KENDRICK LAMAR : « DAMN »
« Lamar qu’on voit danser le long des golfes clairs a des reflets changeants (…) Lamar a bercé mon cœur pour la vie. », décidément, cette chanson de Charles Trenet colle admirablement au personnage Kendrick Lamar. Et à mon amour pour sa musique. Deux après son colossal « To Pimp a Butterfly », mon disque favori de l’année, un peu plus d’un mois après l’arrivée surprise de son fringuant « Untitled Unmastered » KL balance le colossal « DAMN » et c’est si vertigineux au niveau sensations que c’est comme si la Terre s’ouvrait sous mes pieds.
Album évènement. Album sensation. Album de tous les records. Album incontournable qui a su supplanter Ed Sheeran au sommet, « DAMN » fort de ses 14 solides compositions a l’air déjà bien parti pour se classer parmi les incontournables de cette année 2017. Sémantiquement, « DAMN » pique déjà la curiosité. Chaque titre ne porte qu’un seul mot et, à l’instar du nom de l’album, chacun est écrit en lettres capitales. Dés le nostalgique « BLOOD », à l’intro aux voix démultipliées angéliques, avec son texte parlé-chanté, Lamar nous entraine droit dans le précipice de l’émotion. À la fin de la chanson, un montage de dialogues piqués à FOX News condamne les critiques des brutalités policières lancées par Kendrick Lamar aux BET Awards et lui en fait une œuvre d’art. Puis, nous encaissons « DNA » comme une puissante décharge électrique, répétitive comme une incantation d’un culte païen et empreint de toute la personnalité de Kendrick, comme s’il avait cherché à nous transmettre son ADN de manière sonique. Brillant. « YAH », qui suit, est délicatement électrochoquée, fantasque aux confins des Outkast et carrément scotchante par le flow posé et assuré du rapper de Compton. Premier hit potentiel puissant comme un direct de Mohamed Ali avec « ELEMENT », où l’on retrouve une contribution de Kid Cudi. Lamar y est presque a capella par moments et c’est une performance vraiment bluffante. Aérienne, presque aquatique « FEEL » porte admirablement son titre pour une compo carrément à fleur de peau où Lamar se livre « Ain’t nobody praying for me » (nul ne prie pour moi) scande-t-il de manière répétitive d’un ton désabusé, mais jamais poing de fer dans un gant de velours n’avait pris autant de sens. Car Kendrick Lamar est manifestement un adepte d’une force tranquille. Premier guest, et de charme, Ririhanna partage le vertigineux et addictif « LOYALTY » LA drogue dure de cet album, le titre qui vous rentre dans la peau dés que vous l’avez écouté. Car qui saurait résister à Riri et Keke en duo de choc ? À nouveau KL ne craint pas de partir sur une longue tirade, mais toujours sur un mode dépouillé, presque en a capella. C’est bien tout le style Lamar, un rap par petites touches, d’une incroyable sophistication, sous ses allures dépouillées.
Jamais on ne parviendra l’égaler
Incontestablement, mon titre favori de tout le projet voici « PRIDE », beau comme un « Purple Rain » de Prince, sensuel comme une balade de Lenny Kravitz, et au refrain good vibrationesque comme le « garçon de la plage » qu’il est, LE titre avec lequel il a su sans doute déjà propulser ce « DAMN » au sommet de nos Everest soniques. À des années-lumière, le secoué-agité « HUMBLE » était le premier simple issu de l’album. Vindicatif et entêtant, il porte en lui toute la sourde révolte dont Lamar sait si bien faire preuve. Autre moment fort, « LUST » sur ses bandes passées à l’envers démontre non seulement tout le talent de vocaliste, mais également l’imagination sans contrainte de notre aveuglante star west coast. Back to space avec « LOVE » qui nous arrache à l’attraction terrestre pour nous téléporter aux confins de la galaxie, sur ses séquences en forme d’échos. Encore plus surprenant, une collaboration Kendrick Lamar/ U2 « XXX » marque aussi également un des temps forts de ce 4éme album. Émouvant et lancinant comme une composition de mon héros Curtis Mayfield, « FEAR » réveille en nous la pure nostalgie 70’s des « Superfly » et autres « Shaft », en réminiscence d’une radieuse blaxploitation. Tout simplement divin, on va dire que « GOD » porte admirablement bien son titre, 😉 tandis que «DUCKWORTH » clôt ce merveilleux et insensé projet, avec toute la nonchalance killeuse d’un Clint Eastwood dans un film de Sergio Leone. À l’écoute des quatorze morceaux choisis de « DAMN », on comprend aisément qu’un tel ouragan zen ait su tout balayer sur son passage. Du coup, on pige beaucoup mieux son titre : « damnation »…doivent penser tous ses concurrents qui se disent « jamais on ne parviendra l’égaler ». Ca va pas être facile, on va dire !