SMOKEY ROBINSON « Gasms »
23… comme 2023… et c’est justement le 23ème album solo de l’immense Smokey Robinson depuis qu’il a abandonné les Miracles en 1972, son premier véritable disque depuis 9 ans et c’est juste un pur bonheur de retrouver ce héros de la Motown qui à 83 printemps n’a rien perdu de sa superbe et de son incroyable voix haute. On comprend mieux en écoutant son lumineux « Gasms » qu’il ait mis des années à l’enregistrer, tant chaque composition ciselée par un des orfèvres le plus expert de la soul music est un précieux bijou d’une hallucinante qualité. À 83 ans le natif de Detroit prouve ainsi qu’il demeure le roi incontesté de sa « motor-town ». Welcome back sweet Smokey….
Smokey et moi c’est une histoire qui remonte à 46 ans… même si nous ne nous sommes hélas jamais rencontrés, ce que bien entendu je déplore cruellement. En 1977 j’ai trouvé mon tout premier LP de Smokey, le sublime « Deep In My Soul », avec sur la pochette le gros plan sur son incroyable regard émeraude dans la boite aux lettres de la boutique de mes parents. Un an auparavant, à force de visiter tous les labels de LA en prétendant que j’étais un des plus fameux DJ français, récoltant ainsi mes premiers « services de presse » j’avais réussi à convaincre la charmante boss Suzanne De Place de m’envoyer quelques disques de temps à autres à Paris. J’avais vingt ans et un culot monstre, mais c’était un temps béni où il n’y avait ni fax ni mail et où le département international à LA ne parlait jamais directement au téléphone avec son alter ego parisien. Et donc jusqu’en 79 au moment où j’ai décroché ma Carte de Presse, j’ai reçu un mini service de presse envoyé directement des bureaux de la Tamla Motown au 6255 Sunset Boulevard. Bien entendu je connaissais Smokey Robinson and the Miracles par leur classique « The Tears of a Clown », mais je maitrisais encore mal sa colossale carrière solo. On va dire que je me suis rattrapé depuis…. Et vous allez sans doute devoir en faire autant après avoir écouté ce jouissif « Gasms » qui démarre sur sa chanson-titre en parfaite soul pop qui me rappelle le duo Michael Jackson et Paul McCartney, mais il y a aussi du « Sexual Healing » de son ex frère de label Marvin Gaye, le tout porté par l’incroyable voix haute de Smokey et produit avec un raffinement extrême… effet waou garanti.
Et en parlant de voix propulsée si haut qu’on en a le vertige, une voix qui a bien entendu inspiré un certain Prince Rogers Nelson, avec la sensuelle balade « How You Make Me Feel » elle donne la pleine mesure de son haut pouvoir émotionnel. Et à ce propos la sublime et lente « I Wanna Know Your Body » pourrait bien être justement un clin d’œil à Prince, tant elle rappelle le style de notre Kid de Minneapolis. Avec « I Keep Calling You » Smokey Robinson fait carrément du rock soul west coast entre James Taylor et Steely Dan avec de surcroit un je ne sais quoi de Terence Trent d’Arby. « Roll Around » démarre sur son harmonica cool à la Stevie Wonder, avant de nous offrir du plus beau style Smokey qui évoque son tubesque « Bein’ With You » de 1981. Back vers la soul des origines avec « Beside You », qui sonne carrément comme un hit des 60’s qu’auraient pu chanter Sam Cooke ou Percy Sledge, troublante superbe et juste intemporelle. Sans doute « If We Don’t Have Each Other » est-elle la plus funky de l’album lorsque « You Feel Me Up » après sa longue intro au piano est un quasi-gospel a-capella, un hymne à l’amour qui ne saurait laisser indifférent. Enfin, cette sublime collection de chansons s’achève en beauté sur hit massif « I Fit In Here » qui peut sans rougir s’inscrire dans la galerie des plus grands succès de la Motown aux côtés des « Smiling Faces » et autres « Papa Was a Rolling Stone » des Temptations , le « Master Blaster » de Stevie Wonder ou encore le « Got to Give It Up » de Marvin Gaye, que du très haut de gamme. Le plus sidérant c’est que voix de Smokey n’a pas pris une seule ride et parait toujours aussi juvénile, c’est sans doute que son portrait de Dorian Gray se porte bien dans sa cave 😜
