FRANK SINATRA UNE MYTHOLOGIE AMÉRICAINE
Frank Sinatra la « voix ». Frank Sinatra « les yeux bleus ». Frank Sinatra le crooner ultime. Frank Sinatra le tombeur de ces dames. Frank Sinatra le pote des mafieux. Frank Sinatra idole immortelle, Ol’ Blue Eyes était tout cela à la fois et bien plus encore. Pour mieux cerner tous ces Sinatra, en quatre thématiques « Frank Sinatra : Une mythologie américaine » de Steven Jezo-Vannier nous éclaire sur la destinée tumultueuse du légendaire natif d’Hoboken, New Jersey.
En 1959, le célébrissime vocaliste s’engage pour le parti Démocrate et soutient à fond le jeune candidat John Kennedy. Quelques semaines plus tard, il chante carrément pour promouvoir le futur POTUS. Intitulée « High Hopes( with John Kennedy) » la chanson contribuera largement à faire pencher la balance électorale du côté du jeune sénateur du Massachusetts : « Tout le monde vote pour Jack / Parce qu’il a ce qui manque à tous les autres / Tout le monde veut soutenir Jack / Jack est sur la bonne voie / Parce qu’il porte de grands espoirs / Il porte de grands espoirs /L’année 1960 est celle de ses grands espoirs/ Venez voter pour Kennedy / Votez pour Kennedy / Et nous en sortirons vainqueurs ! »
On a tous quelque chose en nous de Sinatra. La preuve, dans ma playlist ultime de 11.000 titres (un jour peut-être, qui sait… je la partagerai avec vous…on verra) il y en a tout de même 35 d’Ol Blue Eyes…un minimum syndical, car il n’y a pas de mal à se faire du bien ; on apprécie toujours un petit Franckie de derrière les fagots ! Et « Frank Sinatra : Une mythologie américaine » se lit encore mieux en écoutant le maestro.
Par Jean-Christophe MARY
Ce portrait richement illustré retrace le bouillonnant âge d’or de l’un des plus grands « entertainer » du XXe siècle. De sa plume alerte, Steven Jezo-Vannier nous brosse un portrait très réussi qui s’il n’omet pas les zones d’ombres met aussi en avant les immenses qualités de Frank Sinatra.
Le texte débute avec l’arrivée d’une modeste famille d’origine sicilienne, les Sinatra, à Ellis Island en 1900, raconte les circonstances de la naissance de Frank le 17 décembre 1915. On partage les grands moments de sa vie de son enfance à Hoboken dans le New Jersey aux derniers concerts en 1994 en passant par ses premiers adieux à Los Angeles en 1971. Je thème, moi non plus…, Steven Jezo-Vannier organise la narration autour de quatre grands thèmes : la naissance du chanteur (1915 1944 ) la naissance d’une star (1944 1952) la naissance d’un mythe (1961 1971) et la naissance d’une légende (1971-1988). Au fil des pages, on suit l’ascension fulgurante de ce roi de la musique populaire, son statut de chanteur dans les relais pour routiers à celui de star mondiale. Le lecteur voyage entre New York et Miami, Los Angeles et Las Vegas au grès des concerts les plus marquants de « The Voice », surnommé aussi « Ol’ Blue Eyes» parce qu’il faisait défaillir les femmes d’un seul regard azur.. L’auteur dépeint l’hystérie des concerts de ce jeune crooner qui attise la déviance et la délinquance juvénile, titille les aspirations sexuelles de milliers d’adolescentes. Pendant l’entre-deux guerre, sa voix, l’une des plus écoutées en Amérique, mobilise les foules. Le phénomène prend des proportions inédites en 1944 : il touche alors des cachets de 3000 dollars /semaine. Idole de la jeunesse américaine des années 50, Franck Sinatra aura vendu des centaines de millions de disques à travers le monde. Acteur de cinéma, il est adulé par des stars du grand écran telles Ava Gardner, Marilyn Monroe ou Mia Farrow.
Frank Sinatra qui fréquenta étroitement près d’une douzaine de présidents américains a surtout porté son soutien au Parti démocrate, dont John F. Kennedy lui dut en partie son élection de 1960. N’étant pas officiellement invité aux funérailles, on y apprend que la star fortement affectée resta cloitrée chez elle à pleurer durant trois jours. On note aussi les engagements courageux du chanteur en faveur de l’égalité raciale ou contre l’antisémitisme. Mais il y eut aussi une face plus sombre, même si elle est loin de résumer un personnage aussi complexe, comme ses relations avec la mafia, ses tentatives de suicide ou ses caprices de star. Avec ses qualités et ses défauts, Sinatra fut l’un des artistes emblématiques de son temps. Il avait un tempérament de chien, mais un talent inégalable. Son parcours fut exceptionnel et il en subsiste aujourd’hui la nostalgie d’un âge d’or révolu. Il fut et reste encore pour des millions d’aficionados « la voix de l’Amérique ». En 526 pages, cet ouvrage réussit à capturer la personnalité complexe et compliquée du chanteur. Il est à la fois plus grand artiste du monde et son propre porte-parole les plus sévères. Harry Belafonte a souvent déploré les anecdotes racistes que Frank Sinatra et Dean Martin portaient à Sammy Davis Jr. Illustré des pochettes 33 tours de l’époque, le texte offre une analyse de la discographie, évoque les enregistrements, les conditions dans lesquels ils se sont déroulés, parle des musiciens de Count Basie sans oublier le fameux et tout aussi prestigieux Rat Pack (Dean Martin, Sammy Davis Jr., Peter Lawford, Joey Bishop). Un ouvrage indispensable, non seulement aux fans, mais aussi à tous ceux qui voudront découvrir la vie et l’œuvre de cet immense artiste qui a marqué le 20ème siècle de son empreinte et reste encore aujourd’hui une idole dans le monde entier.
« Frank Sinatra : Une mythologie américaine »
par Steven Jezo-Vannier
Éditions Le Mot Et Le Reste