LA TRAVIATA À L’OPÉRA
Incroyable… la Traviata de Giuseppe Verdi prend un sacré coup de jeune à l’Opéra Bastille se téléportant dans notre présent hyper connecté et addict aux réseaux sociaux, un lifting qui n’a pas laissé indifférent JCM qui rapporte que le spectacle offre au public une distribution haut de gamme dans une mise en scène spectaculaire !
Par Jean-Christophe MARY
Qui est la Traviata ? Pour le metteur en scène australien Simon Stone, remarqué pour son talent à rafraîchir les classiques, Violetta n’est pas cette demi-mondaine qui vend son corps, comme dans La Dame aux camélias d’Alexandre Dumas fils, à l’origine de l’opéra de Verdi. Elle est une star des réseaux sociaux qui monnaye son image et ses conseils numériques à grand renfort de « posts », de « selfies » et de « stories ». Hélas ! Ce monde hyperconnecté n’empêche pas la belle, comme au XIXe siècle, de devoir sacrifier son amour pour Alfredo sur l’autel des conventions sociales. Cette lecture contemporaine s’accorde aux intentions de Verdi qui, tout en composant une musique fiévreuse et virtuose, critique la brutalité d’une société du paraître, machine à broyer les individualités. Surtout quand elles sont des femmes qui aspirent à être libres. « Sempre libera », l’air le plus célèbre de Violetta, n’est-il pas l’étendard de cet opéra ?
On est heureux d’apprendre le retour de cette magnifique production signée du metteur en scène Simon Stone créé en 2019 au Palais Garnier. Plaisir d’autant plus satisfaisant qu’elle est donnée cette fois dans l’écrin de l’opéra Bastille avec une distribution très, très haut, de gamme. Cette reprise dont la générale avait lieu jeudi 18 janvier est un triomphe annoncé pour plusieurs raisons. La mise en scène 2.0 on ne peut plus contemporaine. En 2019, Simon Stone nous a offert une vision ultra moderne de l’œuvre de Verdi en faisant de Violetta une star médiatique, une sorte de top model, égérie d’une marque de parfum, qui suit ses « followers » sur ses comptes Facebook et Instagram et dont les pages défilent sur le grand écran d’un plateau tournant. Ce décor blanc, sorte de livre ouvert ,sert tour à tour de décor de boîte de nuit branchée où le champagne coule à flots, de ruelle où des fêtards fument devant des poubelles quand Alfredo déclare son amour à Violetta, de station Uber avec cette luxueuse berline blanche, du « ParIsanboul » un kebab plus vrai que nature, de chapelle, de soirée costumée libertine avec pour décor des tubes de néons rouge, bleu, vert, jaune rose qui dessinent des corps nus en train de faire l’amour dans les toutes les positions du kamasutra ou cet hôpital où Violetta soignée pour son cancer disparait dans un immense halo de fumée blanche. Autres composants importants de cette magnifique mise en scène, les images vidéo projetées sur l’écran rotatif avec cette affiche publicitaire au nom de Violetta et de son parfum, ces titres de la presse à scandale qui commentent sa liaison avec Alfredo ou les SMS échangés avec sa mère, Alfredo, Flora, son médecin ou son banquier. Autant d’éléments qui accompagnent les airs et nous renseignent sur son cancer, ses déboires financiers et aux gros titres des journaux à scandale qui commentent sa liaison avec Alfredo. Seconde raison, cette nouvelle distribution qui s’annonce haut de gamme.
Ainsi, pourra-t-on applaudir la soprano Nadine Sierra (Violetta), réputée pour son impeccable technicité vocale (elle triomphait dans le rôle-titre au Metropolitan Opera de New York en 2022) avec en alternance la soprano Marine Chagnon que l’on peut écouter aussi ces jours-ci dans Adriana Lecouvreur (Madame Dangeville), le ténor américain René Barbera (Alfredo) dont la voix pénétrante, séduisante, riche en nuances nous avait séduit dans le Barbier de Séville (2022) et Don Pasquale (2023), de la soprano Cassandre Berthon remarquable Giovanna en Rigoletto (2023) du baryton Ludovic Tézier, une voix solide à l’assise exceptionnelle, déjà présent dans cette en scène en 2019 dans le rôle du père (Giorgio). Si on ajoute à cela une direction d’orchestre confiée à Giacomo Sagripanti, ce magnifique décor tournant signé Bob Cousins, les costumes chatoyants d’Alice Babidge, cette reprise raisonne déjà aux airs de succès annoncé. Les 12 représentations affichent quasi complet, mais il reste encore quelques places. Dépêchez-vous de réserver !
La Traviata à l’Opéra Bastille
Opéra en trois actes de Giuseppe Verdi
Du 21 janvier au 25 février 2024
3h05 avec 2 entractes