THE MOTELS À PEARL HARBOR
Voici 40 ans dans BEST, ce verni de GBD rencontrait deux séduisantes et surtout talentueuses California girls : Martha Davis, la chanteuse des Motels et Pearl E Gates, la chanteuse de Pearl Harbor qui venait à peine larguer ses Explosions, pour enrôler quelques fameux spadassins British dans son nouveau band. Deux filles épatantes, deux sons décoiffants et deux rencontres forcément marquantes dans le Paris de l’aube des années 80. Flashback…
Martha Davis venait de publier son « Careful », deuxième LP de ses Motels et c’était notre toute première rencontre. J’ignorais alors que, un peu plus d’un an plus tard, je retrouverai la jolie brune chez elle, à LA, dans la foulée de la publication du 3ème 33 tours des Motels, le brillant « All For One ». Mais c’est encore une autre histoire du rock, que je vous coterai un de ces quatre, n’est-ce -pas ? Porté par son cool « Danger » et le très francophile « Bonjour Baby », « Careful », « Careful » était à des années-lumière du « California sound » des Eagles et de Jackson Browne. Plus rock, plus brut et en même temps mélodique, le son des Motels était alors bien plus proche de Blondie ou de Television. Quant à Pearl Harbor, la bouillante native de San Francisco se revendiquait carrément de la punkitude british du Clash et des Damned au point de tomber amoureuse du manager des Clash et de Ian Dury avant de larguer ses Explosions pour s’expatrier à Londres avec lui. Bref, ces deux California girls n’avaient absolument rien en commun avec les « California Girls » des Beach Boys et c’est justement ce qui faisait tout leur charme. Double rencontre parisienne avec Martha Davis et Pearl Harbor… Flashback !
Publié dans le numéro 151 de BEST sous le titre :
CALIFORNIA GIRLS
“I wish they all could be California girls », (Brian Wilson).
Dix ans après les Beach Boys, où sont donc passées les filles de Californie. Depuis les envolées foirées du Starship, les girls se sont planquées… Aujourd’hui, elles remontent enfin à la surface : Martha Davis et ses Motels, Pearl E. Gates, alias Pearl Harbor. Deux superbes West Coast girls qui n’hésitent pas à cracher dans la soupe un peu molle du Pacific Sound.
Les Motels sont nés en 76 sur la scène glissante d’un club de downtown LA: Madame Wong. La vieille Esther Wong ne supportait plus les petits punks friqués qui saccageaient son club. La première formation des Motels l’a immédiatement séduite : Martha était jeune, jolie et clean, Dean Chamberlain (aujourd’hui « Code Blue) le premier guitariste n’était encore qu’un teen-ager sage. Leur musique avait la pêche : elle a su également séduire Carter, le producteur maison de chez Capitol Record. Mais, la même nuit les Motels se séparent et il faudra à Martha deux ans et demi pour réunir un nouveau Motels. Peu importe, Carter connait déjà le chemin qui mène à Chinatown: il est sûr de les signer, la preuve, le studio est déjà réservé. Le vieux producteur de Sammy Hagar et de Bob Welch est un personnage tenace, dommage que les deux premiers LP des Motels sonnent complètement bridés par rapport à tout ce qu’ils sont capables de faire sur scène. La voix de Martha et la batterie sont comme sous l‘effet d’un compresseur : passages radio-FM obligent, « Careful », le 2e album est encore plus aseptisé. Entre temps, Jeff Jourard, le guitariste est remplacé par Tim Mc Govern ex-The Pop, mais comme le dit Martha: « Les musiciens de LA ont des rapports complètement incestueux on va d’un groupe à l’autre sans honte ni remord.
Et la West Coast ?
Tim Mc Govern : On est West Coast parce qu’on y vit… de toute façon moi, je suis natif de New York.
Martha Davis : Moi je suis la seule indigène du groupe, mais j’ai toujours profondément détesté les groupes californiens
TMG: Je n’aimais pas l’Airplane et je ne supportais pas le Dead, Country-Joe and the Fish étaient juste ridicules. OK, les Doors avaient quelque chose, mais j’aimais cent fois plus ce Noir éclaté de Seattle : Hendrix. Mais, nous n’avons pas le choix les maisons de disques sont installées a LA… alors, il nous faut suivre le mouvement. »
Mardi soir, au Palace bourré à craquer, la California girl ne se contentait pas d’exploser sur scène, de vivre avec passion ses compositions comme « Danger » ou « Whose Problem »: elle se jetait dans son public, armée d’un seul micro émetteur
« MD: De toute manière, c’est tout aussi dangereux de rester sur scène! Dans les clubs de LA, je vais même m’asseoir à une table ou à une autre et je trinque avec le public. Springsteen se prête aussi au jeu, sauf que lui lorsqu’il se balade parmi son public, il s’entoure d’une demie-douzaine de barbouzes pour le protéger ».
Depuis plus de sept mois, les Motels sont sur les routes d’une gigantesque tournée mondiale. Ça ne les empêche pas en tout cas de faire sauter les plombs du Palace …
MD: Un jour, on a même réussi à plonger tout un quartier dans les ténèbres. Dans ce cas, on meuble avec le saxe et la batterie. Moi, je m’assois sur scène et je discute avec les gens. Désormais, avant chaque gig, le stage-manager nous demande : « à quelle heure vous les faites sauter ? ».
Si les babas californiens ont soudain retrouvé leur énergie, c’est bien la faute aux Motels ! Quant à Pearl Harbor, côté déflagration, elle n’a pas grand-chose à envier à Martha. Pearl a largué son premier groupe, les Explosions (ils jouent maintenant avec l’ex-Airplane Jorma Kaukonen) pour s’expatrier en Angleterre.
« Pearl Harbor: Je les ai laissés eux et leurs coeurs brises à San Francisco ( clin d’oeil référence à la chanson « I Left My Heart In San Francisco » de Tony Bennett : NDR) . Après le premier LP, on voulait composer du matériel pour le second et c’est là que nous avons réalisé la distance qui nous séparait. Les Explosions évoluaient vers le jazz alors que moi je m’allume vraiment sur le vieux rock, le rockabilly et la country. Je ne suis pas une chose des villes, je suis sauvage et j’aime la musique sauvage !
Quand avez-vous splitté ?
Voyons… notre dernier show, c’était le 5 avril. Alors on a dû se séparer le 7. J’ai fait mes valises le soir même et Kosmo Vinyl ( manager de Clash et de lan Dury) m’a emmenée avec lui en Angleterre. »
La musique de Pearl tient plus du passage du mur du son que de la sage musique des Explosions. Sur scène, son groupe se révèle assez bordélique, mais la haute tension qui s’en dégage n’est pas sans rappeler David Johansen et ses copains de l’époque dorée des New York Dolls. Son premier LP made in England « Don’t Follow me, I’m Lost Too» est produit par Micky Gallagher, claviers de lan Dury et du Clash. C’est un cocktail énergétique où se mélangent le rockabilly et la voix acidulée de Pearl. Son groupe est d’ailleurs composé de petits frères célèbres : Barry Payne, basse, frère de Davey (sax des Blockheads) et Nick Simonon, batteur et frérot de Paul. Et si Pearl se paye le luxe de deux batteurs c’est la faute à Gary Glitter…
« Moi je ne connaissais pas ce mec-là, mais Kosmo m’a fait écouter « Rock and Roll » le premier soir de mon arrivée à Londres. La batterie était incroyablement puissante. Je lui ai demandé comment Il faisait. « Il utilise deux batteurs », m’a répondu Kosmo et j’ai répliqué : Okay, alors moi aussi je veux deux batteurs.»
Tant pis si sur scène, Steve, le guitariste, est bourré comme un tonneau de Beaujolais nouveau, tant pis si le public mode des B 52’s, dont elle assure la première partie, n’y comprend rien: la jolie métisse (sa mère était philippine et son père un US Marine) vaut son pesant de TNT même sans les Explosions ! On va dire que l’ami Kosmo a vraiment de la chance.
Publié dans le numéro 151 de BEST daté de février 1981