LE MONGRAIN À MOUDRE DE VOIVOD

VOIVOD  by Catherine DeslauriersMais qu’ont en commun Dave Grohl, Jello Biafra, Jason Newsted, Opeth, les Ramones et une foultitude d’artistes reconnus du rock qu’il serait trop long d’énumérer ? Tout comme votre serviteur, tout spécialement monté en la capitale, depuis Montpellier pour les interviewer c’est que nous sommes tous fans de Voivod, ce quatuor culte québécois qui bouleverse les codes des musiques rock et heavy depuis près de quatre décennies, à l’occasion de leur concert en la vénérable salle Pleyel, invités par les progs métalleux mélodiques suédois d ‘Opeth.  Rencontre avec ce bon Dan Mongrain… à moudre 🤣 pour un Gonzo entretien fleuve !

Dan Mongrain VoivodAinsi par un morne après-midi de pluie glaciale parisienne, l’ami Salim Zein pu longuement échanger avec l’affable Dan « Chewie » Mongrain, guitariste depuis 15 ans désormais du tonitruant groupe de Quebec, dans un échange 100% francophone, comme entre cousins, avec une gentillesse désarmante, en toute simplicité, dans un café de la rue du faubourg Saint-Honoré, autour d’un double expresso, avec un artiste raffiné, cultivé et affable au possible, à des années -lumière des stéréotypes du genre.

Par Salim ZEIN

 « Bonjour Dan, bienvenue chez nous à Paris ! Ma première question est toute simple, en bon Québécois que vous êtes, ça fait combien de fois que vous venez jouer en France? 

Je ne sais pas exactement, mais ça fait quand même quelques fois…depuis 15 ans (que Dan Mongrain joue dans Voivod), plusieurs fois à Paris même, autour de Paris, au forum de Vauréal et aussi dans plusieurs villes de province… La dernière fois qu’on a joué ici, c’était à la Cigale, juste dix jours après les évènements du Bataclan, le 23 Novembre 2015, l’ambiance était très spéciale, on est donc bien contents de revenir dans d’autres circonstances.

Salim et Dan

Salim et Dan

Même si vous chantez en anglais, on peut considérer Voivod comme le plus francophone des groupes de métal international ? Tout en vous disant cela, je me dis que peut-être je vais froisser vos confrères métalleux de chez Gojira… 

(rires)… Bon, ce sont des amis, ça va…

En tant que francophone, qu’est-ce que cela vous fait de venir jouer en France ? 

C’est toujours comme si on allait chez nos cousins…c’est familial, on sent toujours la fraternité, quand on arrive dans la salle (Pleyel), même aujourd’hui, tout le monde était heureux de nous recevoir… Vous êtes ici le lien qu’on a entre le Québec et la France, nos grands-parents, nos ancêtres viennent d’ici, donc, il y a comme un lien de sang et l’on se reconnait, malgré nos différences, juste un regard ou un bonjour, les gens découvrent l’accent tout de suite… ça devient sympathique.

Voivod s’apprête à fêter ses 40 ans de carrière, non ?

Voivod

pix by Salim ZEIN

L’année prochaine, en 2023, le 7 janvier, si je ne m’abuse… On est à l’aube du quarantième anniversaire…

Qu’est-ce que ça fait d’être dans un groupe qui va fêter ses 40 ans ?

Ça fait quand même étrange, moi qui suis là depuis presque 15 ans (NDR: Dan Mongrain a remplacé le guitariste fondateur du groupe Voivod, Denis « Piggy » D’amour, décédé en 2005 d’une longue maladie), j’écoutais Voivod quand j’étais adolescent, j’avais 11 ou 12 ans, c’est le groupe qui m’a convaincu de m’acheter une guitare et de faire mon propre groupe. Et puis par la suite d’utiliser la musique et de devenir musicien professionnel. Être dans un groupe qui a une telle histoire, je sens beaucoup de respect de tous les autres groupes qui sont dans l’industrie et des promoteurs, par rapport à la longévité, même s’ils ne sont pas nécessairement fans du groupe, on sent un énorme respect. Et quant à ceux qui ont compris la musique de Voivod, qui sont entrés dans l’univers du groupe, depuis 40 ans ou depuis 20 ans, 15 ans, une fois qu’ils accrochent, c’est pour la vie. Une fois qu’on est entré dans l’univers du groupe, c’est impossible de reculer

Personnellement, je me souviens exactement de quand j’ai entendu parler pour la première fois de Voivod, c’était vers 1987, en pleine période d’avènement du thrash metal, genre développé par toute la scène US et européenne d’alors… et Voivod était toujours « à part »…au niveau du son, des structures musicales, ça n’a rien à voir avec les riffs traditionnels, idem pour les lignes de basse et même le jeu de batterie …

La voix aussi est très différente, car « Snake » (NDR = pseudo de Denis Bellanger, chanteur du groupe depuis les débuts), vient un peu du monde du punk, « Piggy » (= Denis D’amour, guitariste originel), était beaucoup dans la musique progressive, « Away » aussi, (= pseudo de Michel Langevin, batteur du groupe depuis toujours, qui réalise également toutes les pochettes et tous les visuels du groupe), chacun avait sa personnalité musicale et quand ils ont joué ensemble, ça a donné Voivod, un son unique, même pour nous au Québec, là-bas, la première fois que je les ai entendus, c’est ça qui a piqué ma curiosité, pour aller plus loin, et en comparant ça à Megadeth, Metallica, Coroner, Celtic Frost, c’était tous des groupes différents mais Voivod avait quelque chose de « différent » parce que Piggy jouait beaucoup dans le haut registre de l’instrument de la guitare, et utilisait des voicings à la guitare beaucoup plus idiosyncratiques du clavier.

Voivod

pix by Salim ZEIN

Oui, Voivod est clairement un groupe différent de ses confrères, assez inclassable en fait !

C’est justement cette différence qui nous permet d’être invités à jouer au festival « Primavera », à Barcelone, ou au « Festival de Jazz de Montréal », voire au « Roadburn », des événements qui accueillent des styles complètement différents (du notre). Piggy a développé son langage en écoutant « Emerson, Lake and Palmer », tous les voicings de clavier de Keith Emerson, ils les jouaient à la guitare, ça a donné un vocabulaire différent et peut-être un petit peu plus dense au niveau de l’harmonie .

Justement, il me semble que Voivod peut être considéré comme un groupe organique dans la mesure où il n’y a pas de clavier et que tout repose sur une seule guitare, une basse et une batterie, plus la voix, non ?

Oui, presque, à l’exception de l’album « Angel Rat » sur lequel il y des claviers…

Soit, mea culpa, et pourtant, avant de vous interviewer, j’avais révisé mes connaissances de votre discographie d’une bonne quinzaine d’albums et on reviendra sur l’épisode qu’a été l’album « Angel Rat », qui pour moi, a marqué un tournant dans l’écriture des chansons chez Voivod… le beat de la batterie a également un son distinct dans tout le son du groupe, avec des tournures très seventies.

Oui, très seventies (la batterie) .

Dans l’ensemble, je dirais que le placement des instruments, outre la batterie, telles les lignes de basse, sont atypiques, de même que la guitare, chez Voivod, est toujours « là où on ne l’attend pas?

Oui, c’est vrai, le panorama des fréquences est différent, en fait la guitare occupe le champ des médiums, le rôle de la basse est comme une deuxième guitare rythmique, avec des lignes qui forment comme une conversation musicale entre les instruments, avec la voix aussi, et qui devient très complexe malgré la formation harmonique qui se limite à une guitare, une basse, une voix, c’est très minimaliste, Piggy utilisait des éléments de Stravinski dans sa musique, des citations, par exemple, dans le morceau « Pre Ignition » sur l’album « Nothing Face », on peut clairement entendre des éléments du « Sacre du printemps », c’est inspirant d’entendre ce que d’habitude peut faire un orchestre symphonique de 100 musiciens, et de réduire cela à 3-4 musiciens, et d’entendre la même chose, sous la forme d’une réduction efficace avec peu d’instrumentation. Piggy était donc un génie de ce côté-là et il le faisait avec ses propres compositions également.Voivod

Personnellement, j’ai senti comme un tournant dans la carrière du groupe, à travers un album qui m’a littéralement accompagné dans une période de ma vie, il y a quasiment 30 ans de ça, « The Outer Limits ». On avait le sentiment, avec ce disque, que l’évolution amorcée avec l’album précédent » Angel Rat » se confirmait, comme faisant passer Voivod dans une nouvelle dimension, plus orientée « chanson rock » et moins dans le riff strict, moins…

Moins thrash metal ?

Exactement !

« Angel Rat » était un album qui avait été mal reçu à sa sortie, et qui depuis est passé au statut d’album culte auprès de la communauté des fans du groupe, et, quand nous en reprenons certains titres qui en sont issus, en concert, c’est là que le climax est atteint ! Il y avait dans cet album une recherche vers une plus grande simplicité et une volonté de créer des chansons plus faciles d’accès .

On peut considérer que « Angel Rat » était comme annonciateur de la transition à venir avec l’album suivant « The Outer Limits »? Sur ce dernier on remarque notamment une évolution également dans l’esthétique des artworks de l’album, moins dans une esthétique thrashy tourmentée et plus dans une science-fiction référencée années 50, typique du cinéma de genre. C’est d’ailleurs « Away », votre batteur qui conçoit vos visuels, n’est-ce pas ?

Oui, depuis le début… la toute première pochette avait été dessinée sur un carton à pizza qui avait été employé tel quel comme matrice pour l’impression ! C’était peint à la main et ça avait été envoyé à la compagnie de disques tel quel et la peinture n’était même pas sèche, ah ah ! (Rires). Et puis ensuite il est passé sur ordinateur dans les années 80, ça a d’ailleurs été un des premiers artistes à basculer, en quelque sorte, vers le côté digital, sur un antique Amiga d’alors, malgré le peu de puissance ! »Dan Voivod

Less is more, Do it yourself, comme on dit, c’est une posture typique des groupes de métal ! Et d’ailleurs quelles sont les influences visuelles de  Away  ? Ses dessins semblent tout droit sortir de Métal Hurlant ?

Oui, c’est exactement ça, d’ailleurs dessiner dans « Metal Hurlant » était un des rêves de « Away ».

Il faut absolument que l’on fasse passer le mot à la nouvelle rédaction de « Metal Hurlant ! (rires) car le journal vient d’être justement relancé récemment. Maintenant que Voivod a 39 ans, presque 40, c’est peut-être l’âge de raison ? J’ai appris que votre groupe a récemment été honoré par les prestigieux Juno Awards, l’équivalent de nos Victoires de la Musique.

En effet, ça a été une grosse surprise, d’autant plus que normalement c’est un évènement pour la musique francophone à 99% et on a été très honorés de découvrir que l’on nous considérait comme des ambassadeurs du Canada, hors nos frontières, c’était très honorifique. D’habitude, on a toujours été exclu de ça, et ça a été une très belle surprise, on se promène un peu partout sur la planète, nul n’est prophète en son pays, même si l’on s’y produit, que l’on y donne des spectacles, on n’avait pas encore eu ce genre de reconnaissance, qui naturellement fait très plaisir ».

Avec l’univers très graphique du groupe, les artworks de Away, n’avez vous jamais été contactés par des productions de film d’animation ou de jeu vidéo pour y incorporer votre musique ? »

Non, pas à ma connaissance même si on aimerait beaucoup cela. « Korgull » pourrait être le personnage principal d’un jeu vidéo (= référence à Korgull The Exterminator, titre d’une chanson de Voivod) !

Justement, c’est cool que vous mentionniez le personnage « Korgull », titre d’une de vos chansons, né de la créativité débordante du groupe…. D’ailleurs j’ai appris qu’un groupe de metal espagnol a repris ce nom.

Oui, je les ai déjà rencontrés, justement l’occasion d’une tournée passant par l’Espagne. Ils nous avaient filé leur CD ! .

Voivod

pix by Salim ZEIN

Justement, dans tout ce flot de culture « Geek / Nerd », comment vous situez-vous ? Je pense tout particulièrement à « Ultraman », votre tout nouvel EP 5 titres éponyme, dédié à cette sorte de super héros de série japonaise pour le moins surprenant, dans la plus pure tradition des OST japonaises. J’avoue que j’ai souri quand j’ai découvert cette reprise qui me renvoie aux combats de lutte pataude entre un personnage costumé en combinaison flashy rouge vif et casque étincelant, face à des gros méchants et autres créatures belliqueuses venues de l’espace pour conquérir la Terre.

(Sourire), oui, c’était mon idée, on était en pleine pandémie, et je voulais reprendre un morceau qui fasse référence à la culture geek, comme si ce héros allait symboliser la victoire de l’humanité sur ce virus qui paralysait le monde, et plus particulièrement celui des tournées internationales pour les groupes de rock comme nous… On a choisi « Ultraman » car c’est un héros que l’on connaissait tous dans le groupe. Mes souvenirs vécus, étant enfant, sont remontés à la surface, c’était tellement différent de tout, ça nous est resté…

Cette capacité qu’à Voivod à se replonger dans la culture populaire n’est pas nouvelle car, déjà sur l’album « Dimension Hatross » (1989), il y avait une reprise du thème original de la série télévisée « Batman » des années 60 .

Oui, c’était un titre bonus sur une édition, et il y avait eu aussi, sur un projet parallèle, une reprise du thème de « Captain Scarlet » (Série anglaise des années 60, du génial Gerry Anderson, à base de marionnettes et de vaisseaux futuristes, NDR). C’est moi qui ai eu cette idée, j’étais chez moi, au début de la pandémie, j’ai eu cette idée un peu folle de faire un arrangement sur le titre (Ultraman), puis j’ai suggéré ça aux gars (du groupe), ils ont aimé ça et on s’est embarqués dans l’aventure, ça a donné une sorte de medley avec un thème de bataille au milieu » (séquence rituelle de ces séries, où dans chaque épisode le héros Ultraman règle leur sort aux abominables créatures venues de l’espace, en général dans un décor de terrain vague fauché)… Puis on a décidé de faire la version japonaise du titre et c’est moi qui m’y suis collé, car il se trouve que je parle un peu japonais et que l’accent (de la langue du Soleil Levant, NDR) était un peu difficile pour « Snake», (le chanteur de Voivod, NDR), c’était difficile d’apprendre les mots, et je comprenais le texte aussi, la version qu’on a sortie en single est en anglais / français / japonaise mais il y a également une version toute japonaise, sur le EP et une version instrumentale si on veut faire un karaoké ! (rires) .

Vous avez, Dan Mongrain, de toute évidence une formation de musicien très avancée, il me semble, et qui va bien au-delà de la seule musique de Voivod, puisque vous avez également collaboré avec le Cirque du Soleil, entre autres.Dan Voivod

Oui, c’est moi qui ait été recruté pour former la guitariste de la tournée-hommage à Michael Jackson, Gina Gleason qui joue maintenant avec « Baroness » (groupe de sludge métal US, NDR) .

Comme Jennifer Batten en son temps ? (Célèbre guitariste virtuose qui a accompagné le King Of Pop dans ses tournées, et qui a aussi joué avec Jeff Beck, NDR)

Oui, la prod’ voulait une fille (pour le show-hommage à Michael Jackson, NDR)…. J’ai mon baccalauréat en jazz, et j’enseigne au collège de musique jazz-pop, les cours de guitare, de théorie, de transcription musicale, l’harmonie avancée… C’est un peu à cause de Voivod car leur musique a piqué ma curiosité, j’ai voulu savoir « comment faire »…

Est-ce que Voivod vous occupe désormais à plein temps?

On gagne notre vie, mais ça m’empêche pas de faire autre chose, personnellement j’aurais des difficultés à faire « seulement une chose dans la vie », et puis c’est un choix de pas faire des tournées 8 mois par année, par exemple… C’est un choix de vie, à un moment donné, c’est difficile d’être sur la route, donc 4 mois par année, ça nous convient, normalement une centaine de spectacles par année .

Vous programmez vos tournées pour être hors du Québec pendant la rigoureuse période hivernale ?

(Sourire). C’est toujours mieux quand on peut partir du Québec quand il fait froid c’est sûr !

 Je voulais aborder une dernière question, concernant les thèmes abordés par Voivod dans ses morceaux. Sans être un groupe politique, il ya toujours, à mon sens, « comme une conscience, dans vos textes, une vision assez pessimiste du monde, assez sombre. Qu’en est-il vraiment ?

En fait, la science-fiction nous permet d’exprimer beaucoup de choses sans atteindre ou viser qui que ce soit, on peut en tirer nos propres conclusions, avec notre propre créativité, je pense que l’art sert à faire réfléchir, nous même en tant qu’artistes, en créant, on réfléchit beaucoup, et je pense que ça peut ouvrir des consciences à des questionnements sans imposer une vérité, mais plutôt suggérer la réflexion, la conversation, l’échange… Et effectivement, on vit dans un monde plein de tensions, je pense que ça a toujours été (ainsi) sur la Terre, avec l’humanité, il y a toujours eu des conflits, avec l’époque dans laquelle on vit, on a encore peur du nucléaire, de la guerre, du réchauffement climatique, de la dictature…On peut l’exprimer par le prisme de la science-fiction, pour notre liberté d’expression.

Justement, on peut dire que Voivod n’a jamais eu de « caractérisation » dans ses chansons, ses représentations, pas de personnages véritablement masculins ou féminins, comme si cela passait par un narrateur, avec cette voix un peu incantatoire… le chant de « Snake » est d’ailleurs très spécial, presque gothique… cette distanciation permanente vous a probablement permis d’échapper à toute purge « woke / cancel culture, (Voivod) restant toujours ouvert, sans jamais donner de jugement.Voivod

Je pense la même chose, j’apprécie ce côté-là, même avant de faire partie du groupe (Voivod), la liberté à interpréter ce qui est émis, je pense que c’est important dans l’art de pas une définition d’une toile… elle est le reflet de ce que nous y apportons .

L’art questionne mais n’explique pas…

Exactement !

(comme en écho du contexte actuel, vous qui voyagez beaucoup) Est-ce que Voivod a déjà joué en Europe de l’Est ?

Nous ne sommes pas allés en Ukraine mais on est allés dans le passé en Russie, dans les pays Baltes, plus près de chez vous, (en Europe Centrale), en Roumanie, en Bulgarie… On a des fans russes viennent nous voir quand on joue en Suède, ils se déplacent…D’ailleurs l’autre soir, à Hambourg, on a eu une fan de Russie qui est venu nous voir, on a pu échanger avec elle… Les gens n’ont rien à voir avec les conflits… Et la musique métal contribue à faire tomber les barrières.

Le groupe aura 40 ans l’année prochaine, comment voyez-vous le futur ?

On espère encore faire quelques albums et de tourner le plus possible, tant que la santé est là, la capacité physique surtout, de tout le groupe, je pense à un instrument physique, comme la batterie, au chanteur, qui ont quand même 15 ans de plus que moi, ou presque, la volonté de faire durer Voivod le plus longtemps possible, peut-être qu’un jour on ralentira par des tournées de deux semaines au lieu de cinq semaines… Mais la volonté de continuer de faire des albums, de faire de la musique est là, on pense à créer des évènements, des items spéciaux, pour les fans et pour nous aussi… Le futur est très bien, l’année prochaine on va avoir beaucoup de surprises… Un documentaire consacré à Voivod, un livre aussi, également une statue à l’effigie de Piggy…

Il y a un ancien titre de Voivod qui m’est particulièrement cher, et j’ai d’ailleurs vu sur une vidéo que vous le rejouez désormais sur scène, c’est « Fix my heart », extrait de l’album « The Outer Limits », à chaque fois que je l’entends, des tonnes de souvenirs rejaillissent, un peu comme la madeleine de Proust… Avec ce son harmonisé au pitch shifter, à la fois accrocheur et mystérieux…

VoivodOui, je me suis efforcé de dupliquer d’oreille le traitement sonore du morceau, afin de reproduire le travail de Piggy… La musique est effectivement un déclencheur de souvenirs…c’est ça aussi en effet…

Toujours dans les références, je me rappelle que vous aviez cité, lors d’une interview passée, parmi vos références culturelles essentielles, le poète et chanteur Québécois Gilles Vigneault

Gilles Vigneault, comme plusieurs (autres) je le considère comme un des plus grands poètes au Québec, je l’ai vu en spectacle, il y a peut-être une dizaine d’années, je pense qu’il ralentit aujourd’hui, il est quand même rendu en haut de 90 ans (NDR, délicieuse tournure québécoise que j’ai conservée telle quelle, que les lecteurs décoderont d’eux-mêmes). Il m’a vraiment touché, sa façon, sa prestance, sa façon de livrer ses poèmes, j’ai trois recueils de ses poésies chez moi, je les ai lus, attentivement, puis…y’a une phrase qui m’est restée dans la tête, ça a rapport avec le voyage, c’est comme ça que je me sens en tournée, « Plus je m’éloigne de chez moi, plus je me sens proche de moi-même » , c’est quelque chose qui me reste en tête depuis que je l’ai lu, c’est quelque chose que je vis en tournée, c’est comme si toutes nos références changent, donc l’égo, le personnage qu’on peut avoir, que l’on se crée en soi… s’effondre parce qu’on plus à jouer de personnage « subconsciemment »  de telle ou telle personne, on se rapproche du noyau de notre être .

Justement… qu’est ce qui est difficile en tournée pour vous ?

Voivod

pix by Salim ZEIN

Le sommeil… c’est très difficile, on essaye de dormir le plus possible, dès fois, on dort juste deux heures et il faut monter sur scène comme si on avait dormi douze heures, c’est ça le plus difficile pour moi, le voyage et le sommeil…On adore découvrir les nouveaux endroits, alentours de là où l’on joue, rencontrer les gens, échanger, rencontrer les fans après le concert, être dépaysé, la langue change, jour après jour, le décor change, la nourriture, c‘est déstabilisant mais c’est toujours très positif. Puis y’a des trucs moins drôles, comme perdre une roue d’un autobus en route (!) ou arriver à Paris dix jours après les attaques du Bataclan, des choses comme ça, où là récemment à Istanbul où il vient d’y avoir un attentat terroriste, alors qu’on doit y jouer dans une semaine ou deux, donc c’est stressant, des fois c’est un tremblement de terre, deux jours après qu’on soit au Chili, ou un tsunami au Japon, tu sais… faut pas penser à ça parce que sinon, on ose plus traverser la rue !

Quand vous êtes au Japon, faut penser à appeler Ultraman à la rescousse, quand vous avez un souci là-bas ?

(rires) Ah ah, oui voilà, c’est pour ça, pendant la pandémie, j’imaginais un super-héros qui pourrait aller combattre le Coronavirus ! (rires, encore)

Une de ces créatures grotesques qu’Ultraman affronte dans chaque épisode ?

Ah oui, c’est tout à fait ça, exactement, comme une sorte de grosse bête avec des piques, la cellule Corona quoi, (rires) »

Tout en lui disant au revoir, dans un grand sourire, j’ai réalisé que trois quarts d’heure venait de passer avec un sentiment d’être resté juste quelques minutes à bavarder avec Dan Mongrain, musicien passionnant et passionné, sensible et accessible, pas du tout la grosse tête et surtout dédié à la musique et au groupe VOIVOD dont il fait partie, pas comme les autres, si spécial, si différent. Mon impatience de découvrir le groupe sur scène n’en est que décuplé, et ce que je vais découvrir dans quelques heures, va me prouver que le métal de Voivod sait à la fois illuminer les esprits, communiquer avec son public et rendre heureux.

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