YAZOO « Upstairs at Eric’s »
Voici 42 ans dans BEST, c’est d’un pas volontaire que GBD gravissait joyeusement les marches qui montaient tout en haut chez Eric. Et comment en aurait-il été autrement puisqu’il avait eu le flair de se trouver le 22 novembre 1982 au Dominion Theater à Londres pour assister au tout premier show d’un groupe inconnu baptisé Yazoo. Inconnu ? Pas tout à fait puisque dans le duo se trouvait l’ex-Depeche Mode Vince Clarke qui avait signé les deux hits du premier LP dont le fameux « Just Can’t Get Enough ». C’est dire si cet « Upstairs at Eric’s » était attendu comme le loup blanc. Porté par l’irrésistible « Don’t Go » et la voix stratosphérique d’Allison Moyet il n’a certes pas déçu !
Bon, j’avoue le style de la chronique est… comment dire… pour le moins simpliste : j’avais enchainé à peu près tous les stéréotypes possibles entre électronique et informatiques naissantes. Mea culpa… mais, d’un autre côté, faut-il le rappeler à l’époque, il n’y avait pas d’internet, même pas de fax. Et d’ailleurs je ne toucherai à mon premier Mac qu’un peu moins de dix ans plus tard. Mais, à l’époque, Vince Clarke ( Voir sur Gonzomusic ) et Allison Moyet incarnaient à eux deux toute cette modernité naissante qui nous mettait tant d’étoiles dans les yeux, la promesse d’un avenir technologique radieux. Autre déduction qui s’est révélée juste : j’avais aussi raison sur un autre point, cette faiblesse intrinsèque de Yazoo, ce côté éphémère que je pressentais puisque leur discographie ne dépassera jamais les deux 33 tours. Cependant, lorsque je les ai découverts sur la scène du Dominion Theater, derrière Tottenham Court Road le 22 novembre Yazoo me semblait tout aussi futuristiquement bluffant que « Bladerunner » ; et ce n’était pas du cinéma, la preuve par cet « Upstairs at Eric’s » !
Publié dans le numéro 172 de BEST
Chers mutants, chers répliquants, chers androïdes, cette chronique vous est consacrée. Depuis des années déjà, nous avons présenté révolution de la musique des hommes interprétée sur des machines et destinée aux humains. Aujourd’hui, il est temps de lutter contre ce sectarisme place aux disques exécutés par des machines pour des machines. « Upstairs at Eric’s », le premier LP de Yazoo, est l’aliment indispensable pour régénérer vos précieux micro-chips. Vous qui êtes sur le point de court-circuiter, désactivez-vous donc un instant avec « Don’t Go », une composition performante qui a déjà ravagé bien des mémoires d’outre-Manche. La musique de Yazoo concilie la régularité du quartz et la souplesse d’une fibre optique. Yazoo est un duo male et femelle Vincent Clarke et Geneviève Alison Moyet. Vincent est directement issu de la cellule Dépeche Mode dont il était l’un des principaux pôles ; le hit « Just can’ t Get Enough » était déjà signé Clarke. Comme toutes les bonnes machines de cette génération Soft Cell, Orchestral, Dolby, Yazoo ne comptabilise en obsolescence qu’une vingtaine d’années. C’est dire si leur énergie est préservée. Elle déborde de toutes pans pour se matérialiser dans des compositions rapides et rythmées par le pouls d’un sequencer. Geneviève est à la voix et au piano, Vincent joue aux terminaux pour tous les autres claviers, synthés et autres percussions électroniques. Sur le terrain de la new-pop synthétique, ils jouent aux pionniers. C’est dansant, remuant, percutant, mais si éphémère. Les schémas de la musique de Yazoo sont parfaitement simplistes, mais c’est ce qui fait leur force. Comme ces jeux électroniques de poche où l’on finit par faire un score fabuleux à force de s’entraîner et d’analyser, cher répliquant, Yazoo ne fera pas de vieux jours autour de votre platine, mais peu importe puisqu’il aura été amorti par des passages intensifs sur short run. Selon un calcul de probabilités « Upstairs at Eric’s » devrait se dispatcher rapidement à travers les couches multimédias. Programmez-vous donc Yazoo MAINTENANT, demain il sera déjà trop tard.
Publié dans le numéro 172 de BEST daté de novembre 1982