36 POSITIONS AVEC NINA HAGEN

Voici 42 ans dans BEST, GBD retrouvait Nina Hagen, dans sa chambre de l’Intercontinental Hôtel à Paris, pour découvrir les 36 positions de la chanteuse tout juste âgée de 27 ans, qui donnait après trois ans de silence un successeur à son fulgurant « Unbehagen »… et naissance à sa fille Kosma Shiva Hagen serrée dans ses bras telle une nouvelle vierge…. Enfin si l’on veut… Marie… mais carrément punk ! Flashback pour une ITW déjantée…

C’est sans doute un de mes entretiens les plus allumés que cette rencontre parisienne avec Nina Hagen. Et en tout bien tout honneur, levant ainsi un voile sur le titre de l’article.  Mais il faut avouer qu’on attendait tous de pied ferme un successeur à son hit galvanisé, l’hallucinant « African Reagae », petit bijou de modernité reggae punky funky insurgée. Hélas, après trois ans d’attente, le résultat n’était pas franchement à la hauteur de nos expectations.  Entre temps, Nina avait viré Spliff, son ancien groupe, en partie responsable du son fusion à succès de « Unbehagen » et qui se vengera en publiant un an avant leur ex-boss, l’excellent « The Spliff Radio Show »… dont nous reparlerons demain c’est promis ! Quant à ce tout nouveau « NunSexMonkRock », il avait été réalisé à New York par Mike Thorne, qui avait signé la prod des disques de Wire ou de Soft Cell. C’était un disque crucial, le tout premier 33 tours en anglais de la chanteuse allemande. Hélas, ce fût une déception massive. Rolling Stone le qualifiant tout de même de « l’album le plus inaudible jamais sorti », ce qui explique qu’il soit assez peu question de musique entre Nina et moi. Le seul « single », si l’on veut, du projet, «  Smack Jack » est intégralement voué au culte de l’héroïne, une dérive destroy que Nina partageait alors avec son homme, le guitariste néerlandais Ferdinand « Ferdi » Karmelk- il décèdera  d’ailleurs en 1988 à Ibiza du SIDA- qui signait justement le titre… qui évoquait soi-disant Herman Brood, son prédécesseur, rock star cruciale de la scène rock hollandaise qui a donc durablement partagé la couche, comme les addictions de nôtre Madone de « NunSexMonkRock », façon Linda Blair… je veux dire de Nina Hagen… qui croyait que je travaillais pour un mag de charmes, BREAST au lieu de BEST, par conséquent j’ai directement improvisé cette interview spéciale « 36 positions »…

 

Publié dans le numéro 169 de BEST sous le titre :

 

ANNONCES FAITES À NINA

 

Qu’est-ce qui l’a frappée sur le citron ? Le soleil de LA, l’abus de l’acide ou que sais-je encore ? Après le peak d’« African Reggae », Nina Hagen a tout simplement disjoncté. Elle a viré ses musiciens pour plonger dans le mysticisme. Nina en a même profité pour faire un mouflet, qu’elle a baptisé du doux nom de Kosma Shiva. J’imagine le calvaire de la môme lorsqu’elle sera à l’école : « Kosma Shiva Hagen, mais quel est donc le carré de l’hypoténuse ? ». Le nouvel et inaudible album de Nina fut enregistré à New-York par Mike Thorne. « Nun Sex Monk Rock » est un grand pas en avant dans la direction du cauchemar. Nina y glapit, gémit, hurle, se déchire sur les guitares de Chris Spedding avec la complicité de quelques nouveaux Germains. Dans un papier paru dans Le Matin Mag, Zerbib raconte la Genèse de ce « Sexe de nonne, rock de moine » et elle n’est pas piquée des hannetons : au cours d’un trip, Nina aurait rencontré un ange qui l’emmena voir Dieu, voilà pourquoi elle s’est retrouvée en cloque. On peut rêver. Moi, je crois plutôt qu’elle a battu le record de cette jeune Californienne qui a vu 222 fois « Star Wars » : Nina s’est payé un magnétoscope et une cassette de « L’Exorciste », qu’elle a visionnée durant toute sa grossesse. Elle s’est donc directement inspirée des mugissements de Kitty Winn, including la purée de pois verdâtre. Vous savez : « Fuuuuckkk me… ». Lorsqu’elle m’a reçu dans sa chambre de l’Intercontinental, Nina était persuadée de recevoir un journaliste de Breast Magazine ( sein magazine) … pourquoi pas Union ou Harmonie du couple ! Comme tout cela manquait de sérieux, j’ai proposé un petit jeu à la Nina sur la base d’associations de mots à partir d’une liste préalable.« Yeah yeah yeah•yeah… 1 know 1 know I know », a-t-elle répondu. Voici donc en exclusivité pour Breast les 36 positions de Sainte Nina.

 

Tarzan l’homme singe :

Cassius Clay… il est le greatest. Lorsqu’il était en liaison avec Dieu, il a décidé de gagner pour défendre sa cause.

 

Moral Majority (droite reaganienne) :

 Qu’est-ce qu’une majorité ? Je ne sais pas (voix Exorciste)… (Puis elle prend une voix de petite fille) Je suis un poisson, tu sais. Les petits poissons comme nous ne sortent jamais de l’eau. On ne sort pas pour respirer, on n’en a jamais besoin.

 

Pense:

Ne pense pas. Laisse Dieu penser, sois sûr de cultiver en toi cette chose qu’on appelle l’amour. Ne te sens pas coupable : ne pense pas.

 

Duke’s (cafète du Tropicana Motel où elle a vécu, à LA) :

L’art fait de toi un duc de la Vie. L’art véritable anoblit.

 

Football:

Balls ! (couilles).

 

Port-Stanley (les Falklands) :

Un jour, j’aurai un grand bateau avec une piscine et un studio d’enregis-trement, une scène et une salle de contrôle vidéo qui ressemblera à un vaisseau spatial.

 

Z (cf. le film de Costa-Gavras) :

Z comme Zen.

 

Vaudou:

L’église du Vaudou, là où l’on.pratique la magie noire et où l’on peut baiser devant tous les autres.

 

D.B.’s (décibels) :

Fort. Lourd. Doux.

 

666:

Prophète ! Prophète ! Prophète ! Diable, Diable… la mort. Le chif-fre 6 fait de toi un prophète.

 

« Reds »(film de Warren Beaty) :

Rats.

 

41 Flavors ( 41 parfums… chaîne de glaciers américains) :

Pas 41, mats 36 : quand tu pratiques l’art véritable sur scène, ça te conduit droit au paradis.

 

KROQ :

…FM, Pasadena. Le poisson Los Angeles. A Hollywood, on fume de la ganja.

 

Le grand schisme :

 (Nina se contente de péter avec sa bouche en coeur).

 

Nid de coucou :

LSD.

 

Funk:

Punk (en allemand). Dieu bénisse les punks.

 

007:

C’est trop loin du véritable paradis.

 

La Lune :

(onomatopées)  Grrrargug… Bruits : Gurrrggghhhh…

 

Maggie Thatcher:

Woolworth (les Galeries Lafayette de Londres).

 

Lingerie (club branché de LA) :

Capotes anglaises.

 

Back in USSR:

The Beatles.

 

Karma :

Il n’y a pas de culpabilité, il n’y a que l’amour.

 

Spliff :

 Je suis possédée par un petit démon du nom de Bob Marley parce que je fume de la ganja à Longueur de journées

Cruise missile:

Croisière d’amour.

 

Mégalomaniaque :

Un faiseur de hits italien.

 

Femme :

Homme.

 

Underground :

Sous-culture.

 

Investissements :

Le Diable.

 

Task Force (flotte et armée anglaises) :

Knock knock knock on heaven’s door.

 

Dub :

C’est si bon.

 

Perrier :

Avec du vin blanc. Aqua de la Madonna.

 

Tubes :

Mais où sont-ils passés, mais où sont-ils passés ?

 

Nina Hagen:

1/2/77. (voix mâle) Je suis Hans Hagen, le nouveau Jésus.

 

Rencontre du troisième type :

Nun Sex Monk Rock « UFO », la dernière chanson c’est à cause d’une apparition que j’ai eue à Malibu, au quatrième mois de grosesse. Babylone va tomber et Jésus viendra sur son UFO pour nous emmener. II emmènera tout le monde, car il aura plusieurs vaisseaux.

 

Exorciste :

Je suis une exorciste hé hé hé hé… (Nina joue à être Hans son mari imaginaire avec un raclement de la toux du fumeur) : « Je suis Hans Jesus Trip God et Nina est un génie dans sa bouteille que j’éveille selon mon bon désir. »

Dommage qu’elle soit aussi fêlée, Nina ; elle peut chanter comme personne. Elle improvise Piaf « N000 nnn rrrrien de rrrrien… je ne regrette rien… » ou « Carmen » : « L’amour est un enfant de Bohème » et c’est tout simplement divin. Barge ne signifie pas perdre son sens des affaires ; Nina se souvient in extremis de sa prochaine tournée européenne à la rentrée. La reconnaissance du ventre, en quelque sorte. Moi qui me prends de temps à autres, pour le Messie, aujourd’hui je prie pour cette pauvre biquette égarée.

 

Publié dans le numéro 169 de BEST daté d’aout 1982