PETER BEARD

Peter BeardIl est mort là où il aimait le plus être, en pleine nature et s’il affectionnait autant les grands fauves de la savane, que ceux qui arpentent nos scènes de concert, le photographe star Peter Beard est décédé à 82 ans. Il était atteint de démence et avait subi au moins un accident vasculaire cérébral. Il était porté disparu depuis 12 jours, lorsque son corps sans vie a finalement été retrouvé près de chez lui à Montauk, NY, en avril dernier. Pour lui rendre un hommage bien mérité, les éditions Taschen viennent de rééditer PETER BEARD, un superbe ouvrage grand format.

Peter BeardNon, Peter Beard n’est pas le père du ZZ Top Frank Beard, néanmoins son rapport à la musique était aussi intense que sa passion pour les grands fauves et les collages hétéroclytes, où le sang pouvait se mêler à son imagination. Il avait découvert Iman, la future madame Bowie avant tout le monde. Habitué du légendaire Studio 54, véritable playboy modèle Robert Redford, il comptait parmi ses proches des personnalités telles qu’Andy Warhol, Truman Capote, Salvador Dalí, Jackie Kennedy Onassis, Grace Jones, les Rolling Stones et Francis Bacon, qui l’a peint plus d’une fois. À l’occasion de la réédition de ce PETER BEARD, Jean Christophe Mary tire le portrait de ce photographe hors du commun.

 Par Jean Christophe MARY

Peter BeardNé dans une famille américaine aisée, avec un arrière-grand-père fondateur d’une compagnie de chemins de fer, Peter Beard grandit dans les beaux quartiers de New York, entouré d’œuvres d’art. Enfant rebelle, il commence à prendre des photos et à tenir un journal dès sa petite enfance. Puis il choisit d’étudier l’histoire de l’art contre l’avis de sa famille, renonce à un stage dans une agence de publicité et part photographier l’Afrique, qu’il a découverte à 17 ans, en 1955. Lorsqu’il sort diplômé de l’Université de Yale, il continue de nourrir un intérêt profond pour l’Afrique. Au cours des années 1960 et 1970, il travaille ainsi dans les parcs nationaux du Tsavo, des Aberdares, et du Lac Rudolf, au nord du Kenya. Fasciné par le continent et les textes de Karen Blixen (auteure du roman « Out of Africa ») , ce jeune homme au look de Robert Redford a 24 ans lorsqu’il s’installe au Kenya. Il y développe une œuvre picturale des plus singulière. Par ces photos de grands fauves, de crocodiles et d’éléphant, par ses images d’un pays dont il vit le tragique au quotidien, dans sa pureté et dans sa sauvagerie, par son journal enfin où il mêle en un gigantesque collage les témoins de son « africanité » et les souvenirs d’une vie civilisée qu’il ne renie pas, Peter Beard est un cas unique dans l’histoire de la photographie contemporaine.

 

Peter BeardC’est aussi l’époque brillante et insouciante des 60’s et 70’s que l’on découvre au travers de ces « scrapbooks » fantaisistes, de ces photos de beautés africaines, qu’il repère dans la rue à Nairobi – telle Iman jeune étudiante somalienne qui deviendra Madame Bowie. Son art du « scrap book » se tourne aussi vers les grands « fauves » de la haute société new-yorkaise tels Andy Warhol, Mick Jagger, Truman Capote ou Jackie Kennedy. Mais qu’est-ce qu’un « scrap book » ? Le scrapbooking est un loisir créatif qui consiste à réaliser des albums-photos personnalisés. Le principe repose sur l’utilisation de photographies découpées dans des magazines sur lesquelles on appose aquarelles, chutes de papier, morceaux de tissus et autres collages. Ainsi Peter Beard découpe dans des journaux de l’époque -Life, Newsweek, Man’s Epic, World Of Men ou Inside Movie des photos d’éléphants, gorilles, léopards, rhinocéros, guerriers de tribus africaines qu’il superpose avec des os, feuilles, branches et insectes, tickets, billets, cartes postales, objets trouvés, coupures de presse, qu’il orne ensuite de sa petite écriture méticuleuse et décorative, de dessins inspirés des grands maîtres, et utilise souvent du sang animal comme pigment. Avec subtilité, Peter Beard réussit à faire de ces collages un art à part entière. Ses « scrapbooks » intenses, bruts et raffinés montrent une fascination et son respect pour l’Afrique des décennies avant que le continent noir ne devienne à la mode, nous éclaire sur la vie tribale africaine ancienne, et montre le travail d’un photographe engagé protégeant et combattant pour les animaux en voie de disparition, et paradoxalement photographiant aussi des modèles de la jet set New-Yorkaises.Peter Beard

Car l’autre partie de sa vie est liée à la fête dans sa propriété de Montauk à Long Island, près de New York, où il mène une vie débridée, avec des personnalités influentes faites pour un style de vie unique tels Tina Turner qu’il  photographie sur scène en 1972, Mick Jagger et Keith Richards qu’il shoote sur la tournée « Exile On Main Street » en 1972, mais aussi Salvatore Dali, Truman Capote, tous célébrés ici dans des photographies spectaculaires qui éclairent, choquent ou amusent. Dans une mise en page sobre, ces magnifiques clichés et « scrapbooks » sont accompagnés d’un avant-propos signé Owen Edwards. L’ouvrage s’achève par une conversation entre Peter Beard et l’écrivain Steven M.L. Aronson où le photographe relate son histoire personnelle et sa philosophie de vie. Entre savane africaine et jet set New-Yorkaises, le photographe baroudeur, collectionneur et écrivain aura fait de sa vie en œuvre d’art qui occupe aujourd’hui une place de choix dans le monde de l’art international.

PETER BEARD aux éditions Taschen

 

 

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