BIRIMA AU CHATELET

Birima by Pierre René-Worms

C’était hier soir au Théâtre du Chatelet, la dernière des quatre journées de représentations de BIRIMA, l’incroyable spectacle protéiforme donné par Youssou Ndour, à la fois concert, comédie musicale, ballet et merveilleux conte africain qui porte le nom de mon tube favori du leader du Super Étoile. Et des étoiles, il n’en manquait pas dans nos yeux. Durant un peu plus d’une heure trente minutes BIRIMA a su m’enchanter en chantant sur les chansons de Youssou dans un show spectaculaire donné par près de cinquante comédiens, danseurs, choristes et musiciens… juste vertigineux !

Birima by Pierre René-Worms

C’était il y o près d’un demi siécle, quatre décennies pour être exact lorsque j’ai rencontré Youssou pour la première fois. Lui et moi avions dans les ving-cinq ans et je démarrais « Planète » mon émission quotidienne sur RFI. Et d’emblée j’avais été subjugué par la voix mais également tout le charisme du leader du super Étoile de Dakar. D’ailleurs deux ans plus tard pour fêter l’anniversaire de « Planète » dans les sous-sols du Rex-Club, l’affiche était composée des Avions, d’Ismaël Lo… et d’un certain Youssou Ndour ! Au fil de toutes ces années, s’il n’a rien perdu de son incroyable appendice vocal, Youssou n’a jamais cessé de progresser. Dans sa musique bien sûr, menant de front deux carrières, l’une au Sénégal et la seconde à l’international. Mais aussi et surtout en tant qu’homme à travers son sens inné de la justice et de l’équité, ce qu’il a toujours pratiqué en tant que chef d’entreprise de son studio, label mais aussi radio. Et s’il est après Pete Garrett ( Voir sur Gonzomusic  ) le second chanteur qui aura suivi son engagement politique en entrant au ministère de la Culture, ce n’est pas un hasard. Et s’il a mis entre parenthèses son engagement politique pour le moment, l’artiste aura profité de la parenthèse COVID pour imaginer ce spectacle juste féérique à quatre mains avec Pape Oumar Ngom, le guitariste lead du Super Étoile, qui porte le nom d’un de leur plus grand hit « Birima ».

Birima by Pierre René-Worms

Car comme dans la chanson, le show a pour personnage central le roi Birima du Cayor (ancien royaume du Sénégal entre 1566 et 1886). L’intriguen se déroule au sein de la cour royale, où entouré de ses griots, de ses conseillers et de sa cour, le roi doit trancher les conflits entre ses sujets en respectant un code de l’honneur qui donne la primauté au respect de la parole donnée. En quatre actes BIRIMA joue et gagne sur tous les tableaux. Le spectacle est véritablement… spectaculaire avec ses costumes colorés, ses danseurs qui bondissent dans tous les sens au rythme entêtant des percussions et du son aigrelet de l’irrésistible sabar. Mais c’est aussi une pièce de théâtre qui rappelle la grandeur passée de ce pays, avant qu’il ne soit colonisé et, à ce titre, les comédiens assument ce rôle mémoriel essentiel pour les nouvelles générations. Enfin, il y a l’aspect le plus essentiel : celui de la musique et là aussi on est comblé. Une quinzaine de musiciens assurent cette colossale architecture sonore qui supporte la voix du « chanteur attitré du roi », alias l’ami Youssou, qui a su intégrer une douzaine de ses chansons dans cette ambitieuse trame historique, dont l’emblématique « 7 Seconds ». Et c’est ainsi que tout s’imbrique parfaitement, le concert dans le spectacle dans le ballet, à la manière d’une vaste matrioska artistique et forcément sénégalaise. BIRIMA spectacle complet nous aura téléporté l’espace de 90 minutes dans une Afrique juste et belle, un peu à la manière du Wakonda de « Black Panther », mais en bien plus soniquement authentique et subjuguante. Tout ce qu’on peut souhaiter à BIRIMA c’est de faire résonner bien fort son tam tam à travers toutes les scènes de la planète.

Photos by Pierre René-Worms