yaniches de son pères et juives allemandes converties au protestantisme de sa mère, qui sont omniprésentes dans sa musique. Sébastien Bataille a aussi retrouvé de très nombreux entretiens accordés à la presse au fil des années, dont il a su extraire la substantifique moelle pour dérouler son histoire. En jonglant avec les langues, le Français mais aussi l’Anglais, l’Allemand, le Romanche et même l’Italien, Stephan Eicher est sans aucun doute le plus européen des rockers. Tel un Springsteen, un Dylan ou un Jackson Browne, le Chuisse s’inscrit dans cette tradition des héros du rock, dont la lumière sera toujours un phare pour nous guider et nous inspirer dans la pénombre. Et l’on peut ainsi parier que cette toute première biographie sera loin d’être la dernière.
Stephan Eicher
Par Sébastien Bataille
Éditions l’Archipel
